Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte que nous nous apprêtons à adopter constitue la première étape législative d’un processus entamé voilà quelques mois par la mise en place de la commission Olivennes et par la signature des accords de l’Élysée.
Tout d’abord, ce processus a montré que la méthode consistant à réunir tout le monde autour d’une table était constructive et porteuse de réformes. Et cela, madame la ministre, nous vous le devons !
À l’évidence, la négociation nous a permis d’éviter un certain nombre d’écueils et, notamment – il faut bien le dire ! –de revivre le psychodrame qu’a représenté la discussion du projet de loi DADVSI. À l’époque, d’ailleurs, le groupe de l’Union centriste avait hésité entre le vote contre et l’abstention.
Par conséquent, nous nous réjouissons qu’un consensus entre l'ensemble des professionnels ait pu être obtenu.
Pour autant, si le projet de loi était effectivement porteur d’une innovation majeure pour la lutte contre le piratage, il était tout de même perfectible, force est de le reconnaître. Au demeurant, les problèmes qu’il pose n’ont pas tous reçu une réponse appropriée, tant les technologies évoluent rapidement.
À cet égard, je veux saluer la grande qualité du débat, au cours duquel notre collègue Bruno Retailleau a su pointer, au nom de la commission des affaires économiques, plusieurs points importants, plusieurs failles, sur lesquelles il nous faudra être vigilants à l’avenir.
J’évoquerai tout d’abord le déséquilibre constaté entre les devoirs et les droits des internautes.
Ainsi sommes-nous satisfaits qu’un certain nombre d’amendements aient pu être adoptés en la matière, ce qui nous a notamment permis de garantir la motivation des recommandations, d’interdire la double action et d’assurer le caractère graduel du dispositif.
Je rappellerai également que nous nous sommes ralliés à l’amendement défendu par Catherine Tasca, lequel prévoit que l’internaute ayant reçu une recommandation peut adresser ses observations à la commission de protection des droits. Il s’agit, certes, d’une solution a minima par rapport à l’amendement que nous avions déposé, par lequel nous souhaitions offrir à l’abonné la possibilité de contester la décision.
Malgré tout, l'ensemble de ces dispositions vont dans le bon sens et permettent de sécuriser la procédure, ce qui s’avère indispensable compte tenu des incertitudes juridiques pesant, notamment, sur ceux qui sont injustement tenus pour responsables.
Nous avons donc souhaité garantir au maximum les droits des internautes et leur offrir des moyens réels pour se défendre.
Assurer l’équilibre du texte en allant dans le sens des accords de l’Élysée est un autre sujet de préoccupation. Sans répéter tout ce qui a été dit lors de la discussion générale et ce que j’ai moi-même indiqué à l’occasion de la présentation de certains amendements, j’insisterai de nouveau sur l’importance qu’il y a à revenir à l’esprit ayant prévalu lors de la signature des accords de l’Élysée. Ces derniers ont en effet permis d’établir un juste équilibre entre la réponse graduée et le développement de l’offre légale : l’interopérabilité et la mise en place d’un standard de mesures techniques sont indispensables. On ne peut pas « vendre » ce projet de loi sans envoyer un message positif aux internautes et aux consommateurs de musiques et de films.
Soyons lucides, ce changement de comportement, que nous attendons tous, ne pourra pas se produire à court terme, dans la mesure où les pratiques sur internet évoluent très vite et que certaines habitudes ont d’ores et déjà été prises.
De ce point de vue, nous sommes particulièrement satisfaits du consensus qui s’est dégagé au sein de notre assemblée autour de la question de la chronologie des médias et de la suppression des DRM. À cet égard, le projet de loi, tel qu’il ressort des travaux du Sénat, a été amélioré et comporte de nombreux points positifs, attendus tant par les artistes que par les ayants droit. Il importe véritablement de le rappeler, car, si nous ne tentons rien aujourd’hui, c’est tout un pan de la création artistique qui est menacé.
Aujourd’hui, les acteurs culturels se rendent compte de l’évolution des mentalités. Ils ont bien conscience qu’internet n’est pas un phénomène temporaire et qu’il constitue un véritable défi. Pour ma part, je les incite à unir leurs efforts, pour soutenir le développement des modèles économiques mis en place et porter ainsi la création.
C’est un monde nouveau qui s’ouvre devant nous. Contrairement à M. Ralite, je ne suis pas particulièrement angoissée, pour autant que nous, parlementaires, sachions justement encadrer toutes ces évolutions par des dispositifs qui portent les valeurs que nous défendons.
Je l’ai dit tout à l’heure, avec ce projet de loi, nous prenons nos responsabilités, et le dispositif que nous mettons en place est tout à fait original par rapport à ce qui peut se faire dans d’autres pays voisins. Il illustre le volontarisme du Gouvernement et du Parlement en la matière. Je me félicite notamment de l’instauration de la Haute Autorité, qui se veut un lieu de médiation. Je salue le travail effectué, au nom de la commission des affaires culturelles, par notre collègue Michel Thiollière, travail qui a notamment permis de compléter très largement le champ d’intervention de cette instance : elle aura une mission non seulement de prévention, mais également d’observation de ce monde qui s’ouvre à nous et dont il faut bien sûr nous emparer.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, le groupe de l’Union centriste votera ce texte qui a été largement amélioré dans le sens d’un plus juste équilibre.