Intervention de Claude Malhuret

Réunion du 13 juin 2018 à 21h45
Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Claude MalhuretClaude Malhuret :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la dévitalisation des centres-villes n’épargne aucune région de France.

La proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs se fait l’écho d’un constat sans appel et d’une réalité quotidienne vécue par les élus et par les habitants. Le groupe Les Indépendants salue cette démarche, portée par Rémy Pointereau et Martial Bourquin, ainsi que par l’ensemble des sénateurs qui y ont contribué.

« Ne laissons pas s’éteindre les dernières lumières de la ville. » Ce cri d’alarme, lancé dans une tribune du journal Les Échos par les présidents de trois fédérations de commerces de proximité est éloquent, et nous y sommes sensibles.

Si nous n’agissons pas aujourd’hui, les enseignes clignotantes des grandes surfaces à la périphérie des villes remplaceront, demain, nos clochers, nos pharmacies, nos librairies et les derniers commerces de bouche qui animent encore les centres. Des trompe-l’œil peints sur la tôle grise des boutiques à vendre feront figure de cache-misère, tandis que les services publics s’éloigneront toujours plus des habitants, faisant de nos villes et de nos villages des cités fantômes sans devenir.

Ce constat sans appel est plus qu’une réalité quotidienne : c’est la suite logique d’un ensemble de choix de société qui a mené à ce qu’on appelle « la dévitalisation urbaine », conséquence directe de l’étalement urbain. La France est l’un des pays d’Europe qui comptent le plus grand nombre de centres commerciaux. Les mastodontes de la grande distribution et leur concurrence implacable ont grignoté jour après jour les marges des artisans et commerçants, menacés d’asphyxie. Le foisonnement de normes malheureuses, c’est-à-dire subsidiaires, décourage les nouvelles initiatives et affaiblit les normes nécessaires.

Depuis des années, les villes se vident, depuis leur centre, d’une lente hémorragie. Le taux de la population française qui vit dans des territoires en déshérence s’élève entre 20 % et 25 %. Le taux de vacance commerciale gagne 1 point par an dans plus de la moitié des centres des villes moyennes, tandis que les zones commerciales s’étendent en périphérie, au détriment des surfaces agricoles et des espaces naturels. À ce titre, le groupe dont je me fais le porte-parole a déposé un amendement visant à inscrire dans la loi l’objectif de zéro artificialisation nette du territoire d’ici à 2025.

Le programme « Action cœur de ville » mis en œuvre par le Gouvernement a fait 222 heureux gagnants, qui vont pouvoir bénéficier d’une aide particulière de l’État, comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre. Il faut saluer cette initiative gouvernementale. Mais, comme tout programme ciblé, et même si vous avez précisé que d’autres pouvaient en profiter, ce plan ne peut traiter les problèmes d’un bon nombre de communes en difficulté. La proposition de pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs a le mérite de compléter cette initiative gouvernementale, d’être applicable sur l’ensemble du territoire et de ne laisser aucune commune sans levier d’action.

Comme vous l’avez indiqué, ces deux initiatives ne sont pas contradictoires ou concurrentes : elles sont complémentaires.

Incitation, régulation et responsabilité partagée des acteurs sont les maîtres mots de ce pacte. Les périmètres des opérations de sauvegarde économique et de redynamisation qu’il propose d’instaurer fondent leur autorité sur les élus locaux, dans une logique de décentralisation et de développement des territoires. L’emprise de ces périmètres, dans lesquels s’appliqueraient l’ensemble des mesures structurelles du pacte, serait néanmoins limitée à 4 % de la surface urbanisée de la commune.

La création d’une agence nationale pour les centres-villes et centres-bourgs permettrait de fournir aux collectivités les plus fragiles l’ingénierie et les compétences techniques nécessaires à la conduite des opérations de revitalisation.

Le pacte se décline ensuite en un ensemble de mesures incitatives de soutien à l’offre de logement et au coût de l’installation commerciale.

Une série de mesures vise, en outre, à accélérer la numérisation du commerce de détail et à accorder aux maires la possibilité de s’opposer à la fermeture d’un service public.

Par ailleurs, nous saluons la volonté des auteurs et contributeurs du pacte de rénover le système de régulation des implantations commerciales afin de réorienter les flux économiques et financiers vers les centres. Ce dispositif offre également la possibilité, pour le maire d’une commune sous convention « OSER », de déroger à titre expérimental à un certain nombre de normes dont l’application serait disproportionnée.

Enfin, il est important que la rédaction définitive de l’article 7 du texte aboutisse à une rénovation salutaire du dialogue entre élus et architectes des Bâtiments de France. Notre groupe sera attentif à ce point. Il s’agit avant tout de démontrer que, avec un minimum d’intelligence et de concertation, attractivité économique et richesse patrimoniale ne sont pas incompatibles et peuvent même aller de pair. Il s’agit aussi de faire en sorte que des projets locaux essentiels à la survie des quelque 18 000 communes couvertes par un périmètre de protection d’un monument historique ou possédant un site patrimonial remarquable puissent être réalisés dans les meilleures conditions.

La vitalité des centres-villes est au cœur de nos préoccupations. Pour toutes ces raisons, le groupe Les Indépendants accueille favorablement cette proposition de loi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion