Intervention de Catherine Deroche

Réunion du 12 juin 2018 à 14h30
Équilibre territorial et vitalité de la démocratie locale — Discussion générale

Photo de Catherine DerocheCatherine Deroche :

La suppression du conseiller territorial, qui créait un lien singulier mais efficace entre région et département, a été une grossière erreur, fruit d’une inutile arrogance.

Quant à la multiplication de métropoles, je suis extrêmement dubitative car elles ne correspondent pas à la réalité d’une vraie métropole.

On pourrait citer bien d’autres exemples.

Comme mes collègues du Maine-et-Loire, je représente un département « hors normes » par l’ampleur de la recomposition territoriale depuis 2013, date de naissance de la première commune nouvelle, celle de Baugé-en-Anjou. En 2012, le département comptait 363 communes. Au 1er janvier 2018, il n’en dénombre plus que 184, soit une réduction de 47, 6 %. D’autres disparitions de communes sont envisagées. La carte des EPCI s’est elle aussi modifiée, passant de trente à neuf intercommunalités, dont une communauté urbaine et trois communautés d’agglomération.

Je sais que beaucoup s’effraient ou, du moins, s’interrogent sur une telle évolution. Mais il faut rappeler que celle-ci est le fruit d’une histoire de coopération ancienne entre les communes. La dernière et seule commune à être entrée en intercommunalité l’a fait il y a plus de vingt ans. Les élus ont des habitudes de travail en commun, qui se traduisent par des communautés de communes pour certaines très intégrées. L’exemple le plus abouti est celui des Mauges, où six communautés de communes, au sein d’un pays dynamique, sont devenues six communes nouvelles formant une communauté d’agglomération « rurale » sans ville-centre et comptant 120 000 habitants. Le témoignage des élus concernés est un exemple de réflexion véritable et d’anticipation d’un territoire.

Mais il est vrai que cela n’est pas un long fleuve tranquille, et loin de moi l’idée de reprocher aux communes qui avancent à leur rythme ou qui souhaitent demeurer communes historiques de ne pas accélérer. Ce que je veux affirmer, c’est qu’il faut aussi répondre à ceux qui sont allés loin dans la recomposition sur la base d’un projet territorial fort, et pas seulement attirés par l’appât financier de dotations préservées. Nos EPCI, en Maine-et-Loire, dépassent très largement le seuil démographique imposé par la loi. Certaines intercommunalités n’ont pas souhaité rester à ce seuil et ont fusionné, ce qui a aussi encouragé la création des communes nouvelles.

Certes, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui ne traite pas spécifiquement de ces communes nouvelles. En revanche, celles-ci seront l’objet de la proposition de loi qu’a déposée notre collègue Françoise Gatel, que, je l’espère, nous examinerons rapidement, pour apporter des solutions attendues notamment par les élus des communes déléguées.

Dans le texte de ce jour, je me réjouis que la commission des lois ait supprimé l’article 8, qui prolongeait la dérogation relative à la représentation des anciennes communes d’une commune nouvelle au sein d’un EPCI. Autant une période transitoire était nécessaire, autant une prolongation serait un mauvais signal et un facteur de déséquilibre.

Vous m’avez rassurée, monsieur le rapporteur, quant à l’article 10, qui nous inquiétait, mon collègue Stéphane Piednoir et moi, sur le risque d’instabilité qu’une scission au sein d’un EPCI nouvellement créé pouvait faire naître. Je sais que, dans nombre de départements, sous la pression des représentants de l’État, des mariages forcés et imposés aux élus créent des difficultés majeures. Vous avez confirmé que des garanties entouraient l’article 10. Nous vous faisons confiance sur ce point.

Il en est de même sur l’article 11, afin que les modifications de carte intercommunale ne transforment pas les commissions départementales de la coopération intercommunale, les CDCI, en « foires d’empoigne », si vous me permettez cette expression familière.

Concernant les articles relatifs au département et à la région, je tiens à faire deux remarques.

Le problème actuel des départements est essentiellement lié à l’étranglement financier qui résulte des dépenses sociales décidées par l’État, mais financées par ce niveau de collectivités. Quant aux régions, le texte de Mme Pénicaud sur la formation professionnelle sera l’occasion de réaffirmer leur place indispensable dans cette compétence.

J’en termine par le sujet, s’agissant de nos communes, qui leur tient à cœur au sein des intercommunalités : celui du partage des compétences entre communes et EPCI. Ce que veulent les élus, c’est de la souplesse. Qu’on leur fasse confiance pour répartir les compétences : la stratégie aux EPCI, dont la taille est aujourd’hui supérieure à ce qu’elle était auparavant, et la proximité aux communes – c’est d’autant plus vrai lorsque, au sein de l’EPCI, d’anciennes communautés de communes sont devenues communes nouvelles.

Tel est le sens des deux amendements que Stéphane Piednoir et moi-même avons déposés et que nous défendrons ce soir. Le premier limite le nombre des compétences obligatoires à cinq, quand le second permet, dans la compétence urbanisme, de laisser un plan local d’urbanisme – ou PLU – à la commune lorsque celui-ci a été élaboré en tant que PLU intercommunal sur le périmètre d’une ancienne intercommunalité.

Pour conclure, madame la ministre, confiance et souplesse doivent être nos maîtres-mots. Le Président Macron s’y est engagé formellement, en décembre dernier, lorsqu’il a reçu les membres du bureau du Sénat, quand j’ai évoqué devant lui et nos collègues ce sujet des compétences.

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