Intervention de Cathy Apourceau-Poly

Réunion du 10 juillet 2018 à 14h30
Liberté de choisir son avenir professionnel — Discussion générale

Photo de Cathy Apourceau-PolyCathy Apourceau-Poly :

Celui qui offrait son travail est devenu demandeur d’emploi ; maintenant, c’est à lui de veiller à sa propre employabilité par la mise en œuvre, dès l’école, d’un parcours professionnel. S’il est au chômage, ce sont ses choix qui seront sanctionnés.

Ce système devient d’ailleurs terrible pour les jeunes, qui ne peuvent plus s’appuyer sur les aides à l’orientation, madame la ministre, puisque vous supprimez les centres d’information et d’orientation, ou CIO, qui jouaient un rôle important dans les territoires pour l’orientation des jeunes, ainsi que les conseillers d’orientation-psychologues. Vous réorganisez les DRONISEP, les délégations régionales de l’Office national d’information sur les enseignements et les professions, en les confiant aux régions sans garantie de cohérence nationale, et vous réduisez les missions de cet office national. Où est l’égalité républicaine, où est l’égalité des droits, quand il n’existe plus de service public de référence pour l’orientation ?

Je suis intimement convaincue que la formation professionnelle et l’apprentissage peuvent être des voies d’excellence permettant à des jeunes et à des moins jeunes de monter en qualification, d’obtenir des diplômes, et donc de prétendre à de meilleurs salaires et à de meilleures conditions de travail. Cette valorisation du travail permet de donner sa chance à chacun et chacune, quel que soit son milieu d’origine ; c’est cela, l’ascenseur social, et c’est ce que nous défendons !

C’est le cas pour des jeunes issus de milieux populaires qui complètent un premier diplôme et qui font le choix de poursuivre leur cursus en apprentissage pour obtenir un diplôme d’ingénieur ou de formation supérieure. Ayant déjà une formation initiale de bon niveau, ces jeunes, généralement, réussissent.

Le projet de loi qui nous est présenté aujourd’hui n’est pas fait pour ces cas : il réduit systématiquement les obligations des employeurs, il renforce les dispositifs de préapprentissage, il met les CFA en concurrence entre eux, il livre l’apprentissage au monde économique à travers les branches professionnelles, enfin il met en concurrence les régions, puisque, malgré toutes les ambitions qu’il entend déployer, cette révolution se fera à enveloppe constante.

L’ambition doit être complète et intégrer les lycées professionnels, qui jouent un rôle primordial en offrant aux jeunes une formation sous statut scolaire. J’étais vendredi dernier à Avion et Sallaumines, dans le bassin minier du Pas-de-Calais, en plein cœur de cités populaires, aux côtés des élus, des élèves et des professeurs dont les classes d’enseignement professionnel sont menacées de fermeture. Aujourd’hui, le CAP électricité du lycée professionnel de Sallaumines risque de fermer, demain ce sera son BEP et son BTS. C’est inacceptable ! Nous pourrions vous citer des centaines d’exemples de ce type en France.

De même, du fait de ce texte, les territoires vont être mis en concurrence les uns avec les autres : les moins attractifs d’entre eux vont être vidés de leurs jeunes, qui se verront poussés vers des CFA plus compétitifs et donc mieux dotés.

Une fois encore, ce projet de loi est surtout celui de la liberté des entreprises. Le relèvement de 11 à 250 salariés du plafond qui encadre la possibilité de bénéficier des aides régionales détournera l’aide à l’apprentissage de son but initial, au risque de voir ces aides dévoyées…

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