Mes chers collègues, cet article est tout à fait important, et il confirme ce que nous avons essayé de démontrer tout au long de nos travaux : ce projet de loi cherche, tantôt à durcir les dispositions en vigueur, tantôt à afficher des durcissements qui n’ont absolument aucun effet.
Tâchons d’être pragmatiques, et voyons de plus près ce dont on parle. Pour avoir régulièrement visité des centres de rétention administrative, nous savons que le constat est toujours le même. À l’heure actuelle, le temps moyen de placement au sein des CRA s’établit à 12, 7 jours. Au total, moins de 4 % des personnes concernées y restent jusqu’au terme des 45 jours ; et, en définitive, ces personnes sont libérées quoi qu’il en soit !
Ce sujet a été évoqué plusieurs fois par le Gouvernement : le problème, ce sont les accords avec les gouvernements étrangers en vertu desquels les consulats autorisent le rapatriement de ces personnes.
Tous les professionnels sur le terrain nous le disent : au-delà de 7 jours, 12 jours au maximum, si le retour n’a pas eu lieu, le maintien en rétention est un pur affichage. On sait très bien que, en définitive, il faudra faire sortir ces personnes des centres de rétention administrative. Certains peuvent dénoncer cette réalité, dire qu’il s’agit d’un scandale, mais c’est un fait.
Ainsi, cet affichage de 90 jours ne renvoie à aucune réalité. Le seul effet de cette mesure sera de faire « souffrir » davantage les 4 % de personnes qui atteignent 45 jours, et qui devront attendre 45 jours de plus avant d’être relâchées.
J’ajoute que la rétention administrative n’est pas une incarcération. Dès lors, comment justifier un tel traitement ? S’il s’agissait de délinquants condamnés, cet allongement ne poserait pas problème, mais tel n’est pas le cas.
À l’origine, les centres de rétention ont été créés pour mettre un terme aux camps sauvages qui existaient, notamment, à Marseille. Il fallait raccompagner les personnes concernées en dehors de toute réglementation, et, dans l’intervalle, on ne disposait pas d’un cadre permettant de les garder.