Intervention de François Pillet

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 25 juillet 2018 à 8h30
Audition de la fédération de force ouvrière fo organisation professionnelle de policiers

Photo de François PilletFrançois Pillet, président :

Cette audition est ouverte à la presse et au public. Elle est diffusée en direct et sera disponible en vidéo à la demande sur le site du Sénat, et elle fera l'objet d'un compte rendu publié. Je rappelle que notre commission est dotée des pouvoirs d'une commission d'enquête. Je vous propose de prendre la parole pour un propos liminaire, puis les rapporteurs et les membres de la commission vous poseront des questions.

Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, le général Richard Lizurey prête serment.

Général Richard Lizurey, directeur général de la gendarmerie nationale. - Je vous remercie de votre invitation ; je suis heureux d'avoir l'opportunité de m'exprimer, d'expliquer un certain nombre de choses et de clarifier certaines incompréhensions qui ont pu être véhiculées ici ou là.

Je veux tout d'abord rendre hommage aux 30 000 membres de la réserve de la gendarmerie nationale. Ce sont des personnes de tous statuts et de tous âges, qui prennent sur leur temps libre pour renforcer les unités de la gendarmerie et contribuer à la sécurité de nos concitoyens sur le territoire. Ces réservistes sont extrêmement méritants ; ils sont actuellement engagés de manière très forte tant pour la sécurité des zones estivales que pour le Tour de France. Ils ont aussi été engagés de manière exceptionnelle à l'occasion de l'ouragan Irma, à Saint-Martin. En 2017, quatre-vingts d'entre eux ont été blessés en service, dont vingt à la suite d'une agression. Sans nos réservistes, nous ne pourrions pas fonctionner de manière optimale ; je les en remercie, je leur exprime toute ma reconnaissance.

La réserve militaire de la gendarmerie a deux composantes globales : la réserve opérationnelle et la réserve citoyenne. La réserve opérationnelle renforce au quotidien l'action de la gendarmerie ; les militaires de réserve accomplissent les missions du personnel d'active à l'exclusion du maintien de l'ordre. Elle compte 29 847 volontaires titulaires d'un contrat. En moyenne, depuis le début de l'année, 1 670 réservistes renforcent chaque jour nos unités territoriales.

Le réserviste opérationnel, dit « de sécurité publique » - celui que vous rencontrez dans la rue -, est soumis aux mêmes droits et aux mêmes devoirs que les militaires d'active : il est placé dans l'ordre hiérarchique, il a le même statut, il est détenteur d'un grade soumis aux règles classiques d'avancement.

Il existe, au sein de la réserve opérationnelle, une catégorie particulière de réservistes, les spécialistes, qui est prévue à l'article L. 4221-3 du code de la défense. Ces volontaires ont vocation à exercer des fonctions particulières déterminées, correspondant à des qualifications ou à des expériences. Ils peuvent apporter des choses ; ce sont des personnels ressources pour le service, dans le cadre de réflexions diverses.

Le grade qui leur est conféré l'est à titre temporaire : il ne donne pas de compétence en matière d'encadrement et il n'est accordé que pour la durée et dans le cadre de la mission ; il n'y a donc, je le répète, aucune prérogative de commandement pour ces réservistes spécialistes, quel que soit le grade qu'on leur attribue. Depuis 2002, la gendarmerie nationale a recruté 124 réservistes spécialistes ; nous en avons 74 aujourd'hui.

La réserve citoyenne est forte de 1 315 réservistes citoyens ; elle vise à entretenir l'esprit de défense et le lien entre la Nation et les forces armées, entre la gendarmerie et la population. Les grades y sont honorifiques, ils n'emportent aucune prérogative de commandement et leurs titulaires n'ont pas vocation à assurer des missions de sécurité publique. Cette réserve citoyenne est tout à fait transparente puisqu'elle fait l'objet de décisions formelles. Ses personnels portent régulièrement, à l'occasion de cérémonies, des insignes distinctifs permettant d'indiquer leur appartenance à cette réserve.

Concernant les deux personnes faisant l'objet du travail de votre commission, MM. Alexandre Benalla et Vincent Crase, je veux apporter quelques précisions sur le processus ayant conduit à leur recrutement et à leur emploi.

Alexandre Benalla était engagé dans la réserve opérationnelle depuis 2009, dans le cadre d'un travail de sécurité publique générale, dans le département de l'Eure. Il a servi pendant 194 jours au total, entre 2009 et 2015 ; depuis cette date, il n'a plus été employé, sans raison particulière, sans doute parce qu'il n'avait pas le temps. Il a donc été employé de manière importante - 194 jours, c'est une période intéressante -, et, pendant sa période d'emploi, il a donné satisfaction. Tous les éléments qui me sont remontés n'ont fait état d'aucune difficulté de comportement ni d'engagement.

J'ai rencontré M. Benalla à l'occasion de différents déplacements, notamment lors du retour en avion de Saint-Martin. Nous avons pu discuter de choses et d'autres, puis de son engagement dans la réserve ainsi que de sa vision de la protection et de la sécurité des personnes.

Il faut savoir que, au deuxième semestre de 2017, nous avons connu un certain nombre d'agressions de gendarmes et d'incendies de casernes - l'incendie des garages de Grenoble, au cours duquel cinquante véhicules ont brûlé, l'incendie de véhicules à Limoges, l'incendie de la caserne de Meylan, qui visait les familles - et l'on a tous les ans des agressions contre les gendarmes ; en 2017, 1 926 gendarmes ont fait l'objet d'agressions dans le cadre de leur service quotidien.

Dans ce cadre, nous avons lancé un groupe de réflexion sur la protection de nos personnels, et il me paraissait intéressant d'avoir un oeil extérieur. Je considérais que, compte tenu de son expérience en matière de protection des personnalités, M. Benalla représentait un personnel ressource utile, que j'ai intégré dans le vivier des réservistes spécialistes.

M. Vincent Crase est dans une situation un peu différente. Il a été intégré dans la réserve opérationnelle en 1996, en provenance de l'armée de l'air. Il a progressé classiquement dans le cadre de la réserve opérationnelle de sécurité publique - capitaine puis chef d'escadron, son grade aujourd'hui. Il a régulièrement assuré des missions de formation et d'encadrement, et il totalise 414 jours de convocation à la réserve. Il a été versé dans cette réserve et il y assure de manière satisfaisante, à ma connaissance, ses fonctions de formateur, d'encadrant - c'est d'ailleurs au titre de ses fonctions d'encadrant qu'il était employé au sein du commandement militaire de l'Élysée.

Je précise pour la parfaite information de votre commission qu'aucun des deux n'était activé comme réserviste le 1er mai. Nous avons 30 000 réservistes, qui ont chacun une vie dans la société civile ; ils ne sont considérés comme réservistes que quand ils font l'objet d'une convocation formelle tracée, que l'on retrouve dans nos outils de gestion. Quand ils sont convoqués, ils doivent répondre à la discipline militaire. Le reste du temps, ils ont leur vie personnelle, dans laquelle le commandement ne s'immisce pas.

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