L’objet de cet amendement est de renforcer le caractère préventif du projet de loi, caractère qui, bien que le Gouvernement revendique un souci de prévention et de pédagogie, nous semble largement insuffisant dans la rédaction actuelle. C’est d’ailleurs la raison de notre position critique à l’égard de l’ensemble du projet de loi.
L’envoi de lettres ne nous semble pas constituer une disposition pédagogique suffisante, à moins d’avoir une conception très réduite de la pédagogie et de la prévention. Il faut avoir en tête qu’aujourd’hui une grande part des usagers qui téléchargent le plus volontiers ont moins de vingt-cinq ans – il s’agit de cette fameuse « digital generation » dont nous parlent les marketers. Pour ces jeunes, qui sont nés avec internet, le téléchargement est une pratique quasi neutre, voire perçue positivement du fait qu’elle contourne des circuits industriels auxquels leurs pratiques commerciales valent parfois, du point de vue de l’éthique, une très mauvaise réputation.
Les quelques études menées sur les pratiques de téléchargement en France montrent que les usagers sont dans une disposition éthique qui les conduit, une fois qu’ils sont informés des enjeux liés au financement de la création, à accepter de remettre en cause certaines de leurs pratiques : c’est que celles-ci trouvent leur source non pas dans une intention maligne de vol, mais plutôt dans une circulation quasi virale des formes de consommation.
Pour beaucoup, rappelons-le, télécharger est une pratique neutre, et c’est cette neutralité, nous semble-t-il, qui nous fournit le véritable levier d’une lutte efficace contre le téléchargement illicite : il faut attirer l’attention de ceux qui sont concernés sur les conséquences concrètes de leurs actes. Puisque, je l’indiquais, ils ont généralement moins de vingt-cinq ans, nous devons commencer à l’école primaire et continuer au collège, au lycée, voire à l’université.
J’ai eu un moment la tentation, aidé par le rapporteur, de déposer un sous-amendement à l’amendement de la commission. Cependant le nôtre, bien que proche de l’amendement n° 48, me paraît tout de même être plus fin et mieux rappeler l’enjeu de civilisation, les enjeux artistiques. Si M. le rapporteur voulait le faire sien, les autres sous-amendements resteraient pertinents : ce serait une bonne affaire pour tout le monde !