Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il est des moments qui comptent plus que d’autres dans une vie de parlementaire, et l’élu que je suis, qui n’en est pas encore à une année pleine de mandat, mesure toute l’importance de cet instant.
En effet, tout n’a pas été un long fleuve tranquille depuis le 26 février dernier, date à laquelle, madame la ministre, vous avez donné avec le Premier ministre le coup d’envoi de la réforme ferroviaire. Pour la première fois depuis bien des années, un gouvernement, celui que j’ai l’honneur de soutenir, décidait de mettre fin aux atermoiements, aux renoncements, et de s’attaquer frontalement à la réforme d’un système ferroviaire en bout de course.
Oui, ce que vos prédécesseurs n’ont pas voulu faire, madame la ministre, vous avez eu l’audace et le courage de l’entreprendre, pour garantir un avenir au service public ferroviaire français face à l’ouverture à la concurrence.
De l’audace, il fallait en avoir pour s’attaquer à un sommet aussi ardu que celui de la réforme du système ferroviaire. Du courage, il en fallait aussi pour bousculer ces habitudes et ces corporatismes qui caractérisent trop souvent notre système français.
Je parle d’audace, je parle de courage ; j’y ajouterai la volonté farouche et permanente de trouver la solution législative la plus efficiente et la plus pertinente pour notre modèle français.
Cette solution a été trouvée dans le cadre de ce travail de coconstruction entre le Gouvernement et nos deux assemblées, notamment le Sénat, qui a joué un rôle essentiel. C’est l’occasion pour moi de saluer une nouvelle fois le travail d’orfèvre réalisé par notre rapporteur Gérard Cornu sous la houlette bienveillante du président Hervé Maurey.
La commission mixte paritaire a permis de mesurer tout l’apport du travail sénatorial en s’accordant sur un texte parfaitement équilibré, qui fait la part belle à l’efficacité, à la modernité et à la justice sociale.
À la justice sociale, oui, car la Haute Assemblée a fait la démonstration que « penser social » n’est pas que le drapeau de quelques-uns, qui en font l’alpha et l’oméga d’un logiciel politique qu’ils peinent d’ailleurs à réinventer.
Nous avons montré notre attachement au monde cheminot au travers de dispositions fortes mettant en place des garanties sociales de haut niveau pour les cheminots qui seraient concernés par un transfert vers un nouvel opérateur. Nous avons noué avec les organisations syndicales réformistes un dialogue fécond qui a permis d’améliorer considérablement le texte, dans un travail de coconstruction de tous les instants.
La transformation de la SNCF en un groupe unifié dont les capitaux seront intégralement détenus par l’État et incessibles garantit un service public ferroviaire moderne et plus performant, et permet de mettre un terme à toutes les polémiques. L’unité sociale de ce groupe unifié est affirmée, ce qui répond aux attentes des organisations syndicales, et chacun se félicitera que ce soit au Sénat que cela a été précisé.
Non, l’ouverture à la concurrence n’est pas une fatalité pour notre service public ferroviaire ; c’est au contraire une chance pour lui de se réinventer, pour répondre à une demande forte de nos territoires et des usagers. Les dispositions du texte permettent une ouverture à la concurrence protectrice pour la desserte des territoires et garantissent la défense des intérêts des usagers, avec notamment l’institution de comités de suivi des dessertes auprès des autorités organisatrices de transport.
L’efficacité, c’est aussi le renforcement de la règle d’or, à la suite de l’annonce de la reprise progressive de la dette. Accompagnée d’un engagement fort de l’État dans le domaine de l’investissement, elle doit contribuer à sécuriser la trajectoire financière de la SNCF, et chacun ici ne pourra que s’en féliciter. N’en déplaise à certains, le Gouvernement a pris toutes ses responsabilités en matière financière pour permettre à cette octogénaire respectable et respectée qu’est la SNCF d’appréhender l’avenir.
Tous les ingrédients sont désormais réunis pour permettre une ouverture à la concurrence qui sera profitable à tous et pour permettre à notre société nationale d’écrire une nouvelle page de son histoire, de notre histoire.
Cette réforme, mes chers collègues, est d’abord et avant tout celle des mobilités ferroviaires du quotidien. Elle constitue une formidable clef d’entrée dans le projet de loi d’orientation sur les mobilités que nous attendons tous, sur ces travées, avec envie et gourmandise.
C’est d’ailleurs l’occasion de tordre le cou à ce vilain canard selon lequel le timing de la réforme ferroviaire serait mauvais. Nos échanges, nos débats ont démontré l’inverse et ont permis de pointer nombre de sujets que nous aurons à reprendre lors de l’examen du projet de loi d’orientation sur les mobilités pour transformer l’essai.
Il en est ainsi du devenir des gares dans le domaine des intermodalités et d’un futur qui se doit d’être radieux. La gestion plus efficace des gares, avec la mise en place d’une filiale de SNCF Réseau, doit permettre de conforter le rôle de ces places fortes de notre système ferroviaire et d’en faire des lieux de vie incontournables dans notre paysage quotidien.
La gare est un élément essentiel de l’aménagement du territoire et la coconstruction de son avenir avec celles et ceux qui vivent autour d’elle est une condition primordiale de la réussite des mobilités de demain. « Peut-être le bonheur n’est-il que dans les gares ? », disait Georges Perec.