Si nous ne le rejetons pas en bloc, nous l’estimons néanmoins insuffisant. De surcroît, nous affirmons qu’il agit en trompe-l’œil, laissant croire qu’une hausse des budgets effacerait le reste des manquements en matière de politique étrangère et militaire du Gouvernement.
Ce que nous affirmons depuis longtemps déjà, c’est que la France doit conserver, ou plutôt retrouver, son indépendance, afin que notre pays puisse avoir sa voix propre dans le concert des nations.
Or force est de le constater, malgré certaines avancées dans ce qui ne reste qu’une projection, la réalité demeure bien éloignée de cet objectif.
Sur le plan financier, le flou, qui n’a rien d’artistique, entourant le financement du budget des OPEX, d’ailleurs largement sous-évalué, n’est plus acceptable. Qui des armées ou de l’interministériel en assumera la charge ? Mystère…
À ce jeu de « la roulette de Bercy », nos armées sont perdantes, car les arbitrages se font au détriment des programmes d’équipements. Or rogner sur ces derniers, c’est jouer avec la vie de nos soldats.
Sur le plan stratégique, nous ne voulons pas d’un alignement aveugle sur les positions des États-Unis. L’OTAN exerce une tutelle trop forte sur la politique de défense française. De ce point de vue, notre réintégration fut une erreur, et elle le reste.
Sur le plan militaire, nous sommes isolés au Mali et notre armée s’y use. Sur le dossier syrien, notre intérêt n’est pas d’affaiblir le régime d’Assad, que nous estimons être un rempart contre le terrorisme islamique, malgré vos affirmations, madame le ministre.
Sur le plan industriel, ensuite, nous dénonçons la stratégie issue tout droit du « macronisme », que l’éphémère ministre de la défense Sylvie Goulard avait décrit en ces termes : « Si nous voulons faire l’Europe de la défense, il va y avoir des restructurations à opérer, à faire des choix, des choix de compatibilité et, à terme, [des choix] qui pourront passer dans un premier temps aboutissant à privilégier des consortiums dans lesquels les Français ne sont pas toujours leaders ».
Vous avez bradé STX à Fincantieri pour moins de 80 millions d’euros. Aujourd’hui, c’est Naval Group qui est menacé. Si nous n’avons rien, bien au contraire, contre des accords bilatéraux, ceux-ci doivent reposer sur des intérêts communs. Cela ne fonctionne pas avec nos partenaires allemands, qui, eux, agissent pour préserver leurs propres intérêts. Comment les en blâmer ?
Nous dénonçons un changement amorcé depuis déjà plusieurs années, celui d’une dépendance mutuelle avec nos partenaires européens, qui se traduira à terme par l’abandon de notre système de défense nationale.
Ce que vous qualifiez d’« efforts financiers » reste cruellement insuffisant. Les budgets annuels de votre LPM sont au-dessous des efforts financiers allemands et britanniques et ne tendront vers les 2 % du PIB qu’en 2025. Il ne peut exister de diplomatie indépendante sans une armée indépendante, sans une industrie nationale d’armement indépendante, sans un gouvernement indépendant.
À la vue courtermiste d’un banquier d’affaires au regard figé sur sa comptabilité, nous préférons quant à nous la vision nationale et historique de souveraineté. C’est l’honneur et l’intérêt de la France de maintenir, comme elle l’a fait tout au long de son histoire, en tout cas jusqu’à un passé récent, une voix souveraine et non alignée.
Nous avons les outils, nous avons l’intelligence, nous avons l’expérience, nous avons les soldats prêts au sacrifice de leur vie, pour que vive la France, et, pourtant, vous vous appliquez à les démanteler un à un.
Au nom de la France, de son armée et de ses soldats, nous ne pouvons l’accepter.