Intervention de Martin Lévrier

Réunion du 26 juillet 2018 à 10h30
Encadrement de l'utilisation du téléphone portable dans les écoles et les collèges — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Martin LévrierMartin Lévrier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il aura fallu vingt ans pour admettre que l’usage du téléphone portable dans les établissements scolaires est préjudiciable à la pédagogie !

Les élèves ne peuvent s’empêcher de consulter leur mobile en cours, ce qui diminue leur capacité de concentration. Au moment des intercours, des récréations, des pauses déjeuner, les interactions humaines des jeunes perdent en qualité, l’usage du téléphone portable les rendant captifs de leurs écrans.

Par ailleurs, si le harcèlement scolaire n’a pas attendu l’arrivée des mobiles et d’internet pour exister, les téléphones portables ont amplifié le phénomène. Un jeune sur cinq a subi ou subira des menaces ou des messages haineux par ce biais.

Enfin, les appareils connectés exacerbent les différences sociales, ce qui pousse les parents à acheter des produits de marque, de peur que leurs enfants ne deviennent la risée de leurs camarades dans la cour de récréation.

L’encadrement de l’usage du téléphone portable à l’école était une promesse de campagne d’Emmanuel Macron, s’inscrivant dans une volonté de garantir un « droit à la déconnexion pour les enfants ».

Jusqu’à présent, l’utilisation du mobile était encadrée par une autorisation de principe, restreinte par les règlements intérieurs des établissements scolaires. Cette proposition de loi vient renverser la norme. Désormais, une interdiction de principe est édictée par la loi. L’utilisation du smartphone est prohibée pendant les cours, dans la cour de récréation ou durant les permanences.

À compter de la rentrée de 2018, les chefs d’établissement pourront s’appuyer sur un cadre juridique ferme pour appliquer dans l’enceinte scolaire l’interdiction généralisée du téléphone portable. Ils pourront ainsi lutter efficacement contre les dysfonctionnements engendrés par l’omniprésence des outils numériques. C’est une avancée majeure, alors que de nombreux enseignants n’osaient parfois pas aller au bout de leur démarche à cause de l’insécurité juridique qui entourait cette réponse disciplinaire.

Mais, pour obtenir de véritables résultats à long terme, l’encadrement de l’usage des téléphones portables et autres terminaux est indissociable d’un volet pédagogique.

Dans un premier temps, il est essentiel d’accompagner et de former les élèves à l’utilisation responsable d’internet et des outils technologiques. Le discernement est un apprentissage. Il est de notre devoir d’aider les enfants, préadolescents et adolescents à développer leur capacité à juger clairement et sainement des choses. Ils doivent apprendre à contrôler leur temps de connexion, à filtrer les sites malveillants, à l’instar des sites de jeux d’argent ou pour adultes, à dissocier l’information de qualité des fake news.

Dans un deuxième temps, les enseignants ne doivent être ni technophiles ni technophobes, mais « technoréfléchis ». Il est indispensable que l’enseignant prenne la main et puisse utiliser à bon escient ces outils au potentiel cognitif non négligeable.

Cette dimension éducative, nous avions essayé de l’introduire dans le texte dès la première lecture au Sénat, mais notre amendement tendant à autoriser l’usage d’outils technologiques à des fins pédagogiques avait hélas été rejeté en séance. Son dispositif a fort heureusement été rétabli, à l’article 1er, par la commission mixte paritaire.

Nous devons nous féliciter des travaux constructifs qui ont été réalisés par nos deux chambres, notamment par les rapporteurs, et de l’accord positif qui a été trouvé en commission mixte paritaire. Il permet d’aboutir à un texte équilibré répondant aux objectifs que nous nous étions fixés.

Je salue notamment le travail du rapporteur de la commission des lois, M. Piednoir, qui a permis de modifier le cadre de la confiscation. Sa contribution permet aux établissements de garder une certaine latitude dans l’application, puisque le règlement intérieur pourra prévoir, le cas échéant, des exceptions.

La commission mixte paritaire aura également permis de rétablir l’article 2, qui introduit une dimension numérique dans la définition de l’éducation à la responsabilité civique, l’article 3, qui inscrit dans la loi l’éducation aux droits et devoirs liés à l’usage d’internet et des réseaux sociaux dans les écoles et les établissements d’enseignement, et l’article 4, qui soutient la mise en place d’expérimentations en matière d’utilisation des ressources numériques.

Ce sont autant de signaux forts en faveur de l’inclusion du numérique dans l’éducation. Bien évidemment, il ne s’agit que de premiers jalons sur cette voie, mais ces différentes dispositions encourageront les élèves à appréhender les outils de communication avec lucidité, esprit critique et civilité.

À travers cette proposition de loi, nous donnons à l’enseignement les moyens juridiques et pédagogiques qui lui manquaient. Le texte marque également l’importance que revêt l’école dans notre société. C’est pourquoi le groupe La République En Marche se félicite de l’accord trouvé en commission mixte paritaire et votera la proposition de loi.

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