Intervention de Stéphane Braconnier

Commission d'enquête mutations Haute fonction publique — Réunion du 22 mai 2018 à 14h30
Audition de M. Stéphane Braconnier professeur des universités

Stéphane Braconnier :

Pour répondre à la première question, je n'ai pas eu à connaitre de situations précises de ce type. Des échanges existent néanmoins entre secteurs public et privé, dans un cadre parfois institutionnel mais parfois moins formel. C'est cette porosité insuffisamment contrôlée qui peut être problématique. Il est normal que le secteur privé présente des solutions innovantes au secteur public, dans le domaine technologique, juridique financier ou de l'environnement, notamment. Je pense que c'est son rôle et qu'il revient ensuite aux pouvoirs publics de retenir ou non ces solutions. Le grand débat actuel en lien avec la commande publique sur le sourcing ou les partenariats d'innovation en sont la preuve.

La limite à cette porosité entre secteurs publics et privés réside dans les conflits d'intérêts. Cette question a été traitée ces derniers mois par le Parlement mais je pense qu'il sera nécessaire qu'elle revienne régulièrement dans les débats. La porosité ne doit pas être complètement éliminée mais elle doit être maîtrisée. Or ce n'est pas le cas dans un certain nombre de situations qui touchent notamment la juridiction administrative, exemple souvent cité. Le départ d'un juge administratif vers un cabinet ministériel puis vers une entreprise privée avant un retour en juridiction administrative crée des situations délicates. C'est un sujet complexe puisqu'il touche au dualisme fonctionnel de la juridiction administrative, à la fois conseil du gouvernement et juge de l'administration. Cette question se pose au niveau national mais également au niveau local, même si on en parle un peu moins. Il y a, là encore, des situations complexes en cas de passage de l'administration d'un EPCI vers une entreprise dont l'activité intéresse la collectivité ou des assistants à maîtrise d'ouvrage qui deviennent consultants.

Il faudra donc revenir vers ces sujets, malgré les lois récentes sur les conflits d'intérêts. Je considère que l'on est allé trop loin dans la pénalisation du droit de la commande publique mais pas suffisamment loin dans la maîtrise des conflits d'intérêts.

Concernant le sujet du droit européen, il a le mérite de niveler les situations. On rencontre finalement uniquement deux catégories d'État : ceux qui, comme la France, ont une tradition de grands opérateurs publics et qui se sont ouverts à la concurrence en mettant en place des organes de régulation. On trouve ensuite les États de l'Est, qui ont procédé à une privatisation intégrale.

La France a fait évoluer sa situation, sous la pression de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne.

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