Je vous remercie pour la qualité de vos questions, qui vont permettre de rentrer un peu plus dans le détail d'une partie du texte.
Tout d'abord, s'agissant de la flexisécurité, j'ai bien précisé que la première étape était intervenue dans le cadre de la loi sur le renforcement du dialogue social et que la seconde concernait la sécurisation des parcours professionnels. Ce terme ne parle pas forcément au grand public. Nous avons donc choisi de parler de « la liberté de choisir son avenir professionnel ».
J'ai évoqué un troisième temps, celui de la réforme des retraites, qui n'est pas de mon ressort. Il relève de ma collègue ministre des solidarités et la santé. Il n'y a donc là aucun changement : la rénovation arrive en plusieurs étapes. Cette réforme est complémentaire de celle de l'année dernière.
Je voudrais revenir sur le CPF, qui a fait l'objet de plusieurs questions.
Concernant la crainte de la désintermédiation, il faut à un moment donné savoir si l'on fait confiance aux acteurs du secteur. Le sujet était le même l'année dernière à propos des entreprises. Beaucoup considéraient qu'on ne pouvait leur laisser la main en matière de dialogue social. Nous pensons au contraire que, dans une société mobile et mature, dans le cadre fixé par la loi, il faut accorder sa confiance aux acteurs.
On ne peut pas dire aux 26 millions d'actifs qu'ils ne sont pas en mesure de décider à propos de ce qui les concerne directement. Nous sommes en 2018, et il est temps de leur faire confiance. Il y a parfois une certaine condescendance à dire que les salariés ou les demandeurs d'emploi ne sont pas capables de décider pour eux-mêmes.
Lors d'une émission publique à laquelle je participais, l'une des premières personnes à appeler était un éboueur qui voulait devenir chauffeur au sein de la société dans laquelle il travaille. Il a mis très longtemps à trouver la formation. Avec la nouvelle loi, il saura où la trouver. Par ailleurs, cette formation coûtant 800 euros, il lui a fallu emprunter à sa banque, personne ne voulant la financer.
C'est une réalité : seulement 6 % des ouvriers, 12 % des employés et - ce qui est extrêmement étonnant - 25 % des cadres disent choisir leur formation. On a mis en place des systèmes qui ne permettent pas l'égalité des chances. Ce sont ceux qui ont des formations initiales élevées qui vont en formation continue. Ils auront besoin d'en faire davantage demain en raison de la mutation des métiers.
On considère le salarié ou le demandeur d'emploi comme un mineur, et l'on décide à sa place. Une partie relève de la responsabilité des entreprises, mais je crois qu'il faut faire confiance aux acteurs.
Je m'inscris cependant en faux contre le fait de dire que la personnalisation du choix de sa vie professionnelle isole les personnes. L'application n'est qu'un outil qui permet de démocratiser l'accès à la formation. Le conseil en évolution professionnelle existait déjà, mais n'était pas financé : nous garantissons son utilisation. Il n'y avait que les missions locales et Pôle emploi pour l'assurer.
La loi prévoit un financement dédié. Une partie de la mutualisation ira au conseil en évolution professionnelle. Un appel d'offres sera réalisé avec les régions et les partenaires sociaux pour que l'on puisse en disposer sur tout le territoire. Ce sera une des conditions pour être agréé. N'importe quel salarié pourra ainsi accéder physiquement à un conseil en évolution professionnelle.
Il s'agit d'une véritable révolution ! On va permettre aux salariés d'avoir leur mot à dire sur une partie de leur formation. Cela peut se combiner avec les accords d'entreprise ou les accords individuels. C'est un élément d'émancipation absolument extraordinaire qui montre que, dans une société moderne, chacun doit avoir le droit de se former. Ce droit n'existe pas aujourd'hui. Il figure bien dans nos principes, mais on va le rendre opérationnel.
Concernant le permis de conduire, le permis poids lourd n'était pas pris en compte dans le CPF, ce qui est paradoxal, alors qu'on cherche 23 000 chauffeurs routiers ! La demande est très forte. Cela ne relève pas de l'ordre législatif, mais je viens de le faire inscrire dans les textes. C'est une forte demande en matière de mobilité et d'emploi dans la filière des transports.
Toujours s'agissant du CPF, le bilan de compétences est bien finançable, comme le prévoit l'article 4 du texte. Il est également finançable par le biais du plan de développement des compétences des entreprises. Il n'y a pas de changement. Personne ne demande à financer un bilan de compétences tous les ans. On le fait une ou deux fois dans sa vie professionnelle. Il n'y a donc pas de problème d'accès.
