Nous souhaitons supprimer l’alinéa prévoyant que l’on puisse se passer du consentement du demandeur d’asile pour l’auditionner en visioconférence.
Cette généralisation de la visioconférence est non seulement contraire à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, mais aussi critiquée par les acteurs du contentieux, à commencer par les juges.
Saisi de la question du recours à la visioconférence, le Conseil constitutionnel a jugé, dans une décision du 20 novembre 2003, que l’utilisation de cette méthode était conforme à la Constitution, à condition qu’elle soit subordonnée au consentement de l’étranger.
Monsieur le ministre d’État, que vous inspire cette décision ? Avec une telle disposition, le Gouvernement fait passer son rouleau compresseur sur les droits fondamentaux du demandeur d’asile, sans égard pour le contrôle de la conformité de la loi à la Constitution exercé par le Conseil constitutionnel.
Lors de ces audiences, l’oralité est d’autant plus importante que les personnes concernées sont fragilisées par un parcours migratoire souvent dramatique et périlleux et par des conditions de vie plus que précaires. On prétend entendre leur récit et examiner leur demande d’asile à distance, par écran interposé…
Cette disposition fait, bien entendu, l’unanimité contre elle.
Ainsi, la Contrôleur général des lieux de privation de liberté, Mme Adeline Hazan, estime que la généralisation du recours à la visioconférence pour les audiences sans le consentement des intéressés est inacceptable. Outre les difficultés techniques souvent constatées, la visioconférence entraîne, selon elle, une déshumanisation des débats et nuit considérablement à la qualité des échanges.
Du côté des avocats, le Conseil national des barreaux estime qu’une audience se tenant par le biais de moyens de télécommunication est incompatible avec une défense de qualité, de surcroît lorsque l’oralité est déterminante pour arrêter la décision.
Du côté des juges, tous ceux qui ont fait l’expérience de la visioconférence s’opposent à sa généralisation. Le syndicat de la juridiction administrative indique ainsi que ce dispositif a pour effet de mettre à distance le juge et les parties, qui ne se côtoient plus physiquement. Le principe pluriséculaire d’unité de temps et de lieu propre à tout procès se trouve dès lors mis à mal.
En résumé, la dématérialisation des audiences en matière de droit d’asile nuit gravement au principe fondamental du droit à un procès équitable, et donc à notre démocratie.