Intervention de Jean-Yves Leconte

Réunion du 19 juin 2018 à 14h30
Immigration droit d'asile et intégration — Discussion générale

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

Chers collègues, les migrations – je le relève à mon tour – sont aussi vieilles que l’humanité. La Banque mondiale considère que, en 2050, la mobilité climatique touchera, à elle seule, plus de 140 millions de personnes.

En 2016, plus de 66 millions de personnes ont quitté leur pays. Où sont-elles allées ? Pour 30 %, elles ont gagné l’Afrique subsaharienne ; pour 26 %, l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient ; pour 11 %, l’Asie ; pour 17 %, l’Europe, et pour 16 %, l’Amérique.

Finalement, nous ne gérons que 17 % de cette mobilité ; et, parmi les 1, 2 million de primo-arrivants qu’a dénombrés l’Europe en 2016, 77 000 ont gagné la France. Sur les 650 000 primo-arrivants de 2017, 91 000 sont venus en France. Voilà ! Nous disons avoir beaucoup de difficultés ; mais finalement, relativisons-les, par rapport à celles qu’éprouvent nos voisins.

Madame la ministre, le texte que vous défendez marquera une vraie rupture pour ce qui concerne les droits des demandeurs d’asile.

La procédure normale devant l’OFPRA sera réduite de 120 à 90 jours.

Vous auriez souhaité limiter à 15 jours le délai de recours devant la CNDA, mais M. le rapporteur est revenu sur cette disposition.

En cas de procédure accélérée, le recours devant la CNDA ne sera plus suspensif : la personne sera donc susceptible de ne plus être là lorsqu’elle sera convoquée à la CNDA !

Et que dire des vidéo-audiences ? Elles sont sans garanties ! Il n’y a pas davantage de garanties pour les langues. Au titre de l’orientation directive, on pourra envoyer quelqu’un dans une région sans lui assurer un hébergement. Ce sont autant de violations du droit d’asile qui s’ajoutent les unes aux autres et qui sont dans ce projet de loi.

Vous pourrez nous dire qu’il s’agit de rationaliser les dispositifs en vigueur. Mais ce n’est pas sérieux ! Nous parlons de personnes qui viennent de subir des traumatismes. Que ce soit à leur point de départ ou au cours de leur voyage, elles ont énormément souffert : nous avons vu les témoignages des passagers de l’Aquarius. De plus, ces personnes ne connaissent pas les règles en vigueur chez nous. On ne peut pas réformer les dispositifs de cette manière.

L’allongement du délai maximal de rétention de 45 à 90 jours participe de cette politique d’affichage.

Cela étant, je tiens à saluer M. le rapporteur, qui a revu quelques dispositions de ce projet de loi.

Ainsi, le délai de recours devant la CNDA restera de 30 jours ; pour les enfants, le séjour en centre de rétention a été limité à 5 jours – bien sûr, nous combattrons cette mesure, mais nous préférons encore ce délai à celui de 90 jours.

De plus, monsieur le rapporteur, vous avez rétabli l’hébergement directif, et nous vous en remercions.

Toutefois, avec cette réforme, on observe également les réflexes habituels de la majorité sénatoriale. Je pense notamment à la politique de quotas ;…

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