Je rappelle que les agents chargés de la sécurité de la RATP et de la SNCF sont aussi équipés de ce dispositif, et ce depuis 2015. Il est donc temps d’en proposer un élargissement.
En cet instant, je souhaite évoquer la situation des personnels pénitentiaires, déjà en sous-effectif – je les rencontre régulièrement dans le cadre de la mission budgétaire « Justice » –, et visés par l’article 2.
Je veux ensuite rappeler un chiffre : on recense en effet chaque année – et selon un chiffre communiqué par la direction de l’administration pénitentiaire un peu plus de 4 000 agressions déclarées de surveillants, soit plus de dix par jour –, avec une interruption temporaire de travail, pour plus de 300 d’entre elles. Parmi ces agressions, on recense 51 prises d’otages de personnels depuis 2011.
Il s’agit, dans ces conditions, d’équiper ces personnels de caméras mobiles, en particulier lors des opérations d’escorte de prisonniers.
Je me permets, à ce moment de mon propos, d’évoquer quelques faits récents, et en prise directe avec notre article 2. En effet, le 16 mai dernier, un détenu de la maison d’arrêt de Brest, « fiché S » en raison d’une « tendance à la radicalisation », s’est évadé lors d’un transfert médical. L’homme de 21 ans a réussi à s’échapper, avec l’aide d’un complice extérieur, au moment de son arrivée au CHU de Brest, l’escorte n’étant pas – ou peu – armée. Il semblerait que les escortes pour extraction médicale sont – et cela semble être su des prisonniers, en tout cas de celui-ci – sous un niveau moindre de sécurité. Il semblerait même qu’il ait été averti de son extraction la journée précédente, alors que la doctrine veut que le détenu ne le soit que le jour même, justement pour éviter ces tentatives d’évasion.
Je citerai un autre exemple, auquel ont été récemment confrontés – et par trois fois – les personnels du pôle de rattachement des extractions judiciaires de Lille : ils ont été pris à partie par des véhicules sur l’autoroute, dans l’agglomération de Lille. Un outil de ce type aurait pu permettre une identification des auteurs. Ces personnels ne sont pas à l’abri d’une tentative d’évasion par aide extérieure. Pouvoir filmer lors d’une situation de danger immédiat constitue donc une source de preuves, vous l’avez rappelé, madame la ministre.
De même, lorsqu’ils présentent des détenus devant les différents tribunaux, lesquels n’ont pas tous un niveau de sécurité adapté à leurs missions – je veux parler de l’accès des escortes, des geôles, des couloirs de circulation à l’intérieur empêchant toute personne étrangère de venir au contact –, il leur arrive souvent d’être pris à partie par les familles ou amis des détenus. Or, si ces derniers se savent filmés, on peut penser que leurs attitudes et paroles n’auront pas la même intensité. C’est un autre exemple de l’aspect dissuasif qu’un tel système peut comporter.
À titre indicatif, le pôle de rattachement des extractions judiciaires de Laon, doté de neuf personnes, assure en moyenne environ 640 missions annuelles, pour un total de plus de 100 000 kilomètres parcourus.
La Chancellerie avait reconnu, dans un communiqué publié en réponse aux inquiétudes des personnels, que cet événement montrait « la nécessité de poursuivre et d’achever rapidement les travaux engagés pour harmoniser les règles, les procédures et les moyens mis en œuvre pour l’ensemble des missions extérieures assurées par l’administration pénitentiaire, que ce soit des extractions judiciaires ou médicales ou des permissions de sortie sous escorte ».
Qu’en est-il, madame la ministre, de ce nouveau dispositif qui devait être présenté aux organisations représentatives ? Vous pourrez peut-être nous donner des précisions utiles à ce sujet.
Cette proposition de loi répond à une demande légitime : ces missions d’une sensibilité particulière doivent pouvoir être menées en toute sécurité.
Je salue à ce propos l’amendement adopté par la commission sur l’initiative de notre rapporteur, visant à élargir le champ d’utilisation des caméras mobiles à d’autres missions que celles qui sont extérieures à la prison, à savoir à celles qui, au sein de l’établissement, exposent le personnel à un contact avec des individus signalés comme dangereux.
En ce qui concerne l’expérimentation de trois ans de l’utilisation des caméras par le personnel de l’administration pénitentiaire, si j’y adhère, je ne voudrais pas toutefois que, à la fin de ces trois années, il lui soit réservé le même sort qu’à celle concernant les policiers municipaux. Il est sage d’avoir spécifié que le rapport devra être remis dans un délai de six mois avant la fin des trois années d’expérimentation et de s’assurer ainsi d’une éventuelle continuité.
La discussion de cette proposition de loi et, notamment, de son article 2 est donc dans le vif de l’actualité et son adoption permettrait de finaliser l’équipement de notre personnel pénitentiaire.
Plus largement, je salue l’article additionnel inséré dans le texte sur l’initiative de notre excellent rapporteur et avec le soutien de tous. Cet article a pour objet ce que j’évoquais au début de mon intervention : il assure la continuité du port de caméras par la police municipale, dans une sorte de parallélisme des formes, et dans la suite logique du rapport d’évaluation publié hier soir.
Enfin, je souhaite à nouveau signaler brièvement la prolifération des téléphones portables saisis en prison : en six mois, nous en sommes à plus de 20 000 ! Je sais que Mme la garde des sceaux est bien consciente de ce problème, mais il est urgent d’agir.
En conclusion, je voterai bien évidemment cette proposition de loi, que j’avais cosignée.