Intervention de Jacqueline Gourault

Réunion du 22 juin 2018 à 9h30
Immigration droit d'asile et intégration — Article 15 ter

Photo de Jacqueline GouraultJacqueline Gourault :

Je tiens d’emblée à préciser que le placement des mineurs non accompagnés en rétention n’est actuellement pas autorisé en France. Cette interdiction est déjà inscrite dans la loi. Aucun mineur non accompagné n’a jamais été placé en rétention. Libre à vous, mesdames, messieurs les sénateurs, de réclamer une disposition qui existe déjà, mais je tenais à faire ce rappel en introduction, compte tenu de la gravité et de la sensibilité de ce sujet.

La rétention familiale, c’est-à-dire la rétention des parents avec leurs enfants mineurs, fait l’objet de débats. Nous l’avions d’ailleurs constaté lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale. C’est pourquoi, sur ce sujet dont, encore une fois, je comprends l’extrême sensibilité, je tiens à apporter quelques explications et précisions.

Tout d’abord, je le rappelle, la rétention familiale est une procédure exceptionnelle, qui fait l’objet d’un encadrement strict. Elle est exceptionnelle, car, même si le droit européen l’autorise, nous devons nous assurer que l’intérêt de l’enfant prime et nous devons protéger les mineurs contre tout abus de placement en rétention. C’est ce que nous faisons. En 2017, les mineurs accompagnants en rétention ne représentaient que 1, 17 % de l’ensemble des personnes placées en rétention en métropole.

Ensuite, il s’agit d’une procédure strictement encadrée. Elle intervient lorsque la famille s’est déjà soustraite à une procédure d’éloignement, autrement dit, lorsque la famille, placée en assignation à résidence, a fui le domicile ou a placé ses enfants ailleurs pour faire échec à la mesure d’éloignement. Je répète qu’on ne peut pas faire appliquer la mesure d’éloignement si les enfants ne sont pas présents. Elle intervient également si le placement en rétention de l’étranger dans les 48 heures précédant le départ programmé préserve l’intéressé et le mineur qui l’accompagne de certaines contraintes liées à la nécessité de leur transfert.

En outre, je précise que notre droit permet que seuls les parents soient placés en rétention. Les enfants mineurs, pendant ce temps, peuvent être placés en famille d’accueil. Toutes les familles peuvent avoir recours à cette possibilité. Ce n’est que lorsqu’elles la refusent que les mineurs accompagnant leurs parents sont placés en rétention. Beaucoup de parents, et c’est bien normal, je le comprends, préfèrent garder leurs enfants avec eux. Il est toujours extrêmement difficile de séparer les enfants de leurs parents. Vous comprenez à quoi je pense en disant cela…

J’ajoute que nous faisons le maximum pour que la durée de la rétention soit la plus courte possible. Le 12 juillet 2016, la Cour européenne des droits de l’homme, réaffirmant que la durée de rétention des familles doit être la plus courte possible, avait estimé qu’une durée de 18 jours était disproportionnée par rapport au but recherché et constituait en l’espèce une ingérence disproportionnée dans le droit au respect de leur vie familiale garanti par l’article 8 de la convention européenne des droits de l’homme. Or, aujourd’hui, la durée moyenne de rétention des familles en France est de 36 heures, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.

Inscrire dans la loi une durée maximale de rétention très brève poserait en revanche de grandes difficultés, même si je comprends cette proposition d’un point de vue humanitaire. En effet, une durée trop brève pourrait encourager les familles à faire obstacle à leur éloignement, …

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