Concernant le CIF et le CPF de transition, le congé individuel de formation a une grande qualité et un défaut. Il permet de donner corps à un espoir de promotion sociale. La qualification n'existe aujourd'hui que dans le CIF. Demain, elle existera de façon beaucoup plus large grâce à l'ouverture des droits dans le CPF.
Le défaut du CPF vient du fait que seules 40 000 personnes y accèdent. Plus de la moitié de celles-ci ne s'orientent finalement pas vers le métier auquel elles se sont formées. En donnant un droit, en responsabilisant les demandeurs et en ayant la possibilité de le combiner avec le plan de formation de l'entreprise, on devrait avoir beaucoup plus de personnes en formation qualifiante longue. Deux tiers des formations sont en dessous de 5 000 euros ou de 8 000 euros et peuvent entrer directement dans le CPF. On va donc démocratiser l'esprit du CPF.
Bien évidemment, les partenaires sociaux ont demandé à juste titre qu'on conserve un complément - le CPF de transition professionnelle - pour les formations plus longues. Il n'y a pas de changement de rémunération. Celle du CPF de transition professionnelle sera prise en compte de la même façon que dans le cadre du CIF. C'est une adaptation du CIF.
Dans le cas du CPF de transition professionnelle, la rémunération est forcément incluse dans le congé, ce qui n'est pas le cas pour le seul CPF, qui nécessite une négociation avec l'employeur afin que la formation ait lieu sur le temps de travail.
Comme les gouvernements précédents, nous partageons la volonté de faire de l'apprentissage une filière noble. Nous savons, les uns comme les autres, que c'est en partie un sujet législatif et réglementaire, et en partie une bataille d'opinion.
La loi permet de déverrouiller un certain nombre de freins mais aussi d'amener le débat public sur le sujet.
On a évoqué l'enseignement supérieur. C'est la partie qui se porte aujourd'hui le mieux dans l'apprentissage. Il faut savoir que le nombre des CAP et des baccalauréats professionnels a beaucoup baissé ces dernières années, tandis que l'apprentissage dans l'enseignement supérieur a beaucoup augmenté. Sur 420 000 apprentis, 150 000 se trouvent dans l'enseignement supérieur. C'est la partie la plus dynamique.
Après un temps d'appropriation du dispositif, les entreprises et les jeunes ont bien compris que détenir un master ou un diplôme d'ingénieur en ayant en plus une expérience professionnelle tout en bénéficiant, pour le jeune, d'une rémunération, constituait une manière formidable de pénétrer sur le marché du travail. Nous avons besoin de reconquérir le terrain des CAP et des baccalauréats professionnels. C'est là que se trouvent les 1,5 million de décrocheurs qui n'ont accès à rien. Ce sujet est donc essentiel.
Il est inexact - pour ne pas dire erroné - de dire qu'on transfère des compétences des régions aux branches. C'est faux ! Co-construire et bâtir le diplôme professionnel n'a jamais été une compétence des régions : c'est une responsabilité nouvelle que l'on confie aux branches.
On ne transfère pas non plus l'autorisation administrative des régions aux branches, on la supprime. Pas une branche, pas une région ni même l'État ne peuvent empêcher le développement de l'apprentissage si l'organisme est certifié et qu'il a qualité pour réunir des jeunes et des entreprises. Ce n'est pas un transfert. C'est une présentation un peu rapide du renforcement de la responsabilisation des branches. Le plus important, c'est que les branches - et surtout les entreprises - vont pouvoir devenir acteurs du dispositif.
Vous avez posé la question du reste à charge. Il existe actuellement trois guichets pour quatre aides. Aucun chef de TPE-PME ne le sait. Résultat : le reste à charge, qui n'est pas très élevé, est mal connu des entreprises. La petite entreprise doit faire l'avance de trésorerie. Dans le nouveau dispositif, on rémunérera l'apprenti 30 euros de plus, le reste à charge, pour un jeune de 16 ans à 18 ans, représentant 65 euros par mois la première année, alors que le jeune gagne 310 euros. C'est tout l'intérêt de la mutualisation. La deuxième année, ce sera de mémoire 241 euros.
Pour un jeune entre 18 ans et 20 ans, on est à 321 euros la première année et 494 euros la seconde. On a établi une progressivité qui n'existait pas ou peu auparavant. En effet, la première année, tout l'effort est mis à former le jeune. La deuxième, le jeune commence à avoir une certaine productivité. Il est donc normal que cela s'équilibre.
