Cet exercice nouveau est utile pour mettre en lumière notre travail au cours de l'année passée et vous donner des indications sur l'exécution budgétaire 2017 du ministère de l'agriculture et de l'alimentation et sur le début de l'exécution 2018.
En 2017, le budget de mon ministère a été exécuté à hauteur de 6,4 milliards d'euros, en augmentation de 23 % par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2017 - 5,2 milliards d'euros. Cette surexécution exceptionnelle s'explique à la fois par les dépenses liées aux crises sanitaires, notamment l'influenza aviaire hautement pathogène - 62 millions d'euros au titre des mesures sanitaires et 170 millions d'euros au titre de l'indemnisation des filières amont et aval -, par le financement des campagnes « indemnités compensatoires de handicaps naturels » 2016 et 2017 - dépense supplémentaire de 256 millions d'euros -, par des besoins supplémentaires liés aux dispositifs sociaux - 81,5 millions d'euros, en particulier le dispositif « travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi » TO/DE, insuffisamment budgétisé dans la loi de finances initiale pour 2017 et qui a nécessité l'ouverture de 65 millions d'euros de crédits supplémentaires -, et enfin par un montant élevé de refus d'apurement communautaire - 721,1 millions d'euros.
Pour couvrir ces besoins en partie non prévus, le ministère a notamment bénéficié en loi de finances rectificative d'une ouverture de crédits de 828 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 1 milliard d'euros en crédits de paiement, et d'un décret d'avance de 100 millions d'euros en juillet 2017 dédié au financement des effets des crises sanitaires.
Le budget présenté et voté pour 2018 a intégré un très substantiel effort de sincérisation à travers la budgétisation des dispositifs sociaux à hauteur des besoins - 50 millions d'euros de plus par rapport à 2017 -, un renforcement de plus de 12 % des crédits du programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » - 26 millions d'euros de plus par rapport à 2017 -, la mise en place pour la première fois d'une provision pour aléas d'un montant de 300 millions d'euros destinée à financer les refus d'apurement et les besoins exceptionnels liés aux crises sanitaires climatiques ou économiques.
Compte tenu de cet effort et en l'absence, à ce stade, de risque sanitaire identifié, je respecterai la trajectoire budgétaire 2018.
Enfin, le soutien au secteur agricole est complété par 9 milliards d'euros de crédits communautaires, par 1,7 milliard d'euros de dépenses fiscales et par différentes exonérations de cotisations sociales.
Le soutien au développement de l'agriculture biologique se répartit entre les aides à l'hectare pour la conversion et le maintien de l'agriculture biologique, financées par le fonds européen agricole pour le développement rural, le Feader, et les crédits d'État, des agences de l'eau et d'un certain nombre de collectivités locales. Au titre de 2015, le soutien à l'agriculture bio à travers les mesures pour la conversion et le maintien a représenté une enveloppe de 132 millions d'euros pour 21 000 bénéficiaires, dont 84 millions d'euros de Feader et 48 millions d'euros de contreparties nationales. L'État représente 99 % des financements nationaux.
Il existe d'autres mesures de soutien : le Fonds Avenir Bio, qui permet de soutenir des projets de structuration des filières, ou le crédit d'impôt bio.
Les précédents plans Ambition bio ont permis un développement de l'agriculture biologique ces dernières années. La surface agricole utile (SAU) en bio atteint aujourd'hui 1,77 million d'hectares, soit 6,5 % du total, tandis que la part des exploitations françaises certifiées en agriculture biologique s'élève à 8,3 % du total.
Pour renforcer cette dynamique, le Premier ministre a annoncé l'élaboration d'un nouveau plan Ambition bio, qui prévoit le passage à 15 % de la SAU en bio d'ici à 2022. Ce programme mobilisera 1,1 milliard d'euros de crédits sur la période 2018-2022, contre 700 millions d'euros sur la période précédente, soit une augmentation de 62 %.
Trois leviers financiers sont mobilisés à cette fin : un renforcement des moyens consacrés aux aides à la conversion, avec 630 millions d'euros de fonds Feader et 200 millions d'euros de crédits d'État, auxquels s'ajouteront les autres financements publics ; un doublement du fonds Avenir Bio, géré par l'Agence bio, porté de 4 à 8 millions d'euros par an ; une prolongation du crédit d'impôt bio, revalorisé de 2 500 à 3 500 euros. Ces moyens financiers supplémentaires nous permettront de conforter la dynamique pour atteindre les objectifs fixés.
Concernant le financement de l'agriculture biologique par un complément des ressources supplémentaires issues de la redevance pour pollutions diffuses, la RPD, la rénovation de cette imposition a été annoncée par le Gouvernement dans le cadre du plan d'action pour réduire la dépendance de l'agriculture aux produits phytopharmaceutiques. Les recettes de la RPD contribueront à financer l'accompagnement des agriculteurs, dans le cadre du plan Écophyto et de la conversion à l'agriculture biologique - environ 50 millions d'euros.
