Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, comme maire jusqu’au mois d’octobre dernier d’un bourg-centre chef-lieu de canton, j’ai bien sûr suivi avec attention et bienveillance les travaux du groupe de travail du Sénat sur la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs. Cette attention est, nous le voyons, transpartisane et unanime. Nous sommes en effet tous conscients de la transformation de nos territoires à cause de l’implantation en périphérie d’espaces commerciaux et parallèlement de l’assèchement des centres-villes.
En nous intéressant à ce problème, nous sommes à dire vrai les continuateurs de préoccupations aussi anciennes que ces transformations. Pensons à la loi Royer, en 1973, sur le commerce et l’artisanat ; déjà, à l’époque, les mêmes constats qu’aujourd’hui. Et pourtant, nous avons continué à défigurer nos entrées de villes, à « tartiner » nos périphéries de lotissements aux dépens de la densification de l’habitat, et bien sûr vidé les centres-bourgs ! C’est donc à un problème ancien et complexe auquel répond cette proposition de loi, notamment via le levier fiscal.
Membre de la commission des finances, j’aimerais m’arrêter sur ce point. Notre commission a fait le constat, partagé, me semble-t-il, par tous les groupes politiques, de mesures sans études d’impact, difficiles à évaluer budgétairement, probablement en contradiction avec le droit européen, parfois inapplicables. Je pense ici à la taxe sur les livraisons liées au commerce électronique, qui ne sera pas applicable et qui de surcroît créera une discrimination en fonction du lieu d’habitation du consommateur, tout en réduisant de fait le pouvoir d’achat des Français, parce que cette mesure sera répercutée. Je pense aussi aux différentes niches fiscales que la proposition de loi met en œuvre, qui vont à l’encontre de l’objectif de simplification et de lisibilité auquel je m’attache. On sait qui profite des niches quand elles existent : pourquoi renforcer le régime des sociétés d’investissements immobiliers cotées, alors qu’il a favorisé la création de sociétés foncières qui participent à l’implantation de projets commerciaux en périphérie ? Il existe par ailleurs déjà de nombreux dispositifs, comme le dispositif « Malraux ».
Mes chers collègues, j’ai cosigné cette proposition de loi, parce que je crois que le Sénat doit envoyer un message fort aux élus locaux et aux citoyens. Cependant, je l’ai cosignée comme un appel, et les faiblesses du texte justifient que nous prenions le temps d’expertiser les mesures adéquates. C’est d’ailleurs ce que j’ai entendu ce matin en commission des finances, y compris de la part d’autres cosignataires de cette proposition de loi. Le temps, nous l’avons encore. Ce sera l’objet du projet de loi ÉLAN, notamment de son article 54 portant revitalisation des centres-villes.
Par ailleurs, le programme « Action cœur de ville » que vous portez, monsieur le ministre, vise à traiter globalement le sujet, qu’il s’agisse de la réhabilitation, mais aussi de la mobilité et des connexions, des équipements et des services publics, de l’espace public.
Monsieur le ministre, vous avez la confiance du groupe La République En Marche sur le sujet que mettent en avant la proposition de loi et le Sénat aujourd’hui.