Intervention de Hervé Joly

Commission d'enquête mutations Haute fonction publique — Réunion du 23 mai 2018 à 16h05
Audition de M. Hervé Joly directeur de recherche à l'ens lyon

Hervé Joly, directeur de recherche au CNRS :

En tant que chercheur, mon rôle n'est pas de faire des prescriptions.

Jusqu'en 1946, les inspecteurs des finances n'avaient droit qu'à un congé d'un an, à l'issue duquel ils devaient choisir entre revenir ou démissionner. Un certain nombre d'entre eux ont démissionné dans les années vingt, mais lors de la crise des années trente, certains ont perdu leur emploi et ont essayé d'être réintégrés. Depuis, la durée du congé a été portée à dix ans pour tout le monde.

Aujourd'hui, certains font le choix par défaut de revenir parce que leur carrière dans le privé n'a pas pris le tournant qu'ils espéraient. D'autres font de brefs retours qui leur permettent de remettre les compteurs à zéro et de prendre un autre congé.

Ce n'est pas forcément intéressant de revenir. Certains réintègrent leur corps, mais occupent des fonctions subalternes jusqu'à la fin de leur carrière. D'autres prennent des responsabilités et reviennent pour occuper un poste de directeur de cabinet ou de directeur d'administration centrale. Ils font alors le choix de sacrifier leur salaire et de le diviser par quatre ou cinq. Je pense par exemple à Stéphane Richard, qui est revenu un temps à la direction du cabinet du ministre des finances. De tels retours sont généralement très provisoires et sont un tremplin avant un nouveau départ dans le privé. Ainsi, Stéphane Richard occupait une fonction de second rang chez Véolia. Il a ensuite pris la direction du cabinet du ministre des finances avant de devenir PDG d'Orange.

Il en est de même pour François Pérol, ensuite parti à BPCE ; il a tiré des bénéfices de son retour dans le public. Ce retour est-il lié à une extraordinaire vocation à servir l'État ou à un retour provisoire ? Faut-il encourager ces allers-retours ? Cette expérience du privé est positive pour des hauts-fonctionnaires qui en ont peu - hormis lors de leurs brefs stages. En Allemagne, pour des responsabilités semblables, les impétrants ne sont pas nécessairement fonctionnaires ; ils peuvent avoir une longue expérience dans le secteur privé. Si cette expérience du privé, en soi intéressante, ne sert que de tremplin, elle constitue un risque : le haut-fonctionnaire n'aura en tête que sa propre carrière, il n'exercera pas ses fonctions en toute indépendance.

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