Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce projet de loi avait suscité beaucoup d’attentes avant même son dépôt. Malgré une certaine déception quant à son véritable contenu, nous avions choisi d’aborder son examen de manière constructive. À cet esprit d’ouverture du Sénat, les députés de la majorité ont opposé une fin de non-recevoir, leur intransigeance conduisant à l’échec de la commission mixte paritaire. Quel mépris à l’égard du travail accompli par le Sénat pour enrichir et clarifier le texte initial ! Malgré tout, nous continuons à rechercher le compromis, et une convergence demeure possible.
S’agissant de l’article 2, qui crée un droit à l’erreur et un droit au contrôle au bénéfice des usagers dans leurs relations avec l’administration, l’Assemblée nationale a rétabli le texte issu de ses travaux en première lecture, sans vraiment examiner le travail du Sénat. Notre commission spéciale a donc rétabli le texte du Sénat, qui ne visait qu’à préciser et à rendre plus incitatif le dispositif proposé.
L’Assemblée nationale a supprimé l’extension du droit à l’erreur aux collectivités territoriales dans leurs relations avec l’État. Or je demeure convaincue de son utilité, comme vous, je pense, mes chers collègues. J’ai donc proposé à la commission spéciale, qui l’a adoptée, une rédaction de compromis réservant le bénéfice du dispositif aux plus petites communes et aux EPCI les plus modestes. De nombreux maires nous font part régulièrement de leurs difficultés d’interprétation des textes. Ce droit à l’erreur doit leur apporter davantage de sécurité juridique.
Je comprends la volonté de certains d’entre vous de ne pas opérer de distinction entre collectivités et d’ouvrir le dispositif plus largement. Je m’en remettrai à la sagesse de notre assemblée sur ce sujet.
Par ailleurs, je pense que nous pouvons nous féliciter de l’adoption par l’Assemblée nationale du report de trois ans, au 1er juillet 2021, de l’inclusion des élus locaux et des fonctionnaires dans le champ d’application du répertoire numérique des représentations d’intérêts prévu par la loi Sapin II. Cette avancée est à mettre au crédit du Sénat.
Si la commission mixte paritaire n’a pas abouti, ce n’est pas, en tout cas, à cause des dispositions fiscales du projet de loi.
Tout d’abord, plusieurs dispositions ont fait l’objet d’une adoption conforme en première lecture, dont la garantie fiscale, l’une des avancées les plus notables du texte en faveur des contribuables.
Dans le même esprit, le Sénat avait introduit un article additionnel prévoyant que, à l’issue d’un contrôle, le courrier adressé au contribuable mentionnerait non seulement les points faisant l’objet de rectifications, mais aussi les points que le vérificateur a examinés et qu’il considère comme conformes à la loi fiscale. Les députés ont apporté leur soutien à cette mesure et l’ont étendue aux contributions indirectes.
Introduite par le Sénat, la dispense d’obligation de télédéclaration pour les contribuables résidant dans une zone blanche a été maintenue par l’Assemblée nationale.
En définitive, rien d’ambitieux dans ce projet de loi. Le droit à l’erreur existe en effet depuis bien longtemps en matière fiscale.
Trois motifs importants de désaccord demeurent sur les articles fiscaux du projet de loi, mais nous ne perdons pas espoir d’aboutir à un compromis.
Premièrement, l’article prévoyant la publication des rescrits, que l’Assemblée nationale a supprimé, a été rétabli par notre commission spéciale dans une rédaction de compromis, limitée aux demandes présentant un intérêt général, et non plus une portée générale, de façon à laisser une plus grande marge d’appréciation à l’administration.
Deuxièmement, en ce qui concerne l’ouverture au public des données relatives aux transactions immobilières, nous avons choisi de rétablir les garanties nécessaires à la protection de la vie privée, mais dans une version de compromis compatible avec un dispositif d’open data. À l’heure du règlement général sur la protection des données, nous ne pouvons aller à rebours de l’histoire.
Troisièmement, nous avons précisé, comme en première lecture, le champ de l’habilitation prévue pour relancer la relation de confiance, tout en conservant un apport bienvenu des députés, qui permettrait à l’administration de labelliser les sociétés engagées dans le dispositif dans une logique de responsabilité fiscale des entreprises.
J’en viens aux dispositions touchant aux affaires sociales.
En ce qui concerne la médiation, l’Assemblée nationale a créé un dispositif juridique commun à l’ensemble des branches du régime général de la sécurité sociale, tenant compte de nos préoccupations.
Le projet de loi prévoit aussi, à titre expérimental, un cadre dérogatoire au droit du travail pour permettre la mise en place de prestations de relayage des proches aidants. Nous rétablirons l’encadrement de cette expérimentation, en rendant applicable la convention collective des salariés du particulier employeur.
De même, nous rétablirons un article modulant le montant de l’annulation des exonérations de cotisations sociales encourue par l’employeur lorsqu’il omet de déclarer certaines heures supplémentaires ou qu’une prestation de services est requalifiée en travail salarié.
Enfin, je vous proposerai à nouveau de supprimer l’habilitation demandée par le Gouvernement pour réformer par ordonnances les règles qui régissent les modes d’accueil du jeune enfant. Outre qu’il s’agit clairement d’un cavalier législatif, le champ de cette habilitation me semble excessivement large.
Je vous fais confiance, monsieur le secrétaire d’État.