Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 21 juin 2018 à 21h30
Immigration droit d'asile et intégration — Article 10

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Le présent article généralise le recours à la vidéo-audience sans le consentement de la personne concernée, tant devant le juge administratif que devant le juge des libertés et de la détention lorsque ceux-ci sont saisis dans le cadre de procédures de maintien en zone d’attente.

Cela a été dit, la généralisation de la vidéo-audience est particulièrement problématique dans le cadre du droit d’asile et du droit des étrangers, car l’oralité revêt une dimension majeure pour la compréhension par le juge du parcours de la personne étrangère.

Outre les difficultés pratiques rencontrées, cette technique déshumanise les débats et ne permet pas d’échanger dans de bonnes conditions. Elle crée une distance préjudiciable aux droits de la défense.

En outre – cela a été évoqué lors de la défense de la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité –, l’élargissement du recours à la visioconférence sans le consentement de l’étranger contrevient au droit à un procès juste et équitable et présente des risques d’inconstitutionnalité.

À cet égard, le Défenseur des droits relève que la mise en œuvre de la vidéo-audience, contrairement aux exigences liées au droit à un procès équitable, affecte notamment la publicité des débats, le respect du contradictoire et les droits de la défense – comme dirait l’autre, « je dis ça, je ne dis rien, mais je le dis quand même ».

Sur ce dernier point, la garantie des droits de la défense implique la mise en œuvre d’un dispositif permettant la préparation des débats entre les avocats et leurs clients en amont de l’audience avec l’assistance d’un interprète et avec des garanties de confidentialité. Aussi des locaux adaptés à la présence physique d’un avocat et d’un interprète aux côtés de l’étranger apparaissent-ils nécessaires avant et pendant l’audience.

Enfin, dans le cadre des appels formés contre les ordonnances de maintien en zone d’attente prises par le juge des libertés et de la détention, l’article 10 prévoit que le juge pourra rejeter des déclarations d’appel manifestement irrecevables par ordonnance motivée sans avoir préalablement convoqué les parties.

Cette disposition porte atteinte au droit à un recours effectif et à l’accès au juge, en violation de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui dispose : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable ».

Pour toutes ces raisons, nous demandons que les dispositions de cet article soient supprimées.

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