Il me semble opportun que je prenne la parole avant l’examen des amendements.
Je veux d’abord rappeler les intentions et les objectifs du Gouvernement.
Je veux également dire à Martial Bourquin, à Rémy Pointereau et à tous ceux qui ont travaillé sur le sujet que, dès que j’ai pris la responsabilité de ce ministère, j’ai souhaité que nous lancions une politique dirigée vers les villes moyennes. Bien évidemment, nous ne nions pas les problèmes qui peuvent exister dans les petites villes, dont les centres-bourgs aussi sont parfois en difficulté ; j’y reviendrai.
Pourquoi avoir lancé cette politique à destination des villes moyennes ? Parce que, comme nombre d’entre vous, et pour avoir présidé, pendant seize ans, une agglomération moyenne très éloignée des métropoles, je connais, dans une perspective d’aménagement du territoire, les difficultés de ces pôles de centralité, situés entre les métropoles et pour lesquels pratiquement rien n’avait été fait depuis le contrat de ville moyenne mis en place dans les années soixante-dix par le Président Giscard d’Estaing.
Il nous a donc paru important d’agir, et de le faire de la manière la plus efficace possible.
Je ne verserai ni dans les procès d’intention ni, cher Rémy Pointereau, dans les enjeux politiques. De fait, tout est politique ! Certes, les élections municipales auront lieu bientôt, mais les réalités, elles, perdureront.
M. le secrétaire d’État et moi-même avons considéré qu’il était urgent de mettre en place des dispositifs simples d’emploi pour coordonner des actions et flécher un certain nombre de crédits permettant aux villes moyennes d’accélérer la réalisation de leurs projets, voire d’en réaliser de nouveaux.
J’entends parler de « recentralisation ». Drôle de recentralisation, puisque nous coordonnons les actions des différents partenaires – Action Logement, qui participe à hauteur de 1, 5 milliard d’euros, la Caisse des dépôts et consignations, qui s’engage à mobiliser 1 milliard d’euros d’argent frais et 700 millions d’euros de prêts, et l’Agence nationale de l’habitat, à hauteur de 1, 2 milliard d’euros, fonds qui, pour l’essentiel, ne sont pas « recyclés », auxquels s’ajoute l’utilisation, selon les cas, de la DSIL ou de la DETR – avec des comités de projets, à l’échelle de la ville moyenne et de son intercommunalité – les deux signatures sont nécessaires –, sous la présidence du maire de la collectivité en question, et nous donnons instruction aux services de l’État d’avoir pour seul objectif de faciliter les choses. Curieuse recentralisation !
J’entends que nous aurions pu faire plus, que nous aurions opéré une sélection… En réalité, les villes moyennes que nous avons retenues l’ont été sur proposition des préfets, et nous avons recherché une cohérence en matière d’aménagement du territoire, en incluant, bien sûr, l’outre-mer et sans fixer de seuils précis, parce que les pôles de centralité comptent parfois moins de 20 000 habitants. Ce travail, nous l’avons fait en toute transparence.
On me dit que plus de 700 villes seraient concernées. Mais, cher Martial Bourquin, pourquoi n’avez-vous pas agi avant ? J’accepte la critique – au reste, il est vrai que ce que l’on fait n’est jamais suffisant –, mais l’impact du plan « Action cœur de ville » sera cent fois plus fort que ce qui avait été prévu pour les centres-bourgs il y a trois ans !
La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat, que je respecte beaucoup, pour en avoir été le vice-président durant plusieurs années, a travaillé efficacement. Elle a formulé un certain nombre de propositions.
Comme je m’y étais engagé, nous allons reprendre le maximum des dispositions de la proposition de loi sénatoriale. Au demeurant, le texte de la commission reprend d’ores et déjà une partie de ces propositions, mais, cher Rémy Pointereau, reprendre le maximum ne veut pas dire tout reprendre ! Nous ne sommes pas d’accord sur tout, comme je m’en expliquerai.
De grâce, ne nous faites pas de procès d’intention ! J’ai reçu suffisamment de courriers d’honorables parlementaires demandant une inclusion dans le programme « Action cœur de ville » pour constater que celui-ci correspondait à un véritable besoin. Certains d’entre vous, et je pense à des sénateurs de tous les groupes politiques, ne me démentiront pas.
Très concrètement, ces moyens vont nous permettre d’agir. On me dit que c’est du saupoudrage, mais 5 milliards d’euros, même divisés par 222, permettent de faciliter les choses et d’avancer efficacement.
Je tiens à préciser que les opérations de revitalisation de territoire, les ORT, ne sont pas simplement ouvertes aux 222 villes qui ont été retenues par le plan « Action cœur de ville ». Contrairement à ce que j’ai entendu, elles peuvent être décidées et votées à l’échelle de toutes les villes qui souhaitent, par là même, bénéficier de moyens d’action.
Je suis totalement en désaccord avec certaines de vos propositions, par exemple l’unanimité à la commission nationale d’aménagement commercial, la CNAC. Je m’en expliquerai.
Il est normal que le Gouvernement, dans sa politique, tienne compte de vos propositions et en reprenne certaines. D’ailleurs, nous l’avons déjà fait et je n’exclus pas que nous le fassions de nouveau à l’avenir…
Cependant, notre travail de coordination doit tenir compte de l’intérêt des villes qui connaissent des difficultés depuis très longtemps, difficultés dont non seulement les gouvernements successifs, mais aussi certains élus locaux sont collectivement responsables.
La réalisation, au fil des années, de nombreuses zones commerciales en périphérie a correspondu à une évolution sociétale extrêmement forte, mais dans certains cas, elle est allée trop loin. Nous sommes tous conscients qu’il est désormais nécessaire d’apporter des correctifs.
Cependant, comme André Marcon, président honoraire des chambres de commerce et d’industrie de France, à qui nous avons confié une mission sur ce sujet, nous avons conclu qu’il n’était pas opportun d’imposer un moratoire national par la loi, parce que les situations sont diverses selon les territoires.
En revanche, il faut essayer de corriger les excès du passé, en donnant aux collectivités territoriales davantage de moyens pour rétablir les équilibres. Il me semble que beaucoup reconnaissent l’importance de cet enjeu.
Puis est arrivé le e-commerce, évolution à la fois technologique, sociétale et économique, qui, à nouveau, bouleverse la donne, avec un certain nombre de grands opérateurs qui réalisent des bénéfices sans en faire profiter très fortement les territoires, et c’est un euphémisme.