L’article 6 est, comme les articles 5 ou 9, révélateur de la logique qui sous-tend ce texte : réserver aux demandes d’asile un traitement expéditif, au détriment des droits des demandeurs d’asile et des garanties procédurales qui leur sont dues.
Ainsi, il est ici porté atteinte, en particulier, au droit de recours effectif consacré par plusieurs normes supralégislatives, notamment rappelées par la directive Procédures concernant l’asile, disposant que « la procédure d’examen de sa demande de protection internationale devrait, en principe, donner au demandeur au moins le droit à un recours effectif devant une juridiction ».
L’article 46 de cette directive ne fixe pas de délai, mais précise que « les États membres doivent prévoir des délais raisonnables pour que le demandeur puisse exercer son droit à un recours effectif » et que ces délais ne doivent pas rendre le recours « impossible ou excessivement difficile ».
Or, en l’occurrence, alors que la commission des lois du Sénat est revenue au droit existant, déjà insuffisant, qui fixe le délai de recours à un mois, vous défendez, monsieur le ministre d’État, un amendement visant à ramener ce délai à quinze jours. Nous proposons pour notre part de le porter à deux mois, c’est-à-dire de l’aligner sur le droit commun.
Vous ne cédez devant rien, monsieur le ministre : le Défenseur des droits, la Commission nationale consultative des droits de l’homme, l’ensemble des associations, les agents de l’OFPRA et les rapporteurs de la CNDA sont pourtant vent debout contre la réduction du délai à quinze jours ! Vous ne pliez pas, même devant la droite sénatoriale, qui s’érige aujourd’hui, en tout cas à propos de cet article, en défenseur des demandeurs d’asile et de leur droit au recours effectif !
La question vous a déjà été posée : comment peut-on considérer qu’un demandeur d’asile se trouvant dans une situation de grande vulnérabilité, qui connaît peu la langue française et notre système administratif, dont l’état psychologique et la santé sont parfois très affectés, puisse exercer son droit de recours dans un délai de quinze jours ?
Nous proposons, au rebours d’une réduction du délai de recours contraire à notre conception du droit d’asile, de faciliter les démarches des demandeurs d’asile en leur donnant deux mois pour former un recours. Un mois, c’est déjà trop court, sachant que les demandeurs d’asile sont des justiciables très vulnérables, à la situation précaire. Le délai devrait au moins être le même que pour n’importe quel autre justiciable en France !
Cet amendement répond l’objectif fixé par le rapporteur de la commission des lois. Nous l’invitons donc à poursuivre son bon raisonnement en l’adoptant !