Intervention de Éric Bocquet

Réunion du 3 juillet 2018 à 21h30
Lutte contre la fraude — Article 13

Photo de Éric BocquetÉric Bocquet :

Nous voici face au verrou de Bercy. Relevons d’entrée certains éléments du débat, dont plusieurs d’entre eux ont déjà été évoqués.

Cet article ne figurait pas dans le texte initial du projet de loi et a donc été ajouté, compte tenu du travail accompli en commission et de la sensibilité croissante du Sénat, comme de l’Assemblée nationale d’ailleurs, au problème de la procédure pénale en matière fiscale pour trouver un nouvel équilibre entre la toute-puissance des directions de l’administration, y compris à l’encontre, bien souvent, des initiatives mêmes des services déconcentrés, et le pouvoir discrétionnaire de la commission des infractions fiscales, la CIF.

Le Syndicat de la magistrature, dans son mémoire relatif au texte, indique : « Le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude s’inscrit dans une démarche, quasi assumée dans l’exposé des motifs, de compensation de l’indulgence affichée envers les fraudeurs à l’occasion du projet de loi “pour un État au service d’une société de confiance” et du refus déterminé de levée du “verrou de Bercy”. »

Le présent projet de loi est néanmoins très modeste dans son ambition, se contentant pour l’essentiel d’aménagements à la marge, de modifications cosmétiques et d’un renforcement des sanctions fiscales administratives qui s’inscrit avant tout dans une volonté de marginaliser la poursuite pénale des auteurs de délits fiscaux, de légitimer le maintien d’un traitement principalement administratif de la fraude fiscale et de tenter de rendre politiquement acceptable la conservation d’un verrou de Bercy, lequel constitue pourtant une spécificité difficilement défendable.

Il faut d’autres moyens et d’autres dispositions qu’une généralisation des croisements de fichiers pour permettre aux services fiscaux de mieux répondre, demain, aux contentieux existants. Cela passe par la rupture claire avec la logique de suppression massive de postes de fonctionnaires au sein des administrations fiscales qui a sensiblement appauvri la qualité du travail accompli, malgré le profond sens de l’intérêt général qui anime leurs 125 000 agents.

Il convient de lancer le service public fiscal à la reconquête de ses positions perdues pour donner une inflexion réelle à la lutte contre la fraude sociale, comme fiscale, et résoudre, en connaissance de cause, la fameuse dialectique du verrou de Bercy.

Plus de moyens matériels et humains, une étude conjointe de l’administration et de la juridiction compétente des dossiers nécessitant une procédure judiciaire, voilà comment sortir des controverses actuelles par le haut. L’intérêt général ne le vaut-il pas ?

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