Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 3 mai 2011 à 14h30
Gestion effective du risque de submersion marine — Discussion de deux propositions de loi dans le texte de la commission

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils :

Nous manquons clairement de visibilité sur les recettes de cette cotisation additionnelle à la cotisation principale des assurances qui est destinée à garantir le risque de catastrophe naturelle.

Monsieur le secrétaire d'État, que devient l’excédent qui ne sert ni à financer le fonds Barnier ni à indemniser les victimes ? Quel est son montant ? Jusqu’où pourra-t-on augmenter le taux de prélèvement sur ces cotisations additionnelles sans accroître la facture de l’assuré ? Telles sont les questions que nous nous posons, d’autant que, il faut s’en souvenir, lors de la grande sécheresse de 2003, certaines des ressources de ce fonds avaient été reversées au Fonds de garantie des assurances ou à l’État.

Le régime CAT-NAT doit rester solidaire, comme c’est le cas aujourd’hui. Néanmoins, il nous faut nous interroger. Ne devons-nous travailler que sur la réparation des dommages ? N’est-il pas indispensable d’imposer des obligations lors de la construction de biens ? Ne serait-il pas intéressant d’introduire des modulations sur le montant de la prime d’assurance dont bénéficieraient les propriétaires qui respectent des contraintes spécifiques pour la construction de leur bien, et cela afin d’atténuer leur vulnérabilité aux risques ? Ces mesures, que je propose aujourd'hui, je les ai aussi défendues devant les responsables des sociétés d’assurance.

La construction d’une maison sur pilotis ou simplement comportant un étage dont le niveau est supérieur à celui des plus hautes eaux connues entraîne des coûts supplémentaires, certes. Toutefois, nous le savons, un bien qui a été mieux conçu, en y intégrant le risque, est aussi moins dégradé en cas de catastrophe.

Ce système incitatif, qui pousserait les propriétaires à faire le choix de l’adaptation à leur environnement et de la prévention des risques, participerait du nécessaire apprentissage de la culture du risque par tous les acteurs : habitants, entreprises, élus.

Par ailleurs, je regrette le silence du texte sur la loi Littoral. En effet, cette dernière a tout de même été significativement amoindrie en 2005 ; il serait temps de revenir sur les assouplissements accordés alors. En effet, l’affaiblissement et le contournement de la loi Littoral ont aussi accru les risques encourus par les populations.

La pente naturelle qui consiste à oublier l’existence de risques sur la côte, du fait de l’attrait de celle-ci, de son climat souvent clément, de la proximité des plages, de l’intérêt, y compris économique, que trouvent nos concitoyens à s’y installer, pose véritablement problème. Il convient de diffuser, ou de réintroduire, cette culture du risque dans les régions littorales.

Je terminerai mon intervention en soulignant que la culture du risque reste insuffisante dans notre pays.

La création d’une journée nationale de prévention des risques naturels est sans doute un premier pas, même s’il est modeste. Encore faut-il donner du sens et de la lisibilité à un tel événement et le coordonner avec les dispositifs existant à l'échelon international, qui sont brièvement évoqués dans le rapport pour avis de la commission des lois. Nous proposerons d'ailleurs un amendement en ce sens.

Au-delà, je me dois de répéter les propos que j’avais déjà tenus devant la mission d’information : il est indispensable de prévoir des temps de formation, non seulement pour les enseignants chargés de la sensibilisation et de l’éducation au risque, mais aussi pour les élus locaux, dont la responsabilité est de plus en plus souvent engagée en la matière. Tant qu’aussi peu d’acteurs se seront appropriés cette question sur le terrain, ce ne sera pas en décrétant une journée nationale de la prévention des risques naturels que cette dernière deviendra subitement effective et qu’elle sera appréhendée par tous.

Si les deux propositions de loi identiques ont le mérite de répondre au drame de la tempête Xynthia – elles visent à améliorer un certain nombre de dispositions des codes de l’urbanisme et de l’environnement afin de rendre plus cohérente l’articulation des documents d’urbanisme avec les plans de prévention des risques – et de donner aux préfets davantage de possibilités pour agir et participer à la réduction de ces risques, l’essentiel des efforts de financement est laissé aux collectivités.

En outre, une fois de plus, les ressources qu’il est prévu de mobiliser ne sont pas pérennes. Ainsi, un certain nombre de mesures seront malheureusement inopérantes. Pis, elles risquent d’être vécues par les collectivités comme un nouveau fardeau si celles-ci ne se voient pas attribuer des moyens supplémentaires.

Ce texte marque une étape, me semble-t-il, mais il faut accorder les ressources financières et humaines nécessaires et définir les mesures que notre société est prête à mettre en œuvre pour que soit intégré le risque, dès le stade de l’aménagement de nos territoires et de la construction des bâtiments.

Faute de réponse à ces questions, nous nous abstiendrons sur ce texte, même si nous souscrivons à ses orientations.

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