S'agissant de la mise en oeuvre de la PAC et des refus d'apurement communautaire, voici où nous en sommes par rapport au calendrier de versement des aides.
Le coût financier de ces refus d'apurement est important, et l'année 2017 est même assez exceptionnelle. La maîtrise des risques d'apurement est une de mes priorités. Elle passe en premier lieu par la bonne transcription des règles européennes dans les dispositions nationales. Les apurements d'aujourd'hui portent sur des périodes passées ; a contrario, ce n'est que dans quelques années que l'on pourra évaluer l'efficacité de la politique actuelle.
Dans le même temps, je cherche à diminuer autant que possible le coût financier de ces apurements. Ainsi, concernant l'évolution du montant de la correction sur les soutiens couplés, d'un refus d'apurement initialement annoncé de 1 milliard d'euros par campagne, soit l'intégralité des aides versées au titre des campagnes 2015 et 2016, la Commission européenne a réduit sa proposition de correction à 34,7 millions d'euros pour ces deux campagnes.
Pour 2018, les refus d'apurement seront financés dans le cadre de la dotation pour aléas, que nous avons calibrée le plus justement possible. De même, une provision pour aléas figurera bien de nouveau dans le projet de loi de finances 2019. Il reste à en calibrer le montant.
S'agissant du versement des aides PAC, le calendrier de retour à la normale des paiements sur lequel s'est engagé le Gouvernement est respecté. Pour le premier pilier, le retard est désormais presque complètement résorbé. Pour le second pilier surfacique, les paiements des mesures agroenvironnementales et climatiques et des aides à l'agriculture biologique de la campagne 2015 ont été réalisés dans leur quasi-totalité. Ceux de la campagne 2016 viennent de débuter et vont se poursuivre par vagues successives. Le versement des aides de la campagne 2017 commencera dès cet automne.
Par ailleurs, il faut souligner le très bon déroulement de la campagne de télédéclaration 2018, qui a été ouverte le 1er avril et a pris fin le 15 mai. Sa clôture dans de bonnes conditions, à la date habituelle, constitue ainsi une autre preuve tangible du retour à la normale dans la gestion de la campagne 2018.
S'agissant des crises sanitaires, l'année budgétaire 2017 a été impactée par l'épizootie d'influenza aviaire hautement pathogène. La détection de la bactérie xylella fastiodosa, en Corse et en Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA), a aussi été un élément d'importance. La fin de l'année 2017 a été également marquée par la détection de foyers de fièvre catarrhale ovine de sérotype 4 en Auvergne-Rhône-Alpes et par la découverte de nouveaux foyers de xylella fastidiosa en PACA. C'est pourquoi le budget initial du programme 206 pour 2017 a connu une augmentation de 50 %, avec un décret d'avance d'environ 100 millions d'euros.
Les aléas liés aux crises sanitaires rendent difficiles les prévisions budgétaires de ce programme. Mais il est essentiel d'investir dans la prévention et la surveillance pour limiter la survenue et les impacts potentiels des éventuels dangers sanitaires sur nos filières, conformément à l'adage « mieux vaut prévenir que guérir ».
C'est pourquoi j'ai tenu à renforcer les moyens du programme 206, dont l'enveloppe budgétaire au titre du projet de loi de finances pour 2018 a été augmentée de 12 %, hors dépenses de personnel. J'ai également veillé à ce que les effectifs du programme soient maintenus en 2018 au niveau de 2017.
Pour revenir sur la PAC et le cadre financier pluriannuel, comme l'a dit ce matin le Président de la République à Quimper, le budget qui a été proposé par la Commission européenne est inacceptable et risque de porter un coup à la viabilité des exploitations. Certes, il faut rénover la PAC, la rendre plus efficace, de sorte qu'elle demeure un véritable filet de sécurité pour nos agriculteurs. Mais la Commission propose une baisse de plus de 15 %, ce qui serait dramatique pour les agriculteurs non seulement français, mais également européens.
Dès le 2 mai, dès que nous avons eu connaissance de la proposition de la Commission, nous avons créé le groupe dit « de Madrid », qui réunit la France, la Finlande, l'Irlande, le Portugal, l'Espagne et la Grèce, et présenté lundi dernier lors du Conseil Agriculture et pêche un mémorandum qu'ont soutenu plus de vingt États membres. Nous avons donc le poids nécessaire pour défendre un budget ambitieux et réaffirmer que la PAC ne doit pas être la variable d'ajustement à la fois du Brexit, qui inquiète de nombreuses filières professionnelles, en particulier les pêcheurs, et des nouvelles politiques à financer - défense, immigration.
La négociation va être âpre, mais l'ensemble du Gouvernement est mobilisé. Nous allons essayer de faire fléchir la Commission pour en revenir à une proposition de budget qui fasse de l'agriculture une véritable priorité, de manière à garantir la viabilité et la compétitivité de nos exploitations, pour que nos agriculteurs vivent dignement de leur travail, mais aussi pour que nos concitoyens bénéficient d'une alimentation plus saine, projet que nous avons porté à travers les états généraux de l'alimentation.