Intervention de Brigitte Lherbier

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 31 mai 2018 : 1ère réunion
Projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes — Audition de mmes nicole belloubet garde des sceaux ministre de la justice et marlène schiappa secrétaire d'état chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes

Photo de Brigitte LherbierBrigitte Lherbier :

Mesdames les ministres, vous avez dit que l'égalité des chances était impossible si l'on ne réglait pas ces problèmes de violences. Élus de terrain, nous avons tous été confrontés à la souffrance psychique et physique de personnes fréquentant nos permanences, et l'on garde des séquelles de ces témoignages douloureux et oppressants. Dans ma permanence, tous les mois des femmes me racontaient combien elles souffraient sous les coups de leur mari. On pourrait penser que c'est un problème de classe sociale, de mauvaise connaissance du droit, mais les témoignages se suivaient mois après mois.

Vous avez parlé des plaintes en ligne. Cela favorisera le dépôt de plainte, car il faut convaincre de faire cette démarche. De même que l'aggravation des sanctions peut être incitative. Mon état d'esprit était le suivant : si l'on fait de la pédagogie dans ces zones où les gens n'ont pas forcément accès au droit, ce sera un plus. Or samedi dernier, j'ai croisé au Touquet une femme très classe d'une soixantaine d'années - ce ne sont pas uniquement les jeunes femmes qui subissent des violences - assise sur un banc, complètement perdue et repliée sur elle-même. Elle m'a dit qu'elle ne rentrerait pas chez elle le soir parce que les coups pleuvaient, ajoutant qu'elle ne cessait d'appeler la gendarmerie et qu'elle ne savait plus où elle en était. Elle m'a dit également avoir assisté à une réunion de 300 femmes dans une ville voisine, dont elles sont toutes ressorties honteuses de ce qui leur arrivait. Le médecin qu'elle est allée voir lui a dit qu'elle était peut-être tombée dans l'escalier. Il n'y a pas de preuves.

Toutes ces femmes s'interrogent sur l'après-procès : le conjoint violent va être condamné, mais que vont-elles devenir ? Ainsi, cette dame m'a expliqué être mariée sous le régime de la séparation de biens, ne rien posséder, vivre dans une tout petite ville où la pression sociale est forte. Il faut donc aussi envisager l'après, notamment reloger ces femmes pour les éloigner de leur conjoint. L'arsenal législatif ne suffit pas ; il faut aussi développer le social.

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