Intervention de Annie Jarraud-Vergnolle

Réunion du 9 janvier 2008 à 21h45
Service public de l'emploi — Article 1er

Photo de Annie Jarraud-VergnolleAnnie Jarraud-Vergnolle :

Notre amendement propose de donner une qualification précise à ce qui va naître de la fusion de l'ANPE et des ASSEDIC et que le projet de loi appelle « institution ».

Jusqu'à présent, nous pensions que le terme « institution » était réservé aux institutions de la République, telles que décrites dans la Constitution. Apparemment, le mot semble promis à une nouvelle fortune, puisqu'il désignerait une « chose », permettez-nous de la nommer ainsi pour le moment, issue de la fusion d'une association et d'un établissement public.

En réalité, ce choix d'un mot innovant dans ce domaine, n'est pas anodin. Il vise à contourner une explication claire sur la nature exacte de cette institution.

Juridiquement, c'est le mariage de la carpe et du lapin, avec tous les problèmes que cela pose. Mais, s'il s'agit, comme vous le prétendez, de la réforme du service public de l'emploi, pourquoi ne pas qualifier l'organisme créé d'établissement public ? Cela n'empêcherait pas celui-ci d'être chargé d'une mission de service public. C'est même la règle qui prévaut.

Cette ambiguïté, que l'on retrouve tout au long des divers aspects de ce projet de loi, ne laisse pas d'être inquiétante pour l'avenir, et ce d'autant plus que rien dans le texte n'indique que cette institution aura un rôle primordial, prioritaire, dans une éventuelle politique de l'emploi. Elle ne sera, selon la rédaction du futur article L. 311-7, qu'une « institution », ce qui sous-entend clairement qu'il y en aura d'autres, que ce soit des entreprises privées de placement, des entreprises d'intérim, et bien au-delà de ce que nous connaissons déjà.

Mais que va-t-il se passer dans la durée ? Comment cette structure va-t-elle évoluer face aux opérateurs privés auxquels il est expressément prévu qu'elle ait recours ? Comment vont être traités les publics de demandeurs d'emploi ? Cette institution ne risque-t-elle pas de se voir confier les publics les plus éloignés de l'emploi, alors que d'autres organismes géreront les autres ?

Mais il n'y a pas que le placement ; il y a aussi le contrôle. Nous avons vu récemment comment le Gouvernement envisageait de régler le contrôle des arrêts maladie des salariés.

La dernière loi de financement de la sécurité sociale a prévu que des médecins mandatés et payés par l'employeur pourront adresser leurs conclusions sur un patient en arrêt maladie au médecin contrôleur de la sécurité sociale, qui, selon les caisses pour le moment, devra s'y conformer sans autre formalité.

Déjà, en matière d'emploi, les officines de placement privées avec lesquelles l'ANPE a contracté expliquent à des demandeurs d'emploi en difficulté qu'ils doivent accepter l'emploi proposé sous peine de suspension de l'allocation. Nous sommes dans le même schéma.

Il vous suffira d'inscrire dans un prochain texte que la décision de suspension du versement du revenu de remplacement ne fait pas l'objet d'une contre-expertise, mais est prise sur proposition de l'agent de contrôle, quel que soit le statut de son organisme, et le tour sera joué !

Le secteur privé aurait la haute main sur l'ensemble de la protection sociale.

Nous souhaitons donc que le choix soit clairement fait dès à présent de créer un établissement public national qui gère l'ensemble des actes de placement, d'indemnisation et de contrôle, dans le cadre d'un service public de l'emploi et au service d'une politique nationale de l'emploi.

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