Cette simplification est incitative. Elle va aussi permettre de rendre le dispositif visible, l'idée étant que, sur la feuille de paye, le chef d'entreprise puisse voir tout de suite le reste à charge et visualiser le montant des aides qu'il a perçues. Beaucoup, de bonne foi, disent souvent que le coût d'un apprenti est très élevé.
Vous regrettez qu'il existe un « angle mort » en matière territoriale. Permettez-moi de ne pas être d'accord. Les comités régionaux de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles (CREFOP) continuent à remplir leurs missions et sont présidés par des régions. Les contrats d'objectifs et de moyens seront pilotés par les régions avec les branches, et pourront s'inscrire dans un schéma régional. Ce sont les régions qui décident des investissements en matière d'apprentissage. Elles auront compétence en matière d'orientation. Enfin, elles auront des moyens pour compléter le coût au contrat par des éléments d'aménagement du territoire. J'ai donc du mal à entendre que l'angle territorial n'est pas pris en compte. C'est évidemment sur le terrain que l'on réussira cette réforme.
L'entreprise a de bons résultats quand le jeune, son maître d'apprentissage et les formateurs du CFA travaillent main dans la main. Il faut réussir dans cette voie complémentaire et de même valeur que la formule relevant du statut scolaire.
En ce qui concerne le CFA du monde agricole, nous avons, à la demande des Maisons familiales rurales, travaillé sur le détail de certains formats. Les offres vont pouvoir être développées. Nous allons le faire pour les CFA agricoles, avec tous les réseaux. Ce sont les professionnels qui, au niveau de la branche, vont définir le coût au contrat. Dans beaucoup de régions, le financement est extrêmement bas.
Comment former un jeune avec 2 500 euros par an ? Je ne sais pas comment on peut faire de la qualité ! Or énormément de régions financent des formations de ce niveau. Si le coût au contrat est de 5 000 euros, 6 000 euros ou 7 000 euros, il va y avoir un appel d'air dans les CFA. Encore une fois, il existera un complément à cette dotation si nécessaire.
Le coût au contrat existe pour les contrats de professionnalisation, qui se développent sans qu'on en entende parler. Jusqu'ici, personne ne les a critiqués. C'est ce qui permet de réguler les coûts.
Concernant le barème de la taxe d'apprentissage, le Gouvernement souhaite que l'argent destiné à l'apprentissage aille réellement à l'apprentissage. Le projet de loi vise à affirmer que la voie scolaire et la voie professionnelle ne s'opposent pas, d'autant moins que nous souhaitons renforcer les passerelles entre les deux. J'ai approuvé un amendement à l'Assemblée nationale qui visait à sanctuariser 13 % de la collecte de la taxe d'apprentissage pour le financement des établissements d'enseignement professionnel et technologique, des grandes écoles et universités mais également des écoles de la deuxième chance et des écoles de production. Je crois que cet amendement clarifie les choses.
En ce qui concerne le paritarisme au sens plus général, France Compétences va réunir quatre organismes consultatifs et non-décisionnels. On se retrouve aujourd'hui dans des configurations variées : soit entre partenaires sociaux, soit entre partenaires sociaux et État, soit entre partenaires sociaux, État et régions, soit entre État et régions. C'est très compliqué. Pour réussir la formation professionnelle et l'apprentissage, il faut que les partenaires sociaux soient à bord, ainsi que les régions et l'État, chacun détenant une partie de la responsabilité en termes de régulation.
D'où l'idée de cette agence qui va pouvoir surveiller que la répartition financière prévue dans la loi pour le CPF et pour l'apprentissage est conforme aux normes. Elle fera tous les ans un rapport détaillé au Parlement. L'État aurait pu le faire, mais on a préféré que ce soit une production quadripartite. Un tel bilan, en particulier pour la représentation nationale, est plus riche que lorsqu'il est réalisé par le seul Gouvernement.
Il s'agit par ailleurs de réguler le coût et la qualité. Chaque branche va définir ses coûts au contrat, mais le cahier des charges sera défini de façon quadripartite. Cela permettra de surveiller la cohérence de l'ensemble et de fixer les règles de la certification pour tous les organismes de formation, qui pourront postuler à des financements des régions, de l'État, ou à des financements mutualisés. Il faut des règles communes.
France Compétences sera un outil de régulation. Ce n'est pas lui qui définira les politiques de formation professionnelle de l'apprentissage. C'est au Parlement de le faire avec le Gouvernement. Il existe des accords interprofessionnels selon les champs de compétences. C'est ainsi que l'on régule ensemble la mise en oeuvre des réformes.
