L'IPP est issu d'un partenariat entre l'École d'économie de Paris et le Crest (Center for research in economics and statistics), deux centres universitaires qui sont dédiés à l'évaluation des politiques publiques. L'objectif de l'IPP est de diffuser des techniques et des méthodes développées dans le monde universitaire pour éclairer l'évaluation des politiques publiques.
Dans le cas particulier des données du système socio-fiscal, nous privilégions la méthode de la micro-stimulation : il s'agit de confronter un simulateur, comme OpenFisca, à des données individuelles représentatives de l'ensemble de la population pour simuler les effets d'une modification du système socio-fiscal.
Il nous faut donc connaître les lois et règlements qui déterminent le système socio-fiscal mais aussi avoir accès aux données individuelles. Dans le monde universitaire, la plupart de ces modèles a fonctionné sur des données d'enquêtes, notamment celles de la statistique publique produite par l'Insee. Ainsi en était-il des enquêtes sur les revenus fiscaux et sociaux qui, à l'origine, permettaient de mesurer le chômage et auxquelles des données étaient ajoutées pour mener des simulations. Ces données d'enquêtes ne permettent cependant pas forcément d'évaluer de façon précise l'impact de mesures fiscales, car elles ne portent que sur un échantillon restreint de ménages.
Ces dernières années, les évolutions législatives ont permis l'ouverture de données individuelles de type administratif. Les données fiscales ont ainsi été disponibles, bien qu'elles demeurent protégées par le secret fiscal. La loi du 22 juillet 2013 sur l'enseignement supérieur et la recherche a permis aux chercheurs d'accéder à ces données dans un cadre extrêmement sécurisé. Ainsi faut-il adresser une demande auprès du Comité du secret statistique, détaillant l'objet de la recherche et les données demandées. Une fois l'autorisation accordée, par ce Comité puis par la DGFiP, les chercheurs peuvent accéder à ces données mais ces dernières ne sont pas nominatives et leur accès est sécurisé à distance : une carte à puce avec les empreintes digitales du chercheur est fournie pour ne disposer que des données demandées. Il est ainsi possible d'effectuer un travail précis sans pour autant disposer de données nominatives.
La loi du 22 juillet 2013 puis le décret d'août 2014, qui ont modifié l'article L. 135-B du livre des procédures fiscales, ont donc permis de documenter les données fiscales pour une exploitation à des fins de recherche.
Nous constituons un très large échantillon de données individuelles issues des déclarations de l'impôt sur le revenu ou d'autres bases de données afin d'élaborer un site de données qui devrait permettre, à terme, de mesurer l'impact de toute modification du système fiscal. La variation des cotisations sociales a ainsi un impact sur le revenu imposable et donc sur l'impôt sur le revenu. Les incitations de retour à l'emploi doivent prendre en compte à la fois les prestations sociales et la fiscalité. Nous faisons tourner l'algorithme à partir de ces bases de données individuelles. Nous pouvons alors chiffrer les effets d'une variation de l'impôt ou d'une prestation sociale : nous savons qui est touché et quelles sont les réponses comportementales des populations concernées ; nous pouvons évaluer l'optimisation fiscale, le retour sur le marché de l'emploi ou, au contraire, la réduction de la participation au travail.
De très grands progrès ont été réalisés ces dernières années. Certains pays étaient très en avance sur nous et ils utilisaient leurs données administratives à des fins de recherche, tandis que d'autres pays étaient très en retard. La France disposant de données administratives de grande qualité, ce qui n'est pas le cas dans d'autres pays, l'ouverture y a été très rentable car elle a permis d'exploiter des données précises.
Nous avons accès aujourd'hui aux déclarations d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés. Il nous manque des informations sur les taxes locales, les impôts sur le patrimoine et toutes les données sur les impôts hors impôts sur les sociétés et sur le revenu.
L'accès à ces données nous permet d'être très précis sur les impacts d'une modification de l'impôt sur le revenu. Par construction, nous disposons d'informations vieilles de un à deux ans. Il faudrait faire en sorte que ces délais soient les plus courts possibles afin d'éclairer quasiment en temps réel les débats publics.