La suppression de la taxe d’habitation pèsera donc sur le déficit. Ce choix ne laisse pas d’inquiéter – le Sénat n’était pas demandeur en la matière – et nous éloigne encore un peu plus de la trajectoire budgétaire retenue par le Gouvernement et de nos engagements européens.
En outre, le scénario budgétaire du Gouvernement continue de ne tenir aucun compte de la reprise de la dette de la SNCF, alors que les conséquences budgétaires de cette opération à 35 milliards d’euros seront loin d’être négligeables, quelle que soit l’option retenue pour son traitement comptable.
Sur le plan de la maîtrise de la dépense publique, le ministre nous a dit attendre nos propositions. Je préfère pour ma part que le Gouvernement nous présente les siennes, puisqu’il s’agit ici de ses orientations. Le caractère extrêmement lacunaire des informations portées à la connaissance du Parlement est très préoccupant.
D’un côté, la trajectoire budgétaire continue de reposer sur un effort inédit – qu’il faudra tenir – de maîtrise de la dépense à l’échelle du quinquennat, la baisse devant dépasser 80 milliards d’euros.
De l’autre, les mesures d’économies restent très peu documentées. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Joël Giraud, que l’on ne peut soupçonner d’être dans l’opposition… La presse elle-même s’en est émue, elle qui très souvent semble mieux informée que le Parlement ! §Il suffit de lire ce que l’on y écrit sur les effectifs de Bercy. M. le ministre a apporté un démenti, mais nous aimerions connaître les vrais chiffres. En tout cas, les conclusions du programme Action publique 2022, dont la remise avait été annoncée pour le mois de février, avant d’être reportée de mois en mois, restent aujourd’hui totalement inconnues. Nous avons beaucoup de mal à savoir comment le Gouvernement compte réaliser ces quelque 80 milliards d’euros d’économies.
Parallèlement, de nombreuses mesures ont été confirmées ou annoncées par le Président de la République lors de son discours au Congrès, lundi à Versailles : lutte contre la pauvreté, mise en place du service universel, etc. Toutes ces mesures, qui me paraissent coûteuses, ne sont manifestement pas financées aujourd’hui.
Rien ne permet non plus de comprendre comment le Gouvernement parviendra à supprimer 50 000 postes sans revenir sur les engagements pris à l’égard des ministères prioritaires, notamment ceux liés à la sécurité.
À ce titre, avec le « tiré à part » de deux pages que vous nous avez transmis seulement hier, monsieur le ministre, le Parlement ne dispose que d’une information totalement lacunaire. Ainsi, contrairement à l’usage, il ne comprend aucune information relative aux plafonds d’emploi. L’esprit de synthèse dont vous faites preuve forcerait l’admiration s’il ne réduisait le Parlement à un rôle d’observateur, n’ayant d’autre source d’information que Les Échos…
Le document que vous nous avez transmis ne comporte pas non plus d’explications relatives aux évolutions des crédits des ministères, qui augmentent de 600 millions d’euros par rapport à la loi de programmation ! Il est donc, à ce stade, très difficile et prématuré de porter un jugement sur la crédibilité de la trajectoire budgétaire présentée par le Gouvernement, mais il est d’ores et déjà permis d’être inquiet.
À la veille du débat sur la procédure budgétaire et de la révision constitutionnelle, je suis quelque peu déçu que nous ne disposions pas des éléments d’information qui auraient pu nous permettre de faire de ce temps de l’évaluation un moment fort.