Les articles 48 et 49 du présent projet de loi, dont l’un supprime le dispositif d’encadrement des loyers de la loi ALUR de 2014 et l’autre réintroduit un dispositif similaire, mais temporaire et optionnel, ne constituent en fait qu’une acrobatie politique visant à inhumer progressivement l’encadrement des loyers. Le projet de loi fait prévaloir un très abscons « droit de propriété » que nous impose la doctrine du libéralisme sur le droit au logement de tous et de chacun consacré par le préambule de la Constitution de 1946.
Pour notre part, nous avions soutenu ce principe d’encadrement des loyers avec des réticences. En effet, s’il permet de réguler de manière efficace l’évolution des loyers, il ne permet cependant pas d’en réguler le niveau, ce qui était le propre du dispositif ALUR que cet article vise à supprimer. Pourtant, la cherté du logement en France conduit à des réalités socio-économiques inacceptables : 54 % des ménages consacrent plus de 30 % de leurs revenus au logement ; parmi eux, 15 % y consacrent même plus de 60 % ! La situation est en constante aggravation, avec une hausse des loyers de plus de 50 % en dix ans sur le territoire français, voire de 70 % à Lille !
Ce dont nous avons besoin, c’est d’une régulation offensive et pérenne du niveau des loyers, qui serait basée non pas sur le loyer médian comme le prévoyait la loi ALUR – puisque celui-ci incorpore des réalités très différentes du marché locatif –, mais sur un loyer qui reflète les réalités sociales et le niveau de vie des locataires.
Pour ce faire, nous devons créer un cadre juridique qui permette aux loyers actuels d’être baissés efficacement et donner une place plus importante aux associations de locataires dans le cadre des recours juridiques. Je le rappelle, à Paris, seulement une centaine de recours ont été déposés pour loyers abusifs durant toute la période de l’encadrement des loyers alors qu’environ un tiers des appartements proposés à la location ne respectait pas le dispositif. En cause, le rapport de force défavorable aux locataires, qui craignent que leur bail soit non renouvelé, leur caution conservée ou les travaux retardés.
Le pire c’est que, depuis l’abandon de ce dispositif, les prix ont largement augmenté comme en témoigne une étude de plusieurs associations.
Encadrer les loyers, c’est protéger les classes moyennes qui ne peuvent pas accéder au parc locatif social, c’est augmenter leur pouvoir d’achat et c’est donc, a fortiori, relancer la consommation et l’emploi.
La suppression de ce dispositif et son non-remplacement par un dispositif plus offensif constituent donc une aberration sociale.