Intervention de Jean-Claude Requier

Réunion du 13 juin 2018 à 21h45
Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

… s’inscrivait dans cette tradition. Et, dans cette mémoire, l’image même des centres-bourgs s’inscrit totalement. Pourtant, nous sommes en train de vivre ce que le sociologue Jean-Pierre Le Goff appelle la « fin du village », c’est-à-dire la disparition d’une société autrefois organisée autour d’une communauté de production – avec ses marchands, ses artisans –, mais également d’un espace socialement signifiant.

« Les sentiments et les idées ne se renouvellent, le cœur ne s’agrandit et l’esprit humain ne se développe que par l’action réciproque des hommes les uns sur les autres », alertait déjà Tocqueville en son temps. Oui, dans ces villes trop hâtivement qualifiées de moyennes, on ne se croise qu’à peine, on ne se parle plus guère ! Ne soyons donc pas surpris du sentiment de délaissement que peuvent éprouver leurs habitants, ni de la montée des extrêmes.

Soyons honnêtes : ce processus de transformation s’est déroulé sur des décennies, lentement, par l’action comme par l’inaction. La responsabilité en est d’ailleurs partagée par les élus et les gouvernements successifs. C’est ainsi que l’espace de nos centres-villes a été remodelé par la fuite des équipements attractifs, la disparition du petit commerce au profit des grandes surfaces, le recul des services publics, mais aussi la multiplication des lotissements.

Bien sûr, et malgré le carcan des normes qui les contraignent, il faut saluer l’engagement constant des élus locaux pour faire vivre leur territoire, en particulier les lieux d’échange et de lien social : construction de musées, organisation de festivals, sauvegarde et valorisation du patrimoine.

Mes chers collègues, disons-le clairement, cette proposition de loi ne va pas révolutionner la vie des centres-bourgs. En revanche, mes collègues du RDSE et moi-même estimons qu’elle a le mérite de mettre en lumière la question de la dévitalisation des centres-bourgs et d’avancer des solutions, quand bien même l’économie peut en être discutée. Plus largement, c’est tout un cycle de débats qui débute, avec, en perspective, le plan « Action cœur de ville » et le projet de loi ÉLAN.

Néanmoins la philosophie de cette proposition de loi doit être saluée, à commencer par la volonté de réduire le poids des normes pesant sur les élus. Il est ainsi évident que l’expérimentation doit être renforcée, dans un contexte où les maires des communes petites et moyennes rencontrent plus de difficultés que les maires des grandes villes, par manque de moyens, d’ingénierie. Sans omettre le fait que l’offre intercommunale ne leur donne pas toujours la réponse attendue.

Dans le même esprit, les élus locaux des petites communes, qui ne disposent pas de service d’urbanisme pour monter les dossiers, sont parfois très désemparés devant les avis des ABF. Nous attendons une uniformisation des pratiques et plus de compréhension. À ce titre, l’introduction d’orientations applicables par les ABF va dans le bon sens.

La proposition de loi s’appuie également sur un large volet fiscal, destiné au financement des mesures qu’elle propose.

Sur la forme, il est évident que de telles mesures auraient bien plus leur place en loi de finances, par souci de cohérence.

Sur le fond, on peut s’interroger sur la pertinence d’un certain nombre de dispositifs. Je pense ainsi à la taxe sur les livraisons électroniques, calculée en kilomètres parcourus entre le dernier lieu de stockage et le point de livraison. À l’évidence, une telle mesure risque de pénaliser le monde rural, alors qu’un forfait serait plus à propos.

Dans le même registre, si la lutte contre l’artificialisation des terres est un objectif important, la taxe sur les entrepôts et les drive pourrait aboutir à créer un système favorisant les livraisons depuis l’étranger, pénalisant la compétitivité française.

Enfin, comme membre de la commission des finances, je m’interroge sur la compatibilité avec le droit communautaire de l’instauration de taux réduits de TVA pour les programmes mixtes des zones « OSER », au risque, aussi, d’instituer des mesures plus favorables que pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

Parallèlement, on peut toujours renommer le FISAC… L’alimenter serait encore mieux ! Surtout, il convient de ne pas en exclure les réseaux de stations-service indépendants en zone rurale, lorsque l’on sait à quel point le carburant est un produit de première nécessité en zone non urbaine, …

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