Intervention de Agnès Buzyn

Commission des affaires sociales — Réunion du 30 mai 2018 à 14h35
Proposition de loi relative à l'autorisation d'analyses génétiques sur personnes décédées — Procédure de législation en commission articles 47 ter à 47 quinquies du règlement - examen du rapport et du texte de la commission

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

Monsieur le Président, vous m'aviez déjà interpellée sur ce sujet lorsque je présidais l'Institut national du cancer (INCa). Vous êtes très tenace !

Par cette proposition de loi, vous souhaitez autoriser la réalisation d'examens de génétique après le décès d'une personne, ce que la loi de bioéthique, en particulier les dispositions qui encadrent le consentement à la réalisation d'un examen génétique, n'autorise pas aujourd'hui. Je partage cette préoccupation.

Vous tentez de résoudre une difficulté réelle, alors que les progrès de la génétique permettent de plus en plus souvent d'analyser les caractères héréditaires prédisposant à la survenue de certaines pathologies, notamment cancéreuses.

Votre préoccupation est également bien identifiée par les professionnels de terrain et les acteurs institutionnels ; les travaux préparatoires à la révision des lois de bioéthique la prennent en compte. Cette révision est engagée depuis le mois de janvier ; plusieurs rapports sont en cours ou vont être remis : celui de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), celui de l'Agence de la biomédecine (ABM) sur l'évaluation de la loi actuelle, celui du Conseil d'État sur les aspects juridiques, celui du CCNE, lequel pilote encore actuellement des états généraux qui associent aussi les citoyens à la réflexion.

C'est pourquoi le vecteur approprié pour la réforme que vous envisagez est, selon moi, la loi de bioéthique, dont la révision est engagée selon la méthodologie prévue par la loi précédente. Le futur projet de loi de bioéthique, qui devrait être soumis aux parlementaires au début de l'année 2019, prendra en considération l'ensemble des implications sur les questions très sensibles et très complexes que vous soulevez, madame la rapporteure, et qui font l'objet de vos amendements. En effet, le sujet n'est pas simplement technique ; il touche au consentement, à l'information des membres de la famille en cas d'anomalie génétique, surtout si cette anomalie fait persister un doute sur un risque particulier. Se pose également la question de la durée de conservation d'un certain nombre d'échantillons.

Toutes ces questions sont au coeur même de l'édifice bioéthique.

Le cadre du consentement génétique est fixé dans le code civil et il constitue un principe d'ordre public. Une modification de ce cas comme de celui de l'information de la parentèle ne peut être traitée de façon isolée, sans prendre en compte l'ensemble des problématiques de la génétique, a fortiori à l'ère de la médecine génomique.

Je suis donc a priori favorable, sur le principe, à l'ouverture encadrée de cette possibilité et à la réalisation d'examens génétiques alors que la personne est décédée. Mais il convient d'en débattre dans le cadre prévu à cette fin, la révision de la loi de bioéthique, en pesant l'ensemble des enjeux et des impacts. Je vous invite à nourrir de vos réflexions et de vos propositions légitimes le projet de loi dès lors qu'il sera déposé au Parlement. Cette question figurera bien dans la loi de bioéthique.

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