Intervention de Catherine Morin-Desailly

Réunion du 18 juillet 2018 à 21h30
Évolution du logement de l'aménagement et du numérique — Article 15

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

Pour compléter les propos de M. le rapporteur pour avis de la commission de la culture, je voudrais signaler les quelques cas pour lesquels il est prévu de passer à l’avis simple de l’ABF : ils sont suffisamment nombreux pour qu’il soit porté atteinte au patrimoine de façon irréversible. J’en veux pour preuve que la plupart des sites inscrits qui ont été soumis à la procédure d’avis simple dans les années 1980 ont été désinscrits par la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, compte tenu des dégradations qu’ils avaient subies sous les effets de la pression foncière.

Bien sûr, les relations entre les élus et les ABF ne sont pas toujours aisées, notamment parce qu’ils sont soumis à des contraintes souvent opposées, les unes relevant du temps court de l’urbanisme, les autres du temps long du patrimoine. On cite ainsi fréquemment, au cours des débats, des exemples d’inflexibilité et de manque de discernement de certains ABF.

Il faudrait tout de même opposer à ces exemples, dans un esprit de juste équilibre, tous ceux dans lesquels la décision de l’ABF a permis de protéger le maire des pressions dont il était l’objet.

Pourquoi ne cite-t-on jamais les cas dans lesquels l’intervention de l’ABF a permis non seulement de protéger un patrimoine historique qui allait être détruit, mais aussi de réduire les coûts d’opération ?

Permettez-moi de vous donner un exemple : la réhabilitation du couvent de Kerlaouen, à Landerneau, pour y installer un institut médico-éducatif, un IME, est tout à fait emblématique à cet égard. Alors qu’il était initialement prévu de le raser, le couvent a pu être sauvé, ce qui a permis de conserver tout un pan de l’histoire de la ville. Quant aux travaux, ils ont coûté 1 million d’euros de moins à l’opérateur que ce qui était prévu dans son projet initial. C’est la preuve que la préservation du patrimoine n’est pas nécessairement synonyme d’alourdissement des coûts, quoi qu’on en pense.

Mes chers collègues, prenons garde que ces premières dérogations ne réduisent à néant cinquante ans d’efforts pour préserver un patrimoine qui, vous le savez, constitue une part importante de l’âme de notre pays, de nos villes, de nos villages, de nos centres-bourgs et de nos campagnes, et qui participe à la qualité de vie recherchée par nos concitoyens.

Ce patrimoine est aussi, bien sûr, un potentiel et un atout considérables pour le développement économique et touristique de nos territoires, comme l’avaient fort bien rappelé Martin Malvy et notre ancien collègue Yves Dauge dans leurs rapports sur la revitalisation des centres-bourgs.

Ce débat a été tranché, M. le rapporteur pour avis l’a rappelé. Nous avions en effet beaucoup débattu, lors de l’examen de la loi LCAP, votée à la quasi-unanimité voilà pratiquement deux ans. Je vous rappelle que le Sénat avait alors tenu la plume. Il est d’ailleurs reconnu par toutes les associations pour avoir su faire évoluer la législation, notamment en faveur d’un meilleur équilibre avec le rôle des élus.

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