Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la répétition est l’un des piliers de la pédagogie.
L’article 1er A prévoit le passage en société anonyme à capitaux publics de SNCF, SNCF Mobilités et SNCF Réseau. Il remet donc en cause l’équilibre négocié par les syndicats et entériné par la loi du 4 août 2014 portant réforme du ferroviaire, qui a fait de l’État-stratège un acteur central et a constitué un groupe public ferroviaire indissociable et solidaire.
L’argument consistant à expliquer que l’État doit se protéger de lui-même en limitant sa capacité à imposer des choix politiques coûteux à la SNCF a peu de portée. Celui qui prône une plus forte intégration du groupe ne vaut pas davantage.
Quand bien même vous affirmerez le contraire, madame le ministre, vous n’empêcherez pas que l’on considère que la nature juridique d’une société anonyme en fait un outil au service éventuel d’une libéralisation du service public ferroviaire français, bien au-delà des exigences européennes. La création par la loi de 2014 d’un groupe ferroviaire unifié composé de trois EPIC traduisait un compromis à la fois juridique et social, en accord avec les règles européennes.
Oui, le statut de SA est la forme juridique la mieux adaptée pour une entrée en bourse. Il ouvre la possibilité d’une privatisation. GDF ou France Télécom en sont des illustrations.
Comment ne pas imaginer demain un argumentaire fondé sur l’impossibilité de rechercher de nouveaux financements auprès du contribuable conduisant à demander ceux-ci à la bourse ? L’incessibilité des parts ne résistera pas.
Par ailleurs, un passage d’EPIC en SA entraînera une dégradation de la part des agences de notation. La société anonyme est solidaire de ses dépenses excessives, à concurrence des capitaux propres de la société. Sans garantie de l’État, la nouvelle société n’aura pas les mêmes capacités d’endettement, les emprunts seront plus difficiles à lever et plus coûteux. La transformation en 2004 d’EDF en SA n’a pas empêché la dette de la nouvelle SA de déraper.
À tout le moins et pour conclure, madame la ministre, quel intérêt à transformer en société anonyme SNCF Réseau, qui, par nature, ne peut qu’être en situation de monopole ? L’exemple du Royaume-Uni, qui a renationalisé pour des exigences de qualité et de sécurité, devrait vous inspirer au moment de proposer ce passage en société anonyme !