Intervention de Nadine Grelet-Certenais

Réunion du 16 juillet 2018 à 10h00
Liberté de choisir son avenir professionnel — Article 66

Photo de Nadine Grelet-CertenaisNadine Grelet-Certenais :

Les articles 65 bis à 65 quater, insérés après l’adoption d’amendements du Gouvernement à l’Assemblée nationale, prévoient l’ouverture de la totalité des emplois fonctionnels des collectivités locales à des contractuels.

Au-delà des motifs indiqués dans l’objet de cet amendement, il est notable que ces mesures, si elles étaient votées, entraîneraient une transformation majeure de l’organisation des collectivités, sans que l’impact en soit mesuré à ce jour.

Une conséquence serait très certainement la disparition progressive du statut de la fonction publique territoriale.

Pour bien comprendre, il faut rappeler la fonction essentielle des directeurs généraux des services. Considérer que tous les postes dirigeants peuvent être occupés par un contractuel, y compris dans les collectivités de petite dimension, c’est considérer que le rôle des directeurs généraux est dénué de lien avec les responsabilités régaliennes que les collectivités mettent en œuvre au quotidien ; c’est aussi considérer que la gestion des collectivités ne fait pas appel, jour après jour, aux prérogatives de puissance publique au travers de ses fonctionnaires.

Ce serait le premier pas vers une sorte de désacralisation du rôle même des collectivités dans le modèle français. Banaliser à ce point le contrat public, c’est faire de même pour le contrat privé, et donc in fine banaliser le statut de la fonction publique.

Il serait au contraire urgent de travailler sur les missions des fonctionnaires et de conforter leurs spécificités et leur capacité à gérer la complexité, fruits d’un apprentissage que l’université ne permet pas. Leur expertise est appréciée, recherchée par les associations d’élus.

La présence généralisée de dirigeants contractuels exposera la collectivité à des conflits d’intérêts potentiels plus nombreux et à des conséquences pénales importantes. Elle soumettra ces postes à une pression politique accrue, là où le statut a jusqu’à présent joué un rôle de garde-fou.

Il n’est nul besoin de recrutements politisés pour bien mettre en œuvre les projets politiques ; loyauté et neutralité ne peuvent s’opposer. Ces principes sont le ciment du lien de confiance entre les élus et les cadres dirigeants. Ce lien qui existe entre un exécutif et sa direction générale est complexe et ténu, il fonde une grande partie de la légitimité du dirigeant.

Il est bon de rappeler qu’avant 1946 – dans l’ancien monde… – il n’y avait que peu de règles et pas de réel statut. Chacun pouvait être recruté dans un service public. Les historiens peuvent nous éclairer, sans remonter aux fermiers généraux, sur les dérives de la privatisation de la chose publique, à l’échelon tant national que local. Avant la mise en place du statut, le clientélisme politique existait largement.

Ce sont les raisons pour lesquelles nous proposons la suppression de cet article.

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