Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, autant le dire sans détour, si le terrorisme en Europe n'est malheureusement pas un phénomène nouveau, et si les préoccupations de l'Union sur ce sujet ne datent pas d'hier - elles étaient déjà présentes dans le traité d'Amsterdam et lors du Conseil européen de Tampere - la mise en place par l'Union de dispositions antiterroristes, au niveau tant législatif qu'opérationnel, s'est largement accélérée depuis le 11 septembre 2001 et le 11 mars 2004.
C'est un fait, le souvenir de ces tragiques évènements nous rappelle chaque jour la nécessité d'agir. A ce titre, la décision du Conseil européen de faire du 11 mars une journée européenne de commémoration des victimes du terrorisme est à la fois l'expression de la force de ce souvenir, de notre engagement à lutter contre ce fléau, et, surtout, de la solidarité de tous les membres de l'Union.
Pour répondre efficacement aux risques permanents de nouveaux attentats, il est clair pour tous que les Etats ne peuvent plus agir seuls et isolément.
Quel que soit le domaine, à commencer par la lutte contre le financement du terrorisme, contre le cyberterrorisme, contre le bioterrorisme, les poursuites judiciaires et policières, qui deviennent transfrontières, en passant par la protection des infrastructures et la sécurité des transports, pour finir par les plans d'urgence sanitaire, nous ne pouvons plus nous contenter d'agir à l'échelle nationale. L'approche globale s'impose.
Nous avons le devoir de combiner tous les outils et toutes les méthodes que nous offrent la coopération et l'intégration de l'Union européenne : harmonisation des législations, approche intégrée, coordination de la coopération, développement de l'organisation opérationnelle des enquêtes et des poursuites communes sur la base du mandat d'arrêt européen, établissement d'un système d'alerte rapide global, comme ARGUS, et de systèmes d'échanges des informations... On le voit, les options sont nombreuses. Prenons garde, cependant, à force de les multiplier, de ne pas transformer cet atout pour l'Europe en un handicap.
Monsieur le ministre, ne disposant que d'un temps limité pour vous questionner sur l'avancée effective des mesures européennes antiterroristes, je me concentrerai sur quelques-uns de ses aspects.
Je voudrais, tout d'abord, revenir rapidement sur ce que l'on peut déjà considérer comme de grandes avancées pour la France et pour l'Europe.
Première avancée, il me semble nécessaire de souligner l'importance de la définition du terrorisme formulée dans la décision-cadre du 13 juin 2002. Elle est importante à un double titre.
D'une part, grâce à cette définition européenne du terrorisme, on peut aujourd'hui poursuivre ces infractions de la même façon sur tout le territoire de l'Union. Avant l'adoption d'une telle définition, seuls quelques Etats européens, dont la France, disposaient d'une législation spécifique au terrorisme.
D'autre part, cette définition fait date. En effet, comme le rappelle un récent rapport d'information de l'Assemblée nationale, elle est « le premier instrument international à définir un acte terroriste par référence au but poursuivi ».
C'est le caractère intentionnel qui définit l'acte terroriste. Jusqu'alors, on ne faisait qu'incriminer des actes et des comportements sans définir leur élément essentiel, à savoir le « but terroriste ». Je rappelle que cette définition emprunte beaucoup à notre législation nationale.
Quoi qu'il en soit, cette réalisation décisive est bien la preuve que, motivée par une puissante volonté politique, l'Union n'est ni faible ni chimérique, et qu'en cherchant à relever ses propres défis, elle peut aussi montrer la voie.
Deuxième avancée, la création d'un mandat d'arrêt européen. Transposé en droit français depuis à peine un an, il a modifié en profondeur le droit et les usages relatifs à l'extradition entre les Etats membres. Ce n'est pas rien ! Le principe de la double incrimination a été supprimé, ainsi que les phases politique et administrative des procédures d'extradition, lesquelles s'en trouvent, dès lors, grandement facilitées.
Le résultat est clair : là où l'exécution d'une extradition prenait en moyenne plus de neuf mois, nous sommes passés aujourd'hui à un mois et demi. C'est une grande avancée !