Intervention de Loïc Hervé

Réunion du 13 juin 2018 à 14h30
Utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Loïc HervéLoïc Hervé :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en 2016, le Parlement autorisait les agents de sécurité de la SNCF et de la RATP, mais également les agents de la police nationale et les militaires de la gendarmerie nationale, à faire usage de caméras mobiles. Ce nouvel outil, généralement plutôt bien accueilli, alimentait toutefois certaines craintes, plusieurs de nos collègues nourrissant des doutes quant à son efficacité.

Deux ans plus tard, le déploiement de ces caméras individuelles a fait ses preuves : elles constituent un vecteur efficace d’apaisement des tensions et de prévention des incidents, contribuant ainsi à sécuriser les interventions des forces de l’ordre.

Présentée par notre collègue Jean-Pierre Decool, dont je salue l’initiative, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise à étendre l’utilisation de ces caméras mobiles à deux nouvelles catégories d’agents publics.

Les sapeurs-pompiers, d’abord, contre lesquels les agressions ont augmenté de 20 % en 2016 d’après l’Observatoire national de la délinquance. J’en témoigne comme élu de la Haute-Savoie, mais je sais que certains de nos collègues, dont Sylvie Goy-Chavent, élue de l’Ain, partagent aussi les préoccupations qu’expriment à la fois les pompiers sur le terrain et leur encadrement.

Les surveillants de l’administration pénitentiaire, ensuite, qui sont confrontés à une population carcérale plus nombreuse et plus violente, et à des agressions malheureusement régulières. Ces phénomènes de violence sont inacceptables, et il était absolument nécessaire de répondre à la demande de sécurisation formulée par nos agents publics.

L’objectif recherché au travers de cette proposition de loi nous paraît d’autant plus légitime que les avantages liés à l’utilisation des caméras individuelles nous concernent tous : elles bénéficient évidemment aux agents dépositaires de l’autorité publique, mais aussi aux citoyens, qui pourraient sinon être victimes d’abus de droit et d’actes inappropriés. Elles profitent aussi aux magistrats, pour lesquels les enregistrements constituent des éléments de preuve objectifs, susceptibles de les aider dans leur travail.

Cependant, une extension de l’usage des caméras mobiles aux pompiers et au personnel pénitentiaire n’était pas sans risque, en raison des atteintes potentielles au droit au respect de la vie privée. Il fallait donc concilier la protection de ce droit constitutionnellement reconnu avec la prévention des atteintes à l’ordre public.

Sur ce point, plusieurs garanties ont été apportées par les auteurs de cette proposition de loi, qui ont tenu compte des préconisations de la CNIL. Siégeant au sein de cette commission, depuis plus de trois ans, en tant que représentant du Sénat, je m’en réjouis. Le périmètre du recours aux caméras a ainsi été strictement défini : toute personne filmée devra en être préalablement informée, et les caméras ne pourront pas être allumées en permanence.

De même, les conditions d’accès aux enregistrements et de leur conservation ont été encadrées pour préserver le droit au respect de la vie privée : seul un nombre limité de personnes pourra visionner les enregistrements, et ce dans une durée limitée à six mois.

La proportionnalité des dispositifs proposés est donc garantie, d’autant que plusieurs amendements adoptés en commission ont contribué à rééquilibrer la balance.

Sur proposition de notre rapporteur, Dany Wattebled, que je félicite pour la qualité de son rapport, l’usage des caméras individuelles par les sapeurs-pompiers a ainsi été davantage encadré : afin de protéger le secret médical, le recours aux caméras individuelles a été exclu pour toutes les interventions à caractère médical.

Il a également été décidé que les décrets d’application de l’expérimentation seraient pris après avis motivé et publié de la CNIL, ce qui devrait nous prémunir des risques d’atteinte à la vie privée. Je m’en réjouis de nouveau.

Enfin, l’examen de ce texte en commission a été l’occasion de pérenniser l’utilisation des caméras mobiles par les agents de police municipale, dont l’expérimentation s’est achevée le 3 juin dernier. En l’absence de cadre légal, des centaines de policiers municipaux se sont trouvés à cette date dans l’obligation d’abandonner ce dispositif, et de très nombreux maires ont fait part de leur volonté de poursuivre une expérimentation jugée très positive.

Face à l’urgence de la situation, et pour remédier au retard pris par le Gouvernement, plusieurs amendements, dont celui de notre collègue Yves Détraigne, ont alors été déposés de manière à pérenniser l’utilisation des caméras mobiles par les policiers municipaux. L’adoption d’un de ces amendements et l’insertion d’un tel dispositif dans l’article 2 bis de la proposition de loi sont une très bonne nouvelle pour nos communes.

Mes chers collègues, le groupe de l’Union Centriste votera en faveur de cette proposition de loi, les caméras mobiles ayant fait leurs preuves dans la pacification des rapports sociaux.

Rappelons-nous toutefois que ces dispositifs de vidéosurveillance ou de vidéoprotection ne pourront pas constituer l’unique réponse aux actes d’incivilité et aux nouvelles menaces, et que le recours aux caméras ne remplacera jamais les mesures de prévention !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion