Nous sommes défavorables à cet amendement de suppression, car la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, qui prévoit le maintien des mesures « anti-abus » tendant à neutraliser les effets de la théorie du bilan, ainsi que la remise, par le Gouvernement, d’un rapport détaillé avant le 30 avril 2011 sur l’impact budgétaire et organisationnel de la réforme, nous semble relativement équilibrée.
Mes chers collègues, je me suis posé exactement les mêmes questions que mon collègue Gilles Carrez sur cette réforme de la fiscalité des sociétés de personnes. Il est vrai que cette réforme est en gestation depuis un certain temps déjà, et que l’on aurait pu, et même dû, informer le Parlement plus en amont, ce qui nous aurait probablement permis d’adopter dès à présent l’ensemble du dispositif.
Monsieur le ministre, les services de l’administration centrale doivent comprendre que le Parlement ne se réduit pas à un ensemble de deux chambres d’enregistrement. Les députés et les sénateurs ont besoin de se faire leur propre opinion sur une mesure, même lorsqu’ils partagent les convictions politiques de leurs auteurs et qu’ils adhèrent, par principe, à leurs intentions.
C’est peut-être un défaut, mais nous aimons bien gratter le vernis de surface pour découvrir ce qui se cache réellement derrière une disposition. Le métier de parlementaire est ainsi fait ; il faut le respecter ! Son exercice requiert donc un minimum de temps, surtout quand il s’agit d’examiner un dispositif aussi important et complexe sur le plan juridique et fiscal que celui-ci, et a fortiori lorsqu’il s’insère dans un collectif budgétaire dont on connaît les conditions d’examen fort contraintes.
Comme je l’ai rappelé en préambule, le rapporteur général de l'Assemblée nationale a, me semble-t-il, fait prévaloir une position équilibrée. La théorie du bilan, dont je détaille les mécanismes dans mon rapport, présente incontestablement des effets pervers et, en y mettant fin dès à présent, on évite certaines formes d’optimisation fiscale.
Pour le reste, le texte du Gouvernement comportait des dispositions très intéressantes et utiles, notamment sur l’application du régime mère-fille et sur l’intégration fiscale, en particulier sur l’usage de cet outil juridique qu’est la fiducie. On peut toutefois considérer que ces questions s’apparentent, par extension, à la fiscalité de l’épargne et du patrimoine, qui constituera le cœur du projet de loi de finances rectificative attendu pour la mi-2011.
Dans ces conditions, il me semble que nous pouvons voter aujourd’hui l’article 12, dans la forme issue du vote de l’Assemblée nationale, et attendre pour le reste le rapport que le Gouvernement nous remettra au mois d’avril, avant de formaliser ces dispositions dans le collectif du mois de juin.
Je vous invite dès lors, mes chers collègues, à repousser résolument l’amendement n° 59.