Nous avons prévu quinze membres maximum dans un conseil d'administration, avec bien évidemment cinq représentants des organisations syndicales de salariés, trois représentants des organisations patronales, des régions et de l'État. Il faut que l'on définisse les règles entre nous. Les choses doivent être équilibrées. Aucun des collèges ne pourra prendre seul une décision, pas même l'État.
Pôle emploi collecte entre 18 et 20 % des offres. Cela représente plus de 3 millions d'offres d'emploi par an.
En ce qui concerne les compétences, 300 000 offres d'emploi n'ont pas été pourvues l'année dernière. On a manqué l'opportunité. Vous estimez que ce n'est pas beaucoup. Je suis très contente du degré de satisfaction des employeurs comme des demandeurs d'emploi qui, chaque année, évaluent de plus en plus positivement l'action de Pôle emploi.
Les salariés de Pôle emploi s'engagent énormément. On compte également beaucoup d'innovations. De plus en plus, avec le directeur général de Pôle emploi, nous poussons à la territorialisation de l'innovation. J'étais il y a quelques jours dans les Hauts-de-France avec le président de région, où a été mis en place un système dans lequel une équipe régionale de Pôle Emploi va dans les entreprises pour analyser le problème et être encore plus proactif dès qu'une difficulté est signalée. On innove tous les jours.
Plus largement, selon les enquêtes, la moitié des entreprises qui n'arrivent pas à recruter - et elles sont très nombreuses - incriminent l'absence de compétences sur le marché. Ce n'est pas étonnant, puisqu'on n'a formé qu'un demandeur d'emploi sur dix en moyenne ces quinze dernières années, au moment où les métiers changeaient à grande vitesse.
Mon premier objectif, dans la lutte contre le chômage de masse, c'est que les entreprises trouvent la compétence et que les demandeurs d'emploi puissent y accéder et trouvent un emploi. Il s'agit d'une convergence totale entre l'économique et le social, et c'est le coeur de ce projet de loi.
Les savoir-être professionnels - ou les codes sociaux des entreprises - constituent une réelle difficulté. Certaines personnes n'ont pas la compétence technique parmi les demandeurs d'emploi de très longue durée, tandis que certains jeunes de 28 ans n'ont jamais travaillé. Dans le plan d'investissement sur les compétences, 100 000 places de formation ont été confiées à Pôle emploi en complément de ce que nous faisons avec les régions.
D'autre part, les prépas apprentissage, que nous allons financer dans les CFA qui le souhaitent, à travers le plan d'investissement sur les compétences, permettront à des jeunes d'affiner leur orientation.
Concernant la VAE, si le principe est dans la loi, ses modalités sont réglementaires. Nous devons aller vers quelque chose de plus simple, de plus rapide, à plus grande échelle. Une mission doit voir le jour à la rentrée sur ce sujet. Un an d'expérience est peut-être suffisant. Ce qui compte, ce sont les acquis.
Le projet de loi conforte le congé de 24 heures pour une VAE. L'accompagnement sera finançable dans le plan de formation et par le CPF. Je pense que l'on peut améliorer le mécanisme lui-même. Vos recommandations m'intéressent.
S'agissant des démissionnaires, on en dénombre un million par an, mais la très grande majorité a déjà un emploi lorsqu'ils démissionnent : c'est ce qu'on appelle la mobilité. 70 000 démissionnaires sont inscrits à Pôle Emploi. Après estimation, nous avons calculé qu'on en compterait environ 30 000 à 35 000 par an. On parle là des démissions pour création d'entreprise ou reconversion. Tout le monde ne va pas démissionner tous les cinq ans pour créer son entreprise.
Ce chiffre est une estimation. S'il y en a plus, on s'adaptera, s'il y en a moins également. Un conseil en évolution professionnelle rencontrera les salariés qui souhaitent démissionner pour éviter qu'ils ne le fassent sur un « coup de tête ».
Pour ce qui est du financement de l'Unédic, les cotisations patronales existent toujours et représentent deux tiers du montant. Ce qui est compensé par l'État à travers le financement de la CSG, c'est l'exonération des cotisations salariales à l'assurance chômage.
Les ressources annuelles de l'Unédic s'élèvent à 33 milliards d'euros, soit l'équivalent de sa dette. Avec les démissionnaires et les indépendants réunis, on estime la somme entre 300 millions d'euros et 400 millions d'euros. On compense les cotisations en dur à travers l'impôt. Pour le reste, nous en discuterons avec les partenaires sociaux. Ce n'est pas un problème majeur.
En fait, avec Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, nous avons déjà prévu 54 heures par an sous la houlette des régions et des collèges et des lycées. Ce dispositif a vocation à s'étendre à toutes les classes d'âge. Nous allons le tester en seconde. Cela permettra aux régions d'avoir le champ libre pour innover dans ce domaine et l'étendre peu à peu.
