Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi de programmation militaire dont nous commençons l’examen ce jour marque la fin d’une décennie d’érosion qui a abouti à des pertes d’effectifs importantes.
Ce texte conjugue avec le nécessaire renouvellement des équipements des armées la volonté de maintenir notre pays comme l’un des acteurs majeurs en matière de défense, en prévoyant de doter nos armées de matériels au meilleur niveau technologique et en nombre suffisant.
C’est donc une LPM de remontée en puissance, mais également de défis. En effet, elle doit, en alliant budget et stratégie, instituer, d’une part, la dissuasion en enjeu majeur et, d’autre part, assurer la protection de notre territoire national, dans un contexte de menace terroriste permanente et de retour d’une rhétorique de puissance à l’échelon international.
Cette loi de programmation militaire couvre la période 2019–2025, avec deux séquences : une première, de 2019 à 2022, avec un budget en hausse annuelle de 1, 7 milliard d’euros ; puis, une seconde, de 2023 à 2025, avec une augmentation du budget des armées qui atteindra 3 milliards d’euros par an.
La trajectoire est ambitieuse, mais elle peut apparaître douteuse après 2022, certes pour des raisons politiques, mais également par l’absence de trajectoire financière pour les infrastructures et par le manque de visibilité concernant les échéances de livraison de matériel.
En ce sens, notre groupe Union Centriste a souhaité déposer un amendement ayant pour objet d’inviter le Gouvernement à réaliser avant le 1er janvier 2021 une actualisation de la revue stratégique de défense et de sécurité nationale, afin d’évaluer les mutations stratégiques à la date de cette actualisation.
Notre travail en commission nous a d’ores et déjà permis de revenir sur de nombreux sujets. Je pense notamment à la question de la durée d’autorisation d’absence octroyée aux salariés des entreprises de plus de 200 salariés au titre de leurs activités de réserve.
À la quasi-unanimité, nous avons ramené ce congé à huit jours, contre les cinq qui sont actuellement en vigueur, et au lieu des dix jours souhaités par nos collègues députés. En effet, ce passage à dix jours n’a jamais été sollicité, ni par les réservistes eux-mêmes, ni par les associations qui les fédèrent, ni par le ministère des armées, ni par le secrétaire général de la Garde nationale.
Notre commission a également réintroduit à l’article 32, au sein du contentieux administratif, les spécificités des formations de jugement actuelles, et a précisé à l’article 36 les conditions de détermination des pensions militaires d’invalidité.
Notre groupe veillera pendant les débats à ce que les droits des blessés et pensionnés soient préservés.
Je souhaite aussi souligner les modifications apportées à l’article 5, afin de garantir que toute extension du service militaire volontaire, ou SMV, s’effectue avec des ressources supplémentaires par rapport à celles qui sont consacrées à la LPM. En effet, ce dispositif pourrait être amené à monter en puissance, dans le cadre du service national universel – SNU– voulu par le Président de la République.
Madame la ministre, j’insiste sur ce point : l’extension du SMV ou la naissance du SNU ne doivent en aucun cas se faire au détriment des moyens dévolus à la défense proprement dite et aux objectifs initiaux. Un certain nombre de rapports ont d’ailleurs été réalisés sur le sujet.
Je souhaite enfin évoquer le pari des coopérations capacitaires européennes.
Le rapport de la Cour des comptes sur la coopération européenne en matière d’armement publié en avril 2018 présente un bilan peu encourageant et souligne que « la plupart des grands programmes en cours ont rencontré des succès technologiques parfois remarquables, mais aucun n’a atteint la totalité des caractéristiques militaires espérées et n’a respecté son calendrier ».
Alors que le Royaume-Uni est affaibli par le Brexit – cela a été souligné – et que le partenariat avec l’Allemagne repose aujourd’hui plus sur une affirmation politique que sur une réalité opérationnelle, la situation est extrêmement fragile et inquiétante. C’est un sujet, madame la ministre, qu’il conviendra d’aborder en profondeur avec vous.
L’effort particulier du projet de loi dans le domaine du renseignement doit être salué, puisqu’il est susceptible de fédérer des partenaires autour de la France, tout en contribuant à l’autonomie stratégique européenne.
De nombreuses questions pourraient être abordées : la réflexion sur le dispositif Sentinelle ; le patrimoine immobilier sur la ville de Paris ; le risque de suractivité qui pèse sur les armées ; et bien d’autres…
Je laisserai le soin à mon collègue Gérard Poadja, sénateur de Nouvelle-Calédonie, d’aborder les spécificités de cette LPM qui concernent les outre-mer, et notamment la zone Pacifique.
À travers les amendements que mes collègues et moi-même défendrons, le groupe Union Centriste s’efforcera d’enrichir ce projet de loi, mais porte dès à présent un regard très favorable sur le texte.