Lors des débats d’orientation des finances publiques locales, j’imagine que vous précisiez votre position.
Toujours est-il que vous n’avez toujours rien proposé, ce qui signifie sans doute que vous n’êtes pas prêts pour l’alternance : à part de grandes incantations, nous ne voyons pas grand-chose… L’élection présidentielle fut pourtant une période assez riche en ce qui concerne la volonté réformatrice de baisser la dépense publique.
Je voudrais apporter quelques corrections. En effet, j’ai entendu certains propos qui n’étaient pas tout à fait vrais, ou même qui étaient carrément faux.
En 2017, nous n’avons pas baissé les crédits consacrés aux contrats aidés. Nous avons rajouté 190 millions d’euros, parce que le gouvernement précédent avait consommé 70 % de l’enveloppe sur les quatre premiers mois de l’année – sans doute l’élection présidentielle y a-t-elle été pour quelque chose, à moins qu’il ne s’agisse d’un pur hasard… Nous avons donc dû annuler des crédits dévolus à d’autres ministères, plutôt que d’augmenter les impôts, pour pouvoir payer les contrats aidés que le gouvernement précédent avait consentis.
Certes, le débat sur l’APL est différent. Nous avons eu l’occasion d’en débattre lors de l’examen des lettres de plafond de l’ancien Premier ministre à son ministre du logement. Mais il s’agit d’un autre débat. Il est totalement faux de dire que nous avons réduit les dépenses consacrées aux contrats aidés. Nous les avons même augmentés, raison pour laquelle nous avons dû procéder à d’autres annulations de crédits. Il ne s’agit pas d’un bon procès.
Il est certain que la politique que suivra le Gouvernement en matière de contrats aidés en 2018 et en 2019 sera différente de celle de 2017, mais, en l’espèce, nous parlons bien de l’année 2017.
L’élasticité des prélèvements obligatoires est de 1, 4, ce qui est en effet exceptionnel. J’ai entendu le chiffre de 10 milliards d’euros de recettes fiscales nouvelles. Il s’agit en fait de 2, 5 milliards d’euros d’impôt sur les sociétés supplémentaires et de 1 milliard d’euros de TVA dans les quinze derniers jours de l’année 2017.
Je n’ai d’ailleurs « dégelé » les crédits du ministère des armées – les fameux 700 millions d’euros qui nous avaient valu un été de débats politiques et médiatiques assez amusants – qu’entre Noël et le Nouvel An, une fois que j’ai été certain de disposer des bons chiffres. En effet, peu de personnes pensaient qu’une telle accélération de la TVA fût possible. Celle-ci explique d’ailleurs sans doute le ralentissement du premier trimestre 2018, en termes de croissance et de recettes fiscales, ralentissement qui n’inspire donc aucune inquiétude particulière au Gouvernement.
L’année dernière, à la même époque, quand le ministre de l’économie et des finances et moi-même avons rencontré les équipes du Trésor, on nous dépeignait une situation très alarmiste. L’accélération de croissance et de recettes fiscales de la fin de l’année a fait dire à M. Raynal, défenseur de François Hollande dans cet hémicycle, que nous avions pris des mesures inutiles. Mais il est beaucoup plus facile de dire cela au mois de juillet 2018 qu’au moment où la situation financière nous incitait à prendre des mesures encore plus drastiques que celles que nous avons adoptées !
En fait, nous avons été en partie sauvés, si j’ose dire, par des recettes accélérées. Il s’agit toutefois non pas de 10 milliards d’euros, mais de 2, 5 milliards d’euros d’impôt sur les sociétés, de 1 milliard d’euros de TVA et de 500 millions d’euros d’impôt sur le revenu, soit au total 4 milliards d’euros. C’est considérable, mais cela représente seulement 0, 2 point de déficit. Il y a loin du différentiel de 0, 8 point qui nous séparait des fameux 3 %… Par conséquent, si vous me permettez ces propos dans une enceinte laïque, remettons l’église au milieu du village.
Vous avez également évoqué l’exit tax, à propos de laquelle j’entends bien des chiffres et des incertitudes. Pour répondre clairement, nous ne renonçons pas aux recettes des années précédentes, ni à celles qui sont en cours – c’est au ministre de l’économie et des finances qu’il revient de présenter la mesure fiscale proposée par le Président de la République. Nous renonçons aux recettes futures, soit entre 20 et 30 millions d’euros par an.
À cet égard, il faut rétablir la vérité des chiffres : je le répète, la base taxable de l’exit tax, comme pourra le vérifier M. le rapporteur général de la commission des finances, ne représente qu’entre 20 et 30 millions d’euros par an. Je comprends le débat politique et symbolique qui peut s’ouvrir sur l’attractivité, mais les enjeux ne se chiffrent pas en milliards d’euros. Ne confondons pas tout.
La Cour des comptes a évoqué une incertitude de 1, 9 milliard d’euros, soit environ la moitié des crédits gelés, qui s’élèvent à 3, 6 milliards d’euros.
Sur les quinze dernières années, aucun gouvernement n’a présenté une telle situation au mois de juillet de l’année concernée. Certes, nous n’avons pas connu de crise économique, ni les difficultés que d’autres gouvernements ont dû affronter. Je ne voudrais donc pas comparer ce qui est incomparable. Toutefois, le Premier président de la Cour des comptes a trouvé notre budget sincère et considéré que le montant de mise en réserve de 3 % était exceptionnellement bas – c’est le plus bas de l’histoire budgétaire depuis la LOLF –, sans que nous ayons « dégelé » la moindre ligne de crédit.
Sur les 340 milliards d’euros budgétés, et eu égard aux incertitudes qu’a connues notre pays en matière de sécurité, d’hébergement d’urgence ou d’engagement dans des opérations extérieures, cette marge de 1, 9 milliard d’euros est tout à fait raisonnable. Nous ne déraperons pas.
Nous avons non seulement présenté un budget sincère, mais nous avons suivi l’intégralité de son exécution de manière extrêmement attentive. Comme chacun aura pu le constater, j’ai tenu ma promesse de ne pas présenter de décret d’avance au Parlement.