Je n'ai pas à porter d'appréciation sur les déclarations de ces responsables. Mais je puis vous expliquer pourquoi j'ai pris une sanction et pourquoi je n'ai pas engagé d'autre démarche, enquête administrative ou saisine de la justice sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale. Le directeur de cabinet du Président de la République est le chef des services de l'Élysée : c'est à moi qu'il incombe de prendre des sanctions, j'ai été recruté pour cela. Je l'ai fait, rapidement. J'ai tenu compte de ce que montrait la vidéo - outre des scènes d'affrontement confuses, l'interpellation d'un manifestant qui se débat et qui est immobilisé par des policiers et par M. Benalla. Je n'ai pas relevé d'acharnement entre lui et le manifestant. J'ai replacé ces faits dans leur contexte : le 1er mai au soir, m'a confirmé la préfecture de police, il y a eu des affrontements place de la Contrescarpe et 31 interpellations. Ce n'était pas une tranquille soirée de printemps...
J'ai replacé cette scène dans l'ensemble de la journée. Les images des manifestations du 1er mai ont sidéré nos concitoyens par leur violence extraordinaire, d'abord boulevard de l'Hôpital puis vers le Quartier latin. La manifestation a dégénéré parce que 1 200 à 1 500 black blocks étaient venus pour « casser du flic » comme ils l'avaient annoncé sur les réseaux sociaux. Commerces saccagés, entreprises pillées, chef d'entreprise en larmes qui avait tout perdu, équipements publics détruits, voitures incendiées, policiers blessés... et 276 interpellations à Paris. Je me suis efforcé de faire la synthèse des données. Y avait-il préjudice grave à l'égard du manifestant concerné ? Il n'avait pas été blessé, n'avait pas eu d'incapacité de travail, n'avait pas déposé plainte. En revanche le préjudice à l'égard de la société est manifeste.
Je signale également que ni le préfet de police - autorité sous laquelle était placé le dispositif auquel s'est joint M. Benalla le 1er mai -, ni l'IGPN qui a eu connaissance de la vidéo le 3 mai n'ont suggéré d'enquête administrative ou judiciaire. Je ne le dis pas pour me défausser, mais la directrice de l'IGPN, au vu des images, a estimé qu'il y avait des « gestes techniques mal maîtrisés, mais pas de violences illégitimes ».
En considérant tous ces éléments, j'ai pris la décision que j'ai dite (mise à pied, rétrogradation et avertissement), pour sanctionner un comportement déviant, une faute personnelle détachable du service. Cela n'empêchait pas d'autres autorités d'engager dans leur domaine de responsabilité des poursuites si elles le pensaient nécessaire. Ma décision était adaptée à la situation que je connaissais le 2 mai. Si j'ai commis une erreur d'appréciation, je l'assume, c'est pour cela que j'ai été recruté.