Intervention de Jacques-Bernard Magner

Réunion du 10 juillet 2018 à 14h30
Liberté de choisir son avenir professionnel — Article 1er

Photo de Jacques-Bernard MagnerJacques-Bernard Magner :

Madame la ministre, c’est un texte décevant et inquiétant que vous nous proposez ; mais ce n’est pas surprenant, car vous êtes guidée par une vision libérale du marché du travail, à laquelle vous ajoutez désormais la marchandisation de la formation.

Tout d’abord – je tiens à le dire ici –, comme d’autres, je regrette profondément que la commission de la culture, de l’éducation et de la communication n’ait été saisie que pour avis sur quelques articles, et non sur le fond de ce texte : l’avenir des jeunes, leur formation et leur orientation relèvent bien d’abord des préoccupations relatives à l’éducation et à la jeunesse de ce pays.

Par ailleurs, je constate que certains articles de ce projet de loi remettent en question la loi pour la refondation de l’école de la République, adoptée en juillet 2013. Or ce texte insistait sur le socle commun de connaissances, de compétences et de culture pour les jeunes, jusqu’à 16 ans au moins.

Ainsi, la création d’une classe de troisième « prépa-métiers » est, à mes yeux, une régression, comme l’attribution des moyens de la taxe professionnelle à des écoles privées qui seraient reconnues législativement, écoles dites « écoles de production ». Ces dispositions seraient une grave entorse aux principes de notre système éducatif.

Comme vous, madame la ministre, je souhaite le développement de la voie de l’apprentissage, qui relève de la formation initiale, au même titre que la formation scolaire. Mais son ouverture à la concurrence du marché ne me paraît pas la bonne solution. Vous voulez en confier la responsabilité aux branches professionnelles. J’ai de grandes craintes pour l’équité et l’égalité de traitement de la jeunesse de notre pays.

Pour ce qui concerne la formation professionnelle, ce n’est pas mieux. Vous proposez de faire de la formation un bien de consommation comme un autre, en réduisant ainsi les droits des personnes, et ce sans aucune garantie de qualité.

La suppression de la carte nationale des formations entraînera une concurrence territoriale, tout comme le recours aux prestataires privés dans le champ de l’information et de l’orientation des jeunes.

Désormais, la liberté de choisir son avenir professionnel sera plutôt la liberté de financer sa formation, selon la région dans laquelle on vit…

Soyons réalistes : la formation ne crée pas l’emploi, les moins qualifiés ne se forment pas spontanément, les entreprises n’investissent pas toujours d’elles-mêmes dans la formation, et les marchés ne se paient pas de bons sentiments.

En fait, votre projet ne libère pas les individus, mais obéit aux marchés. Là encore, je crains que votre texte ne laisse les plus faibles sur le bord du chemin.

Pour toutes ces raisons, mes collègues du groupe socialiste et républicain et moi-même avons déposé des amendements constructifs que nous défendrons au cours de ces débats.

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