Intervention de Olivier Dussopt

Réunion du 25 juillet 2018 à 21h30
État au service d'une société de confiance — Adoption en nouvelle lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Olivier Dussopt :

Monsieur le président, madame, monsieur les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai plaisir à me retrouver devant votre assemblée pour cette nouvelle lecture du projet de loi pour un État au service d’une société de confiance.

Je tiens tout d’abord à vous remercier sincèrement de votre engagement tout au long de nos échanges. Ils ont été respectueux, constructifs, intenses aussi, puisque, depuis la présentation du texte en première lecture à l’Assemblée nationale, nous avons eu au total près de cent heures de débat avec les parlementaires. Au terme de ce long cheminement de la rue de l’Université à celle de Vaugirard, je ne doute pas que vous connaissiez toutes et tous ce projet de loi à la lettre. Je me contenterai donc d’en rappeler l’esprit.

Le projet de loi comprend deux volets : le premier porte sur la confiance et concrétise l’engagement du Président de la République d’un droit à l’erreur pour les particuliers comme pour les entreprises ; le second concerne la simplification des démarches administratives.

Ce projet de loi est l’un des deux piliers d’un cadre équilibré en matière de relations entre l’administration et ses usagers. Le premier pilier, dont nous allons continuer de débattre ensemble, est celui de la bienveillance vis-à-vis de l’usager de bonne foi. Le second, que Gérald Darmanin défend aujourd’hui même devant votre assemblée et devant l’Assemblée nationale, est le renforcement de notre politique de lutte contre la fraude. Contre tous ceux qui enfreignent volontairement les règles, l’État ne doit faire preuve d’aucune faiblesse ni d’aucune tolérance.

S’agissant plus précisément de l’apport de la Haute Assemblée au présent projet de loi, en dépit de l’échec de la commission mixte paritaire, près d’un tiers des dispositions adoptées par les sénateurs en première lecture ont été reprises. Je pense notamment à l’encadrement de la durée de contrôle par l’URSSAF pour les entreprises de moins de vingt salariés ou à l’extension du rôle des commissions des impôts directs et des taxes, au sein desquelles siègent des professionnels.

Le Gouvernement souhaite que cette nouvelle lecture se déroule dans l’exact même état d’esprit. Nous ferons ainsi preuve de la même écoute.

Nous continuerons aussi à respecter deux principes qui nous paraissent essentiels.

Premièrement, le projet de loi n’est pas un texte de simplification, même s’il contient des simplifications. Le ministre de l’action et des comptes publics vous a adressé, comme il s’y était engagé, un état des lieux précis des lois de simplification que nos prédécesseurs ont fait adopter. Vous connaissez la stratégie que nous mettons en œuvre en la matière : désormais, chaque projet de loi contient un volet de mesures de simplification thématiques qui lui sont adossées.

À cette méthode s’ajoute une exigence : deux normes supprimées pour toute nouvelle norme créée. Avant l’actuel quinquennat, le Gouvernement prenait une centaine de décrets chaque année instaurant des contraintes nouvelles, soit trente à trente-cinq décrets tous les quatre mois. Durant les quatre derniers mois de l’année dernière, les ministères n’ont proposé que douze décrets de cette nature, et seuls cinq ont été pris, qui ont conduit à l’abrogation parallèle de dix contraintes existantes. On en parle peu, mais c’est là un changement concret dans le fonctionnement de nos administrations.

Par ailleurs, nous œuvrons aussi pour diminuer de manière extrêmement sévère le nombre de circulaires et, surtout, pour supprimer celles qui sont devenues obsolètes.

Deuxièmement, le projet de loi porte sur la seule relation entre l’administration et les usagers. Cela continue, je le sais, d’être un motif de désaccord entre la majorité sénatoriale et le Gouvernement. Nous considérons qu’il n’a pas vocation à régler les relations entre les différentes administrations, notamment entre l’État et les collectivités territoriales.

À l’inverse, grâce, notamment, à votre vigilance, nous avons tenu à ce que l’ensemble des propositions nées des débats n’induisent pas de charges ou de complexité supplémentaires pour les collectivités territoriales. C’est d’autant plus justifié alors que nous avons engagé avec elles une politique de contractualisation.

