Plusieurs de nos collègues, dont M. Assouline, ont insisté sur les divers coups de rabot et complications de droits prévus dans le cadre du projet de loi.
L’article 9 aussi va dans ce sens, en s’attaquant aux conditions d’aide matérielle. Outre qu’il légalise votre circulaire, monsieur le ministre d’État, cet article pose de nombreuses difficultés.
En particulier, il renforce le caractère directif du schéma national d’accueil des demandeurs d’asile, puisque le demandeur sera désormais orienté vers une région précise, où il sera tenu de résider. Le contrôle des autorités est intensifié, et de nouvelles hypothèses de retrait ou de suspension des conditions matérielles d’accueil sont prévues : si l’étranger a présenté plusieurs demandes d’asile sous des identités différentes ou s’il a quitté la région désignée par l’OFII sans en informer celui-ci. Le retrait de ces conditions matérielles d’accueil – hébergement ou allocation – est d’effet immédiat.
Le Défenseur des droits estime que la mise en œuvre du schéma national d’hébergement ne peut se réaliser que si elle est faite dans l’intérêt des demandeurs d’asile, sans que l’assignation à résidence aboutisse à un système de prérétention administrative, et qu’elle doit, en tout état de cause, s’accompagner d’une augmentation de l’offre des centres d’accueil pour demandeurs d’asile, les CADA. C’est ce qu’il préconisait déjà lors de la mise en place de ce schéma par la loi de 2015.
Rappelons que, si la directive Accueil autorise les États à prendre de telles mesures, il ne s’agit que d’une possibilité. Son article 7 précise que « les demandeurs peuvent circuler librement sur le territoire de l’État membre d’accueil ».
Par ailleurs, si certaines améliorations ont été apportées au projet de loi, comme la prise en compte de la vulnérabilité du demandeur, le droit des demandeurs qui souhaitent être hébergés dans leur famille ou chez un tiers ne paraît pas expressément garanti.
Or, en excluant du bénéfice des conditions matérielles d’accueil les demandeurs d’asile souhaitant être hébergés dans leur famille ou chez un tiers, le projet de loi va bien au-delà de ce qu’autorise la directive Accueil, qui n’a jamais exclu le principe de l’hébergement chez un particulier.
Pour toutes ces raisons, nous nous inquiétons, comme d’ailleurs l’Observatoire de l’enfermement des étrangers, de la porosité croissante entre l’accueil et la détention. Sous couvert d’un accueil encadré et efficace, cette politique migratoire organise la surveillance des personnes étrangères, des violations massives de leurs droits et, finalement, leur rejet.