Intervention de Christian Cambon

Réunion du 22 mai 2018 à 14h30
Programmation militaire pour les années 2019 à 2025 — Article 4, amendement 64

Photo de Christian CambonChristian Cambon :

Monsieur Savoldelli, nous faisons une analyse diamétralement opposée de l’importance des OPEX et des missions intérieures !

Si votre amendement était adopté, nous constaterions la suppression pure et simple de la provision pour les OPEX et les missions intérieures. Par conséquent, privés de cette provision, nous serions obligés d’aller puiser dans les autres crédits des armées, ce qui affaiblirait les programmes d’équipement, puisque ces sommes seraient prélevées aux dépens de ces programmes. Cela compromettrait la sécurité de nos soldats et maintiendrait des matériels vieillissants.

J’ajoute que, sur le plan constitutionnel, les choses sont tout à fait clairement définies : le Président de la République est le chef des armées, et c’est du reste à ce titre qu’il a engagé les armées dans les opérations Serval et Barkhane – l’intervention était une nécessité absolue –, avec le succès que l’on sait.

Par ailleurs, ce dispositif relève de l’application de l’article 35 de la Constitution. Vous dites, mon cher collègue, que ces provisions ne font pas l’objet d’une validation. Bien au contraire, dans les trois jours suivant la décision d’envoyer des soldats dans le cadre d’une OPEX, le Parlement est informé. La prolongation de l’opération au-delà d’une durée de quatre mois fait l’objet dans cette enceinte d’un débat qui a toujours eu lieu. Je dois dire que, à chaque fois, l’assentiment fut très large. On peut donc considérer que le Parlement est totalement consulté sur ce sujet.

La commission émet par conséquent un avis défavorable sur l’amendement n° 64 rectifié.

En ce qui concerne l’amendement n° 132 et l’usure du matériel dans le calcul du coût des OPEX, nous entrons dans la promesse que je vous avais faite, madame la ministre : vous rendre service, vous conforter et vous aider, parfois au-delà de votre propre volonté, voire de celle d’un ministère qui est proche de mon département, situé sur la rive nord de la Seine…

Il faut que la future loi de programmation militaire soit sincère. Le signal que nous proposons d’envoyer est qu’il faut prendre en compte l’usure des matériels. Il ne s’agit pas d’entrer immédiatement dans la régulation budgétaire, les projets de loi de finances successifs le démontreront. En revanche, il n’est pas nécessaire d’être ingénieur de l’armement pour comprendre qu’il y a une usure des matériels utilisés au Sahel. Mes collègues Ladislas Poniatowski et Olivier Cigolotti et moi-même, lors d’une mission récente, avons eu l’occasion de constater de visu la quantité de pneus éclatés et de véhicules hors service. Les visites d’un certain nombre d’ateliers de nos armées, dans lesquels sont rapatriés ces véhicules, montrent, s’il en était besoin, le fondement de nos amendements.

Nous souhaitons que, dans le calcul du coût des OPEX, il puisse être tenu compte de cette usure prématurée des matériels. C’est un signal que nous souhaitons donner, je le répète. Il conviendra ensuite, au travers des exercices budgétaires, de conjuguer cette obligation. Aussi, à mon grand regret, car je ne désire absolument pas vous faire de peine tout au long de notre discussion, je suis obligé, pour respecter ma promesse de vous aider, de maintenir le texte de la commission et d’émettre un avis défavorable sur votre amendement.

L’amendement n° 133, visant à prendre en compte le financement des surcoûts OPEX, relève de la même logique. Le Gouvernement reconnaît en quelque sorte qu’il envisage de faire supporter aux armées l’essentiel du financement interministériel de ces surcoûts. Vous vous êtes livrée, madame la ministre, à un exercice de vérité que nous saluons, c’est-à-dire prévoir une somme beaucoup plus conforme à la réalité. Avec 1, 1 milliard d’euros, on va dans le bon sens.

Mais on ne peut pas exclure, et mon collègue Ladislas Poniatowski aura l’occasion d’y revenir, que l’on aille au-delà de cette somme, compte tenu de l’intensité des opérations qui sont liées.

Le principe que nous défendons est simple : à partir du moment où il y a un surcoût, l’interministériel doit prendre en compte le financement à due proportion de ce que représente le budget du ministère des armées dans l’ensemble du budget. Sinon, le procédé consiste à rattraper d’une main ce qu’on a donné de l’autre.

Voilà pourquoi j’émets également un avis défavorable sur votre amendement, encore une fois pour aller dans le sens de la volonté du Sénat, singulièrement de la commission saisie au fond, d’une vérité non pas des prix, mais des coûts, particulièrement pour les OPEX. Car il est impossible de savoir comment évolueront demain les coûts de ces opérations – ils pourraient durablement et durement grever votre budget.

Quant à l’amendement n° 32, il vise à supprimer la clause de maintien aux armées du reste de la provision pour les OPEX éventuellement non consommée.

C’est un cas de figure peu probable. Comme je viens de le dire, nous nous situons plutôt dans la perspective d’un dépassement des crédits alloués. Si par bonheur la provision n’était pas entièrement consommée, nous serions très désireux de voir ce montant non utilisé revenir au renforcement de nos infrastructures. J’ai relevé les insuffisances de crédits alloués au service de santé des armées, au commissariat… Voilà de bons endroits où l’on pourrait mettre un petit peu d’argent pour améliorer la situation.

L’avis de la commission est donc défavorable.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion