Je propose, au travers de cet amendement, la suppression de l’article 15, et ce n’est pas seulement pour le symbole ni pour des raisons corporatistes ou de défense des intérêts d’une profession particulière.
Je m’inquiète que, au détour de diverses lois, on entame sans cesse davantage la capacité d’intervention des ABF. Je le sais, il peut y avoir des situations de blocage entre les élus et les ABF, mais je suis sincèrement inquiète pour notre patrimoine. Sa pérennité, la transmission de ce qui constitue l’héritage commun artistique, historique ou naturel de tous les Français doit être notre préoccupation majeure.
Nous avons la chance d’avoir réussi, depuis cinquante ans, à arrêter son érosion et sa destruction, grâce à la volonté politique forte de certains locataires illustres de la rue de Valois. Le régime d’aménagement et de travaux dans les zones protégées en France a été revu et simplifié, voilà tout juste deux ans – nous sommes plusieurs à l’avoir dit –, par la loi LCAP. On a maintenu les avis liants de l’ABF là où ils avaient encore cours, tout en renforçant les différentes instances de dialogue et de concertation du secteur.
Aujourd’hui, on profite d’un texte sur la construction pour soumettre à un avis simple de l’ABF certains travaux – certains, seulement, il est vrai – réalisés en zone patrimonialement protégée : l’installation d’antennes de téléphonie mobile ou de matériel de diffusion du très haut débit par voie hertzienne, et l’habitat indigne, insalubre et menaçant ruine avec arrêté de péril.
La vérité est que l’on ouvre la boîte de Pandore. Une fois la légitimité de l’ABF entamée, il sera plus facile de continuer à l’éroder pour d’autres types de travaux. L’avis dit « conforme » ne sera ainsi bientôt qu’un vieux souvenir, et le patrimoine disparaîtra ou tombera en ruine.
Dans cet article, plusieurs autres dispositions nous posent problème. Dans le cadre du projet de décision que l’autorité compétente pourrait proposer à l’ABF pour une autorisation de travaux, la rapporteur au fond de la commission des affaires économiques a substitué un simple avis consultatif à l’accord de l’ABF prévu par le projet de loi initial.
Autre disposition qui nous gêne : le silence du préfet de région vaudra désormais acceptation de la décision de l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation de travaux, alors que, actuellement, il vaut rejet. Cette inversion est également de nature à fragiliser la capacité d’intervention des ABF, puisqu’il faudra une décision explicite du préfet pour valider son avis négatif sur un projet de travaux.
Pour toutes ces raisons, je demande la suppression de l’article 15.