Au premier abord, cet article a l’air évidemment formidable : garantir à toutes et à tous un droit à l’accompagnement tout au long de la vie. Pour un peu, on se prendrait à rêver d’un service public d’accompagnement des carrières, sauf que, le diable se cachant dans les détails, le texte prévoit surtout une ouverture à la concurrence du conseil en évolution professionnelle jusqu’ici organisé par des structures constituant le service public de l’emploi, au premier rang desquelles l’APEC et les missions locales.
L’article 3 ouvre ces prestations aux acteurs privés. C’est finalement assez logique, puisque depuis des années, le budget dédié aux structures assurant le conseil en évolution professionnelle est à la baisse : pour cette année, on parle de 270 millions d’euros pour un 1, 5 million d’actifs. Et encore, ce budget ne devrait pas être rapporté au nombre de bénéficiaires, mais à celui des personnes qui pourraient y prétendre, soit presque 30 millions…
On assiste, dans ce domaine comme dans d’autres, à une double dynamique menant à une privatisation : d’un côté, on assèche le service public et on le fait dérailler ; de l’autre, on commence par rendre possible la présence des acteurs privés jusqu’à ce que ces derniers s’imposent face au service public.
Madame la ministre, vous avez dit devant nos collègues de l’Assemblée nationale que votre seul souci était que « le CEP achève de prendre son envol, et qu’un conseil de qualité soit délivré à un maximum d’individus ».
Je suis très heureuse de constater que nous partageons une ambition commune. Néanmoins, je ne réussis pas à voir comment vous pouvez atteindre votre objectif, en détruisant le service public du conseil.
Cela me paraît d’autant plus compliqué, si l’on organise une mise en concurrence. En effet, celle-ci implique que les appels d’offres vont, comme trop fréquemment, ne s’intéresser qu’au prix. Certes, on peut discuter de l’appréciation trop souvent restrictive de la notion de mieux-disant, mais le constat montre que le prix est toujours le critère central des appels d’offres !
De fait, la mise en concurrence ne peut qu’entraîner une baisse de la qualité, quand le conseil est fourni dans le cadre d’une course à la rentabilité.