Intervention de François Grosdidier

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 5 juin 2018 à 9h10
Proposition de loi relative à l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de François GrosdidierFrançois Grosdidier :

Ayant longtemps été maire, ce sujet m'intéresse depuis de nombreuses années. Les mises en cause répétées et injustifiées de policiers municipaux dans ma commune m'ont particulièrement sensibilisé à cette question.

À l'époque, j'ai décidé d'équiper les policiers municipaux de caméras mobiles. En fait, j'ai d'abord eu à vaincre les réticences des agents eux-mêmes, qui craignaient d'être « fliqués ». J'ai dû les convaincre que ces caméras visaient certes à protéger les citoyens contre leurs éventuels débordements mais, surtout, à les protéger contre des mises en causes infondées.

Dans un contexte où les interventions de policiers sont de toute façon de plus en plus régulièrement filmées et diffusées sur les réseaux sociaux, ces caméras garantissent à nos forces de l'ordre de disposer de l'intégralité des vidéos et les prémunissent contre des accusations fondées sur des images ou des passages volontairement tronqués, qui laissent penser à des comportements violents et arbitraires de leur part. Souvent, les policiers n'emploient la force que pour répondre à des coups !

Le choix de recourir à des caméras mobiles a tout de suite été concluant. Je ne sais même pas pourquoi on parle encore d'expérimentations aujourd'hui ! Chacun mesure en effet le bénéfice de l'utilisation de ces caméras : les citoyens, bien sûr, mais aussi les contrevenants, les policiers et leur hiérarchie, ainsi que les juges.

Les magistrats n'ont d'ailleurs jamais réclamé de cadre juridique particulier : ils estimaient que toutes les images étaient bienvenues et constituaient d'éventuels éléments tangibles et objectifs qui pouvaient les aider à trancher des affaires d'outrage ou de rébellion à une personne dépositaire de l'autorité publique. Malgré tout, les gouvernements qui se sont succédé ces dernières années ont fait voter des lois instaurant un cadre juridique spécifique.

Malheureusement, on complique toujours les choses en France : on a imposé un modèle de caméra très sophistiqué, qui coûte cinq à six fois plus cher que les caméras que l'on trouve dans le commerce, et moins fiable. En tant que rapporteur de la commission d'enquête sur l'état des forces de sécurité intérieure, je peux témoigner de la lourdeur du système, de la complexité des appels d'offres, et de la lenteur de l'équipement de nos forces de l'ordre, en particulier de la gendarmerie nationale, et ce alors même qu'il n'existe pas de meilleur moyen de pacifier les relations que le recours à ces caméras, y compris lors de simples contrôles routiers.

Dans le cadre de l'expérimentation prévue en 2016, on a également imposé aux polices municipales de remplacer leurs caméras par des caméras beaucoup plus chères. Or on ne s'est pas du tout soucié de la prolongation de cette expérimentation, si bien que les polices municipales ne peuvent plus utiliser ces caméras depuis le 3 juin !

Selon moi, il n'y a aucune raison de continuer à expérimenter le dispositif des caméras-piétons pour les policiers municipaux comme pour les sapeurs-pompiers, dès lors que l'on sait déjà que l'expérience est positive ! Il faut le mettre en oeuvre dès maintenant !

Il est aujourd'hui indispensable d'équiper les sapeurs-pompiers, car ils sont, hélas, tout autant exposés que les policiers à ceux qui contestent l'autorité de l'État. Les images enregistrées ne font, de toute façon, de mal à personne. Elles permettent simplement d'établir la vérité.

Il est également indispensable de prévoir des caméras dans les prisons, parce que les systèmes actuels de vidéosurveillance y sont « muets », alors que le juge ou l'autorité disciplinaire ont évidemment besoin du son pour prendre leur décision.

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