En ce qui concerne le handicap, vous avez raison de dire que ces mesures peuvent servir de tremplin à certaines personnes handicapées pour travailler dans des entreprises ordinaires. Les entreprises adaptées sont ordinaires dans leur fonctionnement, mais pas dans leur financement. Il faut les encourager.
Pour les autres, en fonction de l'évolution des handicaps, il faut des entreprises adaptées beaucoup plus durables, voire des retours vers les ESAT. Il faut personnaliser, adapter : tout le monde n'a pas le même handicap, tout le monde ne connaît pas la même évolution.
Nous n'avons pas traité le sujet de l'AGEFIPH, préférant nous concentrer sur les droits. Il faut qu'on le revoie, mais il faut prendre le temps de le faire correctement pour être sûr que ce qu'on fait apporte un plus. Bien évidemment, on a besoin de l'AGEFIPH pour l'adaptation des postes de travail et le conseil. Seule une entreprise sur quatre atteint les 6 %. Beaucoup sont à zéro et préfèrent payer par crainte de complications, alors que l'évolution des traitements des technologies le permet.
Nous visitions l'autre jour, avec le Premier ministre, la société Safran Nacelles, qui fait un travail remarquable dans ce domaine. Eux-mêmes disent que l'accueil des travailleurs handicapés leur a permis de faire des progrès. On n'a pas fini le travail, mais ce qui est ancré dans la loi relève bien, pour les travailleurs handicapés, de la liberté de choisir leur avenir professionnel. C'est pourquoi nous avons souhaité le faire figurer dès à présent dans le texte. Les aspects structurels suivront ensuite. Évidemment, toutes les combinaisons doivent être possibles, dont le « Pro A ».
En ce qui concerne le harcèlement, l'idée des référents est une demande extrêmement forte des partenaires sociaux. Ils en réclament un dans les services de ressources humaines des entreprises au-delà de 250 salariés et désirent également que l'on forme les élus afin de les sensibiliser. On s'aperçoit en effet que l'entreprise considère ces situations comme compliquées. Cela peut concerner un collègue, un client, un responsable hiérarchique. Souvent l'entourage ne sait comment réagir, pas plus que le management ou les collègues.
Généralement, le harcèlement touche les femmes, mais pas seulement - le harcèlement homosexuel est également présent dans l'entreprise. On déplace souvent une personne harcelée en voulant la protéger, et elle finit par perdre son travail.
Tout cela demande énormément de sensibilisation. Lorsqu'on n'aura plus besoin de référents, c'est qu'on saura traiter le sujet. Le patronat comme les syndicats ont estimé qu'il était nécessaire de faire appel à la formation de certains personnels, afin qu'ils sensibilisent les autres. Un guide de l'employeur est prévu car il peut parfois, face à un harcèlement avéré qui n'a pas été condamné au pénal, perdre devant le conseil des prud'hommes s'il sanctionne le harceleur.
Ce sont des sujets complexes à propos desquels des réseaux sont nécessaires. La médecine du travail va être également formée. Il faut également former tous ceux qui peuvent intervenir sur ce sujet qui, malheureusement, est d'une certaine ampleur, tant dans le secteur public que privé.
Concernant l'apprentissage dans les secteurs où l'on vend de l'alcool, la loi clarifie le sujet du champ. Il existe aujourd'hui des interprétations différentes. On considère qu'on doit pouvoir travailler avec un maître d'apprentissage et sous sa surveillance dans un restaurant. Si on supprime la possibilité de faire de l'apprentissage dans les restaurants de 16 ans à 18 ans, on supprime l'apprentissage dans la restauration. Cela n'a donc pas de sens. On précise donc que le jeune ne peut vendre de l'alcool au bar, lui-même n'ayant pas le droit d'en acheter, ce qui est assez cohérent. La règle concernant l'âge minimal est la même pour tout apprenti. C'est le droit commun qui s'applique. On ne veut pas que cela se fasse aux dépens de la formation scolaire initiale.
Si l'on partage l'avis qu'on n'a pas tout essayé en matière d'apprentissage, qu'il est essentiel pour l'avenir des entreprises comme pour celui des actifs que les droits à la formation augmentent fortement, que les femmes et les hommes, à travail égal, soient rémunérés à la même hauteur, que les personnes handicapées puissent enfin accéder au marché du travail, alors on peut discuter de toutes les modalités du projet de loi. C'est ainsi qu'on devrait aborder nos débats en séance. J'espère qu'ils seront très constructifs.