Intervention de Nathalie Delattre

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 26 juin 2018 à 9h05
Projet de loi relatif à la lutte contre la fraude — Examen du rapport pour avis

Photo de Nathalie DelattreNathalie Delattre, rapporteur pour avis :

Effectivement, monsieur Durain, les conditions ne sont pas les meilleures pour rapporter ce texte d'autant que la commission des finances souhaite encore l'améliorer.

Je ne me prononcerai pas sur la justesse et le montant de l'impôt : ce vaste débat pourra avoir lieu lors de la prochaine loi de finances.

Le montant de la fraude fiscale est difficile à évaluer : la fourchette entre 60 et 80 milliards est la plus communément admise, mais comme il d'agit d'impôts éludés, impossible d'être plus précis.

J'en viens à l'article 1er et à la création d'une police de Bercy. J'ai auditionné la BNRDF : des discussions approfondies ont eu lieu entre le ministère du budget et celui de l'intérieur. Bercy veut absolument cette police. Aujourd'hui, le code de procédure pénale prévoit que les officiers fiscaux judiciaires doivent être rattachés au ministère de l'intérieur, d'où la nécessité de passer par la loi pour créer un nouveau service d'enquête au sein du ministère du budget. Dans l'étude d'impact, il est dit que 260 affaires sont en attente à la BNRDF alors que seulement 205 affaires sont en cours d'instruction. La BNRDF instruit ces dossiers complexes et rend ses conclusions en 24 mois en moyenne. Ce délai semble tout à fait satisfaisant au regard du temps nécessaire pour mener l'instruction. Les bons taux d'élucidation sont dus aux OPJ formés à la contrainte : ils savent mener des perquisitions, auditionner, investiguer, alors que les OFJ sont formés au contrôle fiscal. Leurs formations sont tout à fait complémentaires. La mixité des profils au sein de la BNRDF explique les succès enregistrés. En outre, la brigade nationale est rattachée au ministère de l'intérieur mais codirigée par des fonctionnaires des finances publiques.

Aucun office central de police judiciaire n'est rattaché au ministère de la justice, monsieur Collombat. Il est préférable que le ministère de l'intérieur soit compétent, afin que cette police bénéficie de son maillage territorial.

Je ne pense pas que l'on reviendra sur le plaider coupable à l'occasion de l'examen des prochains textes sur la justice.

Les affaires dites « emblématiques » sont celles qui remplissent les critères définis par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, précisée par les circulaires ministérielles et l'usage de la CIF. Aujourd'hui, la justice serait incapable de traiter 15 000 dossiers répressifs. Sur cette masse de dossiers, seuls un millier remplissent l'ensemble des critères. Ces dossiers sont présentés par la CIF aux parquets territoriaux ou au parquet national financier qui en retiennent en général 95 %. Les critères de complexité, d'opacité et de récidive sont examinés avec attention, de même que le montant d'impôt éludé. M. de Montgolfier souhaiterait inscrire ces critères dans la loi. Merci à M. Pillet d'avoir rappelé que le parquet est saisi par la CIF mais qu'il a aussi la capacité de s'autosaisir en cas de blanchiment de fraude fiscale, depuis l'arrêt Talmon de 2008. Je propose d'inscrire cet arrêt dans la loi.

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