Intervention de Gérard Cornu

Commission mixte paritaire — Réunion du 11 juin 2018 à 14h30
Commission mixte paritaire sur le projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire

Photo de Gérard CornuGérard Cornu, sénateur, rapporteur pour le Sénat :

Le Sénat a mis à profit le temps de la navette parlementaire pour préciser certains points et compléter le texte issu de l'Assemblée nationale. Nous voulions le moins d'ordonnances possible et avons complété les volets social et relatif à l'aménagement du territoire, en gardant toujours un cap très clair. Nous étions d'accord avec le Gouvernement sur l'ouverture à la concurrence, la fin du statut pour les nouveaux recrutements à compter du 1er janvier 2020, et la transformation des établissements publics industriels et commerciaux (EPIC) du groupe SNCF en sociétés anonymes (SA).

Nous avons complété le texte de l'Assemblée nationale sur différents volets : sur l'aménagement du territoire, bien sûr, qui est dans l'ADN du Sénat, mais aussi sur des aspects où nous étions moins attendus - nous avons ainsi renforcé les garanties des salariés. Avec le président Maurey, nous avons reçu tous les syndicats qui voulaient bien l'être. Nous avons également souhaité poser les conditions d'une ouverture à la concurrence réussie, et assurer le maintien d'un haut niveau de sécurité et de sûreté - c'est le point le plus rarement évoqué.

Le Sénat se savait très attendu ; la commission mixte paritaire l'est tout autant. Je me félicite de l'attitude constructive du Gouvernement et du travail réalisé avec mon collègue rapporteur de l'Assemblée nationale ; nous avons eu de nombreux échanges pour préparer une réunion que nous espérons conclusive.

Pour garantir des dessertes TGV utiles à l'aménagement du territoire, le Sénat a réintroduit le dispositif de la proposition de loi du président Maurey et de Louis Nègre, notre ancien collègue. Il s'agit d'obliger l'État à conclure des contrats de service public pour répondre aux besoins d'aménagement du territoire et préserver des dessertes directes sans correspondance, qui sont un atout français : le TGV dessert 230 villes, et emprunte des lignes à grande vitesse puis des lignes normales. Les Français y sont très attachés.

Deuxième direction, nous avons voulu renforcer les garanties des salariés de SNCF Mobilités sur leur devenir et la préservation de leurs droits. Nous avons pris le temps, avec le Président du Sénat et avec le président de la commission, de consulter les représentants des salariés. Nous avons cherché à lever leurs inquiétudes en précisant le cadre relatif au transfert de personnels en cas de changement d'opérateur. Nous avons favorisé le volontariat des salariés pour rejoindre l'opérateur ayant remporté l'appel d'offres, en ouvrant la possibilité de se porter volontaire à l'ensemble des salariés de l'opérateur sortant qui travaillent dans la région concernée.

Nous avons également renforcé les droits des salariés transférés en complétant les éléments de rémunération qui leurs seront garantis : les salariés régis par le statut pourront demander à le réintégrer s'ils sont réembauchés sur un poste vacant pendant une période déterminée. C'est une sorte de « parachute social » donné aux salariés transférés après une période minimale d'adaptation à la nouvelle entreprise. Cette période, initialement comprise entre trois et six ans suivant le transfert, a été allongée à huit ans en séance publique, car c'était une demande forte.

Notre troisième objectif était de veiller à une concurrence équitable, s'exerçant dans des conditions non discriminatoires. Nous ne voulions pas trop d'interactions entre SNCF Mobilités, SNCF Réseau et la holding SNCF, afin que les dés ne soient pas pipés. Le Sénat a donc précisé que le rattachement de Gares & Connexions à SNCF Réseau se ferait sous la forme d'une filiale disposant d'une autonomie organisationnelle, décisionnelle et financière, afin de préserver sa capacité à investir dans le développement et la modernisation des gares. À l'époque, nous étions inquiets de l'endettement de SNCF Réseau et de son impact sur la gestion des gares. Entre-temps, le Gouvernement a apaisé nos craintes.

Nous ne sommes pas revenus sur les dérogations à l'obligation de mise en concurrence des services conventionnés : elles sont prévues par le droit européen, qui laisse la liberté aux régions d'y avoir recours ou non. Mais nous avons conditionné leur mise en oeuvre à un avis conforme de l'Arafer, pour sécuriser juridiquement les décisions des autorités organisatrices et rechercher un équilibre.

Dans ce même souci d'équilibre, nous avons élargi le champ de l'obligation de transmission d'informations aux autorités organisatrices de transport, tout en renforçant la protection des informations couvertes par le secret des affaires. Nous avons autorisé le transfert à l'autorité organisatrice, à sa demande, des matériels roulants et des ateliers de maintenance majoritairement utilisés pour des services conventionnés, comme le prévoyait la proposition de loi.

Enfin, notre quatrième objectif était de maintenir un haut niveau de sécurité et de sûreté au sein du système ferroviaire. C'est pourquoi nous avons expressément autorisé la création d'un groupement d'intérêt public pour favoriser la coopération entre les acteurs dans le domaine de la sécurité, dans le respect des compétences de l'Établissement public de sécurité ferroviaire et de SNCF Réseau.

Le Sénat a donc soutenu cette réforme ferroviaire, en cherchant à apporter de nouvelles garanties aux voyageurs, aux salariés, aux autorités organisatrices de transport et aux entreprises ferroviaires. Nous avions indiqué dès le départ notre attitude constructive et notre volonté de faire aboutir la commission mixte paritaire. Je me félicite que nous ayons travaillé en bonne intelligence avec le rapporteur de l'Assemblée nationale en ce sens.

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