Le temps législatif est, certes, essentiel ; en même temps, le rendez-vous que nous ne devons pas manquer est celui de l’exécution. Nous avons déjà commencé à nous y atteler, car, en matière d’action publique, il n’y a que les preuves qui comptent.

L’ensemble des décrets d’application seront publiés avant le 31 décembre 2018. Les ordonnances s’inscrivent dans un calendrier un peu différent, qui dépend de l’ampleur des travaux. Nous veillerons à les élaborer dans la plus grande concertation. Nous veillerons également à la mise en œuvre aussi rapide que possible de chaque disposition.

La mise en œuvre opérationnelle du texte est aussi à privilégier. Ainsi, nous allons accompagner de façon inédite la mise en œuvre effective de la loi.

Outre les initiatives déjà lancées sur lesquelles nous allons nous appuyer, comme l’élargissement des horaires des services publics, nous allons construire avec les usagers et les agents les modalités concrètes de mise en œuvre des dispositions du texte, en mobilisant toutes les forces vives dans les territoires pilotes. À partir de ces territoires, nous pourrons tirer tous les enseignements nécessaires à la mise en œuvre effective de la loi dans tout le pays.

Ainsi, le référent unique pour les entreprises sera expérimenté dans le Pas-de-Calais, en Côte-d’Or et dans le Maine-et-Loire, en repartant des besoins des entreprises et des dynamiques locales existantes. Nous fonctionnerons ainsi pour tous les grands chantiers de la future loi. Les administrations sont d’ores et déjà à la tâche, afin de lancer ces travaux sitôt la loi promulguée.

Par ailleurs, pour maintenir une pression – bienveillante, évidemment – sur l’exécution de la loi, nous aurons besoin de l’ensemble des parlementaires, besoin de vous toutes et tous. Votre contribution passera par l’exercice de vos missions d’évaluation traditionnelles, mais aussi par le Conseil de la réforme porté par les députés et auquel nous souhaitons que des sénateurs puissent être associés. Nous apporterons tout notre appui à cette initiative en mobilisant nos administrations.

Mais la loi seule, votée, exécutée et suivie par nous tous, ne suffira pas. Nous sommes conscients que nous aurons besoin d’investir. Tel est le sens des annonces faites le 20 juin dernier avec Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État, en ce qui concerne les lauréats du Fonds pour la transformation de l’action publique. Dans ce cadre, 700 millions d’euros seront consacrés à la transformation de nos administrations sur la durée du quinquennat ; 200 millions d’euros d’autorisations d’engagement sont prévus dès cette année.

Ainsi, 5 millions d’euros sont affectés au financement d’une application permettant un meilleur ciblage du contrôle fiscal, grâce à l’intelligence artificielle et au data mining.

Ce fonds inscrit pleinement ses investissements dans le cadre de la nouvelle société de confiance. De même, quand une procédure est dématérialisée, notre seule volonté est de simplifier la vie des usagers, celle des administrations et de réduire le risque d’erreur.

Ce même effort d’investissement, nous le ferons pour la formation des agents publics. C’est l’une des actions prioritaires du schéma directeur 2018-2020 pour la formation professionnelle des agents de l’État, qui vise à diffuser auprès de l’ensemble des agents une culture renouvelée de la relation à l’usager, fondée sur l’accompagnement, le conseil et la bienveillance. Pour la seule année 2018, 250 millions d’euros de crédits de formation ont d’ores et déjà été réorientés autour des objectifs de transformation de l’action publique.

Enfin, pour mesurer les effets concrets de ces transformations, nous ferons preuve de transparence vis-à-vis de l’ensemble des Français. Nous suivrons l’évolution de leurs relations avec l’administration et la progression de la confiance par la mise en place d’un baromètre de la confiance, dont nous rendrons les résultats publics chaque année. Gérald Darmanin et moi-même souhaitons que la publication de ces résultats donne lieu à un débat avec l’ensemble des parlementaires.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, investir dans la transformation et en mesurer les effets sont des principes sur lesquels, je le sais, nous saurons nous retrouver. Ils marquent la volonté du Gouvernement de bâtir un nouveau modèle d’action publique, au service de l’ensemble